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If I'd found the right words to say...
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MessageSujet: If I'd found the right words to say... If I'd found the right words to say... Icon_minitime1Mar 24 Juin - 18:15

Un nouvel élève. C'était toujours pour moi quelque chose de merveilleux car cela voulait dire que quelqu'un allait enfin avoir la chance d'être heureux. Bon, dans un premier temps, il risquait de ne pas comprendre l'opportunité qui lui était offerte, ce serait normal. Moi-même, j'étais en colère quand j'étais arrivée. On m'enfermait, m'obligeait à aller à des cours, à ne plus toucher aux seules choses qui me permettaient d'oublier. En plus, on m'avait coupé de Washington, de mes parents et de ceux que je croyais être mes seuls amis, les seuls à me comprendre. Mais ce que j'ignorais en arrivant, c'était que tous ces êtres, les professeurs, monsieur Stanton, agissaient dans mon intérêt, parce que j'étais trop aveuglée par ma souffrance pour voir la vérité et la spirale destructrice dans laquelle je m'étais engluée. Avec un peu de temps et d'aide, ma colère s'était évaporée et je m'étais enfin sentie mieux. De la pauvre et misérable junkie, violente et paumée, j'étais passée à une femme  qui avait des capacités – ce en quoi je ne croyais plus. Non vraiment, cette école avait été la chance de ma vie. Qui, m'ayant connue à Washington, sniffant dans des caves sordides, m'aurait un jour imaginée brillante élève, championne de sprint, ayant fait des stages sous la houlette de Madame la Mairesse ? Oh, j'espérais vraiment que ce nouvel élève serait aussi heureux que moi ici.

La rumeur d'une nouvelle arrivée s'était propagée à travers l'école, mais aucune information précise n'avait filtré à son sujet. Peu importait, il serait bien accueilli de toute manière. Mais à l’entraînement du matin, une surprise m'attendait. Le coach me prit à part à la fin, alors que mes camarades regagnaient les vestiaires, et j'appris que ce mystérieux élève allait en prime rejoindre notre club. Parfait ! Tout était parfait. J'adorais nos nouveaux membres, et il était importants qu'ils se sentent bien et heureux parmi nous, afin qu'ils puissent s'épanouir sereinement dans un sport. Et c'était important de non seulement faire du sport – cela purifiait le corps tout en renforçant le mental, moi, l'athlétisme m'avait aidée à me sevrer et à réparer les dégâts qu'un an et demi d'excès avait causé à mon organisme, car soyons honnêtes, à mon arrivée, je n'étais qu'une loque humaine – mais en plus d'appartenir à une communauté. Il devait comprendre qu'il ne serait jamais seul et pourrait toujours compter sur nous, comme une famille.

Étant l'une des figures de troue de l'équipe et toujours volontaire pour aider les nouveaux arrivants, le coach me demanda de l'accueillir sur le terrain cet après midi après les cours, pour lui montrer un peu les installations, le prendre un peu sous mon aile. J'en étais ravie. C'était vraiment important pour moi d'accueillir les nouveaux. J'avais toujours une attention particulière pour eux, un sourire bienveillant. Être nouveau quelque part n'est jamais chose aisée, alors j'aimais me poser en point de repère. Si jamais ils avaient le moindre doute, s'ils avaient quelque appréhension, s'ils ne savaient pas vers qui se tourner, les nouveaux savaient que je serai toujours là. Comme on l'avait été pour moi. Alors j'acceptai la « mission » avec un grand plaisir. Je serai sur le terrain après les cours pour lui montrer les pistes, les vestiaires, voire même une petite course de bienvenue ! Je ne savais pas quelle vie il avait eue avant d'arriver ici, mais foi de Jade Thomas, il serait heureux avec nous !

« Et comment s'appelle-t-il ? »

« Oh, je n'ai pas encore eu l'information. »

Ce n'était pas grave, je le lui demanderais ! Bref, je quittai le stade après m'être douchée et changée pour rejoindre les salles de cours, mais non sans être passé à l'intendance pour une commande particulière. Je passai ainsi la journée, prenant soigneusement en note le savoir dispensé par nos professeurs, discutant avec plaisir avec James ou encore Rebecca, observant parfois mes camarades à mes heures perdues comme j'apprenais à le faire. Personne n'avait encore rencontré le nouveau. Normal, il y avait tout un tas de choses à régler. Il ferait surement sa rentrée officielle demain. En d'autres termes, je le découvrirai en avant première. Cela avait quelque chose de grisant.

