Samson descendit du taxi qui l'avait emmené jusqu'à l'Académie. Le policier partit sans donner de pourboire et entendit donc les grognements du chauffeur qui pestait contre les policiers radins. Samson haussa les épaules d'un air perplexe : ce n'était pas qu'il était radin, c'était qu'il n'avait pas de sous. Si jamais il avait une augmentation, il pourrait peut être payer des pourboires, et encore c'était plus intéressant d'économiser pour s'acheter un film porno plutôt que de donner de l'argent à un conducteur ivre, mais pour l'instant la question ne se posait pas puisque la seule façon qu'il aurait d'être augmenté serait de résoudre le meurtre de Jonathan Winson et il avait vraiment la flemme. Il espérait que l'agent qu'on avait mit à sa place lors de son départ avait avancé mais il ne se faisait pas d'illusions : les élèves étaient de véritables murs de bétons capable de cacher n'importe quoi. Ce n'était pas pour rien que l'Académie Weins avait ouvert ses portes. Cette Académie accueillait les élèves en difficultés ou ceux ne pouvant aller ailleurs. Mais depuis qu'il avait vu les élèves, Samson se demandait si cette Académie avait vraiment été créée dans un seul but de solidarité. Le policier se demandait si ce n'était pas plutôt une Académie faite pour ''laver les cerveaux" des jeunes posant problèmes au gouvernement. Mais comme il n'avait aucune preuve, le policier ne disait rien. Et puis combien même il en aurait eut la preuve, il n'aurait rien dit ! Samson tenait à son poste de policier et ne tenait pas à finir la tête détachée du corps sous-cause de "haute trahison". Oui parce que maintenant c'était considéré comme une haute trahison de dire la vérité à propos du gouvernement. Si ça continuait comme ça, on allait finir par considérer "crime contre l'humanité" de dire que Michael Gordon puait des pieds !
Enfin bref, Samson se saisit de son portable en soupirant. Il avait connu les anciennes technologies alors ça lui faisait toujours bizarre de se servir d'un téléphone portable, le genre de truc qu'on utilisait en 2011, autant dire à l'ère des dinosaures ! Il trouva le numéro de sa collègue, celle qui était en ce moment même en train de se taper les interrogatoires de ces foutus gosses. Oui, Samson était censé être au commissariat en train de régler son affaire de drogue ou de je ne sais quoi, mais il avait fini par choper le coupable, l'avait fait passé aux aveux et maintenant il rentrait fier de lui à l'Académie. Sauf que voilà, personne n'était au courant qu'il était rentré... Alors qu'il se trouvait à proximité de l'Allée des Brumes, Samson appela Tess Sayers, son équipière.

- « Allo ? Oui, c'est Samson Hugher. C'est moi qui m'occupait des interrogatoires avant vous. Comment ? Oui mon autre enquête s'est bien finie, j'ai coincé le coupable et il croupit maintenant derrière les barreaux. Oh vous savez, ce n'était pas bien difficile ! Hum hum. Enfin bref, je vous appelais donc pour vous dire que je suis à l'Académie. Oui, je suis venu dès que possible ! Alors voilà ce que je vous propose, afin d'avancer plus vite on va interroger à deux. Enfin je veux dire qu'on va dégotter une autre salle et on va faire passer les élèves deux par deux, ce sera beaucoup plus rapide. Comment ? Qu'est-ce que... Vous entendez ce que j'entends ?! Bon Dieu de Merde ! C'est un cri ! Un cri de fille ! Rejoignez-moi vite, le cri provient de l'Allée des Brumes ! Vite ! »

Et Samson se mit à courir. Ainsi le coupable n'était pas un élève ? Comment était-ce possible, sinon ? Personne n'était sortit du hall alors qui était le coupable. Le cri strident continua de monter dans les aigus alors que Samson courrait vers la source du hurlement...