J'eus l'opportunité de finir plus tôt. Une bonne chose ! Je pus repasser par l'intendance et récupérer ce que j'avais demandé. Puis je filai au complexe sportif, enfilai une tenue trop légère pour ce mois de novembre, un short et un débardeur aux couleurs du club avec mon nom écrit en lettres d'or dans le dos : Thomas. J'allais courir de toute manière, pas de risque de prendre froid ! J'attachai mes cheveux en une queue de cheval bien serrée, dégageant bien mon visage. Je pris un sweat, évidemment pour me réchauffer une fois que j'aurais couru, et le paquet que j'avais récupéré. Je déposai le tout sur un banc, inspirait profondément, mains sur les hanches, contemplant l'espace de quelques secondes ce territoire qui était le mien. Désert, chose étrange. D'habitude, on devait parfois se battre avec les footballeurs.  Aucune importance. J'allai me positionner sur la piste, pour faire le vide en moi. Je recherchai ce silence absolu. Le moment où seule la course comptait. Et je m'élançai, mais pas pour un sprint, non. Juste un échauffement, histoire de rôder la mécanique. Ce ne fut qu'au bout d'un tour ou deux que je commençai à varier ma vitesse en introduisant des moment de sprint dans mon endurance. Je ne saurais dire combien de temps je courus. J'aimais cela, au point de perdre toute notion du temps. Plaisir douloureux mais qui m'envoyait tellement d'adrénaline !

Lorsque je ralentis pour m'arrêter, j'étais en nage. Je courais jusqu'à en perdre haleine généralement. Je distinguais une silhouette et retrouvais le sourire. Le nouveau, j'allais enfin le rencontrer. Avant d'être à sa hauteur, je me passai une main sur le visage pour me rendre présentable. Autant faire bonne impression. Puis j'arrivais en trottinant.

« Excuse-moi, je perds un peu la notion du temps quand je cours. Sois le bienvenu, je m'appelle Jade Thom... »

Je m'arrêtai. Mon sourire disparut plus vite que l'éclair. Mon cœur dut même battre de travers. Je devais rêver. Ou plutôt être en plein cauchemar. Je fis même un pas en arrière sans m'en rendre compte. Une vision. Surgie de mon passé que j'avais barricadé tellement loin de mon présent. Ce visage. Ce teint. Ces yeux. Il était juste... plus maigre et émacié qu'avant. Avant...Non, je devais avoir une hallucination. Combien de fois avais-je cru le voir alors que je faisais un « bad trip » ? Sauf que j'étais sobre depuis trois ans. Non. Ça ne pouvait pas être lui. Je pointai un doigt dans sa direction, lui interdisant silencieusement, mais d'un regard sévère, de parler. Mes pas décrivirent un large arc de cercle, pour me rapprocher du banc sans m'approcher de lui, Jayden. J'attrapai le paquet et le déchirai, pour sortir son cadeau de bienvenue... En passant par l'intendance, j'avais demandé à ce qu'ils lui préparent un tee-shirt aux couleurs du club et avec son nom puisqu'eux devaient avoir toutes les informations nécessaires. Je dépliai le maillot. THOMAS.

Je relevai les yeux vers lui. Jayden. Mon... frère... Daniel disait que je devais accepter mon passé, en faire une force. Sauf que je n'étais pas prête à l'affronter, encore moins s'il prenait ce visage. Les barrières que j'avais érigées autour de mon cœur ne suffirent pas à contenir cette colère et cette fureur qui germèrent telle une flamme. Il m'avait abandonnée. Il m'avait laissée sombrer et aujourd'hui il était dans MON monde ? Alors que j'étais enfin heureuse ? Et pourquoi est-ce que Stanton les avaient laissé me faire ça, me l'imposer ? Je me rendis compte que la jointure de mes doigts, crispés sur le maillot, avait viré au blanc. L'espace d'un instant j'envisageai de partir en courant. Mais pourquoi serait-ce à moi de partir ? Gordon et Weins m'avaient apporté la paix. Et la paix dans mon âme seraient maintenues. Visage fermé, je le regardai.

« Va-t-en. VA-T-EN ! »

Va-t-en comme tu es parti il y a cinq ans, mener ta petite vie en nous abandonnant, en m'abandonnant. Va-t-en parce que je suis enfin heureuse.

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MessageSujet: Re: If I'd found the right words to say... If I'd found the right words to say... Icon_minitime1Mar 1 Juil - 19:58

If I'd found the right words to say...
Jade ∞ Jayden

Que restera-t-il de notre passage sur terre ? Un souvenir, à peine une trace que le vent finira par balayer comme si on n’a jamais existé. Pourtant, rien ne s’arrête à jamais, il y a un après. Partir est juste un rendez-vous. Une autre rencontre, dans un nouveau lieu, sous une forme différente. On croit en la réincarnation, au paradis et à son opposé l’enfer. Ou l’on ne croit en rien. Le genre humain est ainsi fait, rythmé au fil du temps par des adorations et des craintes de choses qui le dépassent, effleurant à peine leurs contours et se rattachant à tout ce qui peut lui donner l’impression d’être vivant, d’exister sans être une marionnette entre les mains du destin. Des dieux ont été adulés puis craints. Des fois ont été perdues puis retrouvées. Notre chemin est semé d’embûches, peu importe qui nous sommes. Nous chutons tous à un moment ou un autre, c’est inévitable. Le tout est de savoir se relever et de continuer à avancer. Ma propre chute remonte à cinq ans. Dieu est tombé avec moi à ce moment-là. Durant plus d’un an, il n’a plus été mon guide, j’ai refusé de l’écouter, d’entendre son pardon alors que je me suis senti incapable de me pardonner à moi-même. Depuis que j’ai de nouveau la foi, le chemin vers la rédemption est long, sinueux, parsemé d’obstacles. Il m’arrive de buter contre une pierre, de perdre l’équilibre et de poser un genou à terre. Pourtant, je finis toujours par me relever et reste debout, cherchant mon équilibre, continuant à avancer malgré tout, plus déterminé qu’auparavant. Car désormais j’ai un but qui dépasse ma propre personne, ainsi qu’une idéologie qui m’amène directement ici, dans cette académie, à Weins. Point de rencontre d’un nouveau rendez-vous.

Depuis mon arrivée la veille, tout est matière à découverte. Le personnel administratif, les quelques élèves que j’ai eu l’occasion de croiser. Certains regards rencontrés me donnent l’impression d’être une bête de foire, voire même un extraterrestre débarquant d’une nouvelle planète qu’on ramène dans un centre pour étudier sa morphologie, sa façon de penser. Celui-ci est un parfait cobaye et c’est ce que je suis également en quelque sorte. Sauf que pour ma part, je suis un cobaye volontaire, repoussant son instinct de survie en se jetant directement dans la gueule du loup. Et l’académie est la parfaite incarnation du loup, à la recherche de proies à se mettre sous la dent, non pour les manger mais pour les changer, les polir. Comment s’y prennent-ils pour enrôler des personnes telles que Jade ? Profitent-ils de sa fragilité pour lui bourrer le crâne avec des cours vantant les mérites du gouvernement et tout ce qu’il fait soit disant de bénéfique pour nous ? J’ai encore du mal à croire que ma petite sœur compte parmi les brebis égarées, qu’il n’y a aucun moyen de la sauver ni de la sortir de là comme me l’a affirmé Calypso en me mettant en garde et me défendant quasiment de me rendre entre ces murs. A présent que j’y suis, il est trop tard pour reculer. Je dois continuer, pour Jade, pour moi mais également pour ce groupe d’anti gouvernement auquel j’appartiens.