Il avait vu le regard meurtrier de la grande brune lorsque Allegra Lockhart s'était dirigée vers la salle d'interrogatoire. Il avait vu le regard meurtrier de la brune parce qu'il avait eut le même lorsqu'il avait tué. Il l'avait vu se déplacer discrètement pour ensuite disparaître et il l'avait suivie. Bien évidemment, les deux policiers avaient refusés de le laisser sortir tant que la jeune fille ne serait pas revenue. Mais James savait parfaitement que la brune ne reviendrait pas. Elle avait le regard d'un assassin, elle n'allait pas revenir dans le hall alors que la liberté s'offrait à elle. Non. Dès le premier regard, James avait su que cette fille n'était pas comme les autres. Alors James était partit à une autre porte gardée par d'autres gardes et il avait prétexté l'envie d'aller aux toilettes. Les policiers n'étaient pas au courant que la brune était déjà sortie et ils avaient laissés le garçon partir en le faisant accompagner par un policier. Dès qu'ils furent hors de vue, James tua le policier en lui enfonçant un couteau dans le coeur. Enfin James... pas le gentil James stupide qui est amoureux de la Reine, non. Le James qui sommeillait en lui depuis trop longtemps et qui avait tué mainte et mainte fois sans qu'on le suspecte. Aujourd'hui encore, on ne le suspectait pas. C'était tellement simple de faire l'innocent. C'était tellement simple de vivre en étant deux dans un corps. Parce que voilà, James Miller était schizophrène, dangereusement schizophrène. Il l'était depuis sa plus tendre enfance, lorsqu'il avait été abandonné dans un orphelinat à New-York. James Miller n'avait jamais eut de parents aimants, il n'avait jamais vécu à Los Angeles, il n'avait jamais reçu d'argent de la part de ses parents. Tout simplement parce que ses parents, il ne les avait jamais vu. James Miller, le gentil, avait vécu cet isolement très mal et c'était ainsi qu'était né Justin Miller, son autre lui. James, le gentil garçon innocent et Justin, le tueur calculateur et terrifiant. James avait grandit dans l'illusion la plus totale. Il avait une imagination hors du commun. L'orphelinat était, pour lui, une grande maison. Il avait des parents et une vie géniale, du moins dans sa tête. Parce que extérieurement, il vivait dans un taudis abritant quelques dizaines d'enfants abandonnés à leurs tristes sorts par des parents ne voulant plus d'eux. James était ce qu'on qualifierait de simple d'esprit. Justin était un tueur. Le simple d'esprit abritant un tueur : une combinaison parfaite que personne n'aurait pu détecter. James n'était jamais allé chez un docteur et avait de ce fait conservé le secret sur sa schizophrénie. Et James était entré dans l'Académie Weins parce qu'il avait été retrouvé sur le lieu d'un crime et qu'on le suspectait. Mais bien évidemment, cette affaire était passée aux archives parce qu'on avait bien trop de tueurs à s'occuper. Et puis, on avait jamais plus retrouvé James sur un corps. James, d'ailleurs, ne se souvenait même pas ce qu'il faisait là puisque c'était Justin qui avait tué. James était un gentil garçon, il ne se doutait pas un seul instant qu'en lui-même se trouvait un assassin dangereux. James et Justin, combinaison parfaite.

Après avoir tué le policier, Justin sortit de l'Académie. Il avait tellement soif de sang... Mais il n'était pas idiot et savait parfaitement que s'il avait craqué dans le hall, il aurait été maitrisé par des policiers. Alors Justin allait tuer en dehors de l'Académie, alors qu'il était censé être dedans. Les policiers n'y comprendraient plus rien et on ne le suspecterait plus jamais. Justin n'avait pas peur : tous les policiers étaient à l'intérieur et ils mettraient du temps à trouver le corps. Quand bien même ils le trouveraient rapidement, ils ne feraient jamais le rapprochement : ils étaient bien trop bêtes. Justin avait tué de nombreuses fois sans se faire suspecter, ce n'était pas aujourd'hui que ça changerait. Justin allait tuer puis retourner dans le hall. Quand le policier lui demanderait où était passé son collègue, Justin dirait qu'il l'avait vu sortir de l'Académie. Quand on retrouverait le cadavre, on penserait que le tueur était extérieur à l'Académie et une fois encore, Justin allait s'en sortir.
Pourquoi avait-il tué Jonathan ? Tout simplement parce que ce petit crétin prétentieux avait menacé James et Justin n'appréciait que très moyennement qu'on insulte sa couverture. Jonathan avait menacé James en lui disant que s'il continuait à protéger la Reine, le gouvernement le lui ferait payer. Justin se foutait royalement du gouvernement mais si jamais celui-ci menaçait sa couverture, alors il tuerait. Et Justin avait tué Jonathan Winson, l'infiltré. Il l'avait fait agonisé lentement et avait placé le mot à côté de son corps pour faire comprendre à la Police Secrète que ce n'était que le début d'une grande purge dans leur réseau. Justin était rancunier, très rancunier et pour lui c'était une évidence que la Police Secrète avait envoyée Jonathan sur le ''terrain'' pour vérifier les états d'âmes des élèves. Mais si l'existence de cette stupide police gouvernementale était cachée, Justin l'avait découverte en tuant un de leurs agents. Si la Police Secrète continuait à le pourchasser, alors Justin ferait passer un message dans la ville entière pour faire comprendre à tous que le gouvernement les surveillaient. Justin n'était pas stupide, il savait parfaitement ce qui se passerait si le secret de la Police gouvernementale éclatait : il y aurait la Résistance contre le Gouvernement. Et à ce moment là, Justin pourrait tuer sans qu'on s'occupe de lui...
Une jeune femme passa juste devant lui, une droguée sans doute vu l'état de ses pupilles. Il se trouvait dans l'Allée des brumes et cet endroit allait être la dernière demeure de cette idiote aux cheveux roux foncés. Justin s'approcha d'elle et lui releva la tête en lui tirant les cheveux. Sur le moment, la fille ne comprit pas mais lorsqu'elle vit le couteau s'enfoncer dans son ventre, elle se mit à hurler de toutes ses forces. Justin fit remonter lentement le couteau vers la tête de la jeune fille, tout en maintenant la lame dans le corps. Il n'entendit pas les bruits de pas ni le hurlement du policier. Il sentit tout simplement que c'était la fin, que sa chance l'avait abandonné. Alors Justin laissa le cadavre de la rousse tomber au sol, éventré, et tourna la tête vers le policier. C'était celui qui l'avait interrogé, que faisait-il là ? N'était-il pas censé être au commissariat ? Justin vit le flingue du policier pointé vers lui et il sut que son arrestation serait immédiate. Alors Justin laissa la place à James. James, le gentil garçon qui se retrouva avec un cadavre à ses pieds, un couteau dans la main et un flingue pointé sur lui. James ne comprenait plus rien, la dernière chose qu'il se souvenait avoir fait c'était d'avoir regardé une grande brune dans le hall. Après ça, le trou noir. Alors que faisait-il avec ce couteau ?

- « Dites, qu'est-ce qu'il se passe ? » demanda James d'une voix angoissée.

Samson courait le plus vite possible et, alors qu'il s’essoufflait à vitesse grand V, il se promit de se remettre au sport dès que possible. Il se rappela sa toute première affaire en temps que policier, lorsqu'il avait essayé d'empêcher le viol et l'assassinat d'une gamine de 6 ans. Il se rappelait encore les yeux vides de la fillette et le rire de l'homme. Il se rappellerait toujours la rage qui l'avait habité lorsqu'il avait compris qu'il était trop tard et que la gamine était déjà morte. Jusqu'à la fin de sa vie il se rappellerait la honte et la dépression qui l'avait habité. Pourtant il avait fait tout son possible mais le policier n'est jamais plus rapide que le tueur...
Lorsque Samson arriva, il vit un grand brun enfoncer un couteau dans le ventre d'une rousse droguée et perdue. Samson le reconnu immédiatement : c'était un des élèves qu'il avait interrogé, un Populaire du nom de James Miller, amoureux de Calypso Storm. Était-ce elle qui l'avait forcé à tuer ? Mais pour l'heure la question de la complicité de Mademoiselle Storm ne se posait pas. La jeune fille rousse était morte mais pour une fois, Samson n'y était pour rien puisqu'il n'était même pas censé être là. Le tueur, un élève que personne n'avait suspecté, ne l'avait même pas entendu arrivé tant il était absorbé par son crime.