Revenir en arrière est impossible, il faut continuer d’aller de l’avant, encore et toujours. Même si au passage je dois signer un papier, une sorte de clause de confidentialité interdisant de parler de ce qui se passe au sein-même de l’académie. De toute manière, je doute qu’on me laisse sortir de mon plein gré de sitôt, et de mon côté, je ne le souhaite pas. Pas sans Jade. Ce silence imposé ne me perturbe guère, les seuls comptes que je dois rendre et que je rendrai, je les ferai tous les soirs, avant de m’endormir, en priant notre Seigneur. Il ne m’impose pas de signature écrite, les seules promesses, les seules paroles que je lui adresse, sont faites de mon propre chef et ma fidélité lui est acquise, tout comme elle va également vers le quartier Nord de la ville. Est-ce que certains de ses habitants sont à ma recherche, ont eu vent de mon arrestation dans le quartier Ouest pour propagande anti gouvernementale ? La question m’effleure et alors que je me rapproche du complexe sportif, j’ai une pensée envers mon protecteur. J’espère qu’il comprend ou qu’à défaut, il ne condamne pas mes actes. Je lui serai à jamais reconnaissant mais après presque quatre ans à être couvé, protégé, je me dois de prendre mon envol.

Ce dernier m’amène entre autres aux abords de cette piste. On m’a expliqué que chaque élève doit choisir un sport et quand on m’a présenté la liste de ceux présents dans l’académie, j’avoue que j’ai hésité un instant. De moi-même et si ça ne concerne que moi, mon choix aurait été pour le basketball. Mais mes prunelles ont parcouru toute la liste, et une intuition m’a poussé à finalement opter pour l’athlétisme, sport que je pratiquai rarement au lycée mais qui ne me révulse pas. J’ai tenté de raisonner en me mettant à sa place. Je me trompe peut-être lourdement. Si ça se trouve, j’ai réduit mes chances de la côtoyer. Au moins, je peux me dire que j’ai essayé mais qu’il est écrit que ça ne sera pas par ce biais et qu’il faudra que j’en trouve un autre. Je me rapproche un peu plus de la piste, jusqu’à avancer de deux sur celle-ci. Chaque nouvel élève est accueilli par un ancien. Mon guide est peut-être cette silhouette, non loin de là et qui court déjà. Je la suis du regard, observant sa foulée avant de remonter jusqu’à son visage. Mon cœur manque un battement alors qu’elle s’arrête, remarquant alors ma présence. Jade. Presque un auparavant, j’ai crié son nom sans qu’elle m’entende. A présent que j’ai l’occasion de prononcer son prénom et que ça arrive jusqu’à elle, je reste muet, paralysé et incapable de dire quoique ce soit alors qu’elle s’approche de moi.

Sa voix est une caresse, un peu plus ferme que par le passé. Merci de me permettre de l’entendre de nouveau. Merci de la mettre sur mon chemin si tôt. Merci pour cette bénédiction qui m’est octroyée même si elle n’est pas partagée. Jade a un mouvement de recul en me reconnaissant. Mon bras commence à se lever très lentement dans sa direction mais je m’arrête quand elle me devance, me pointant du doigt. Son regard est sans appel. J’ai en face de moi la Jade des mauvais jours, celle qu’il ne faut pas contrarier et à qui il ne faut pas parler tant qu’elle n’a pas extérioriser ce qu’elle ressent. Le bras retombe le long de mon corps mais je ne la quitte pas du regard alors qu’elle se dirige vers un banc sur lequel elle récupère un paquet dont elle arrache l’emballage. Je distingue un maillot sans comprendre ce qu’il représente. Un cadeau de bienvenue ? Je n’en ai aucune idée. Je sais seulement que si moi j’ai l’agréable surprise de la voir en face de moi, la surprise est partagée mais non la qualification qui l’accompagne.

Trois mots résonnent, tel un couperet. Trois mots que Jade répète en criant. Une lueur douce traverse mon regard. J’aimerais pouvoir accéder à sa requête mais j’en suis incapable. Non par méchanceté, non par plaisir sadique car je ne suis pas de cette nature, mais parce que j’ai patienté trop longtemps avant de me retrouver face à elle. « Je ne peux pas. » Et non je ne veux pas. Ce n’est que la vérité, je suis dans l’incapacité de quitter cette académie. Je suis quelque peu hésitant sur