- « Pose ton arme et les mains en l'air ! Tout de suite ! »

Le garçon sembla enfin se rendre compte de la présence de Samson mais le regard qu'il lança au policier eut comme effet de perturber l'agent. Il avait l'air tellement angoissé, comme s'il ne savait pas ce qu'il faisait là. C'était évident que c'était le tueur, mais malgré tout Samson eut un doute en croisant les yeux de James Miller. Le policier fit un pas en avant et la question du garçon le désarçonna totalement :

- « Dites, qu'est-ce qu'il se passe ? »

Samson ne savait plus comment réagir : ce gamin n'avait pas l'air de se rendre compte qu'il venait de tuer une fille de son âge avec un couteau, en l'éventrant. Samson fit un autre pas en avant et décida de ne pas relever la question du tueur, sinon il allait finir par le laisser s'échapper. Il se poserait des questions plus tard, pour le moment il allait se contenter de lui passer les menottes. Samson plaqua James contre le mur et lui passa les menottes en lui disant de quoi on l'accusait. Le garçon démentit tout et demanda à ce qu'on le relâche mais Samson tint bon. Après un dernier regard vers le cadavre roux, Samson força le garçon a avancer. Ça faisait toujours bizarre au policier de chopper un jeune sur un cadavre, il avait toujours l'impression que c'était "contre-nature". Les jeunes devaient s'amuser, pas tuer ! Mais on était en 2099 et les jeunes s'amusaient en tuant...
Samson vit une femme blonde arriver en courant, suivie de près par deux policiers armés. Ça devait être sa coéquipière, Tess Sayer. Elle avait réagit vite et Samson se surprit à penser que s'il était augmenté, il la voudrait dans son équipe. Il lui dit qu'il y avait un cadavre plus loin et la femme envoya les deux policiers ''nettoyer ça". Ensuite la blonde appela le commissariat et demanda à ce qu'on lui envoie une voiture pour emmener le tueur de Jonathan Winson et d'une autre jeune fille. Samson et elle parlèrent jusqu'à l'arrivée de la voiture et accompagnèrent le tueur. Il laissèrent aux policiers qui étaient sur-place la "joie" de signaler aux élèves que le tueur avait été arrêtés et qu'ils étaient donc libres. Mais Samson ne comprenait toujours pas comment James avait pu sortir du hall et le policier sentit au plus profond de lui que le jeune garçon n'avait pas fait que deux victimes...

James Miller fut condamné à l'emprisonnement à vie et on détecta sa double-personnalité. Des médecins tentèrent d'aider James à "bloquer" ce fameux Justin qui l'avait emmené en prison. On entendit bientôt plus parler de James Miller, mais on ne sut jamais pourquoi le meurtre de Jonathan Winson avait été aussi important en comparaison de tous les meurtres qu'il y avait chaque jours. L'auteur du journal clandestin de Weins fut recherché mais jamais retrouvé. La vie reprit son cours tout en laissant de nombreux élèves et anciens amis de James traumatisés par la découverte. On confia de nombreux élèves à des psychologues pour les aider à relever le choc d'un ami proche qui était en fait un tueur. Samson, de son côté, fut augmenté et promu au poste d'enquêteur. Il fit la demande d'avoir l'agent Tess Sayer dans son équipe et fut exaucé, pour son plus grand bonheur : il allait enfin pouvoir s'acheter des DVD porno et même un prostituée ! Il se retrouva à la tête d'une équipe de quatre personnes et étrangement, il devint beaucoup plus efficace. Mais malgré l'enfermement de James Miller, Tess Sayer et Samson Hugher ne dormaient plus aussi bien car la dernière phrase du tueur les perturbaient bien trop. Les deux personnes se rappelaient mot pour mot ce qu'avait dit Justin Miller lorsqu'ils l'avaient mis derrière les barreaux :

- « Ne vous reposez pas sur vos lauriers : ce n'est que le commencement... »

Et c'est ainsi que James Miller fut enfermé mais que Tess et Samson ne purent s'empêcher de se demander ce qu'il pourrait faire contre cet être ténébreux si jamais il s'échappait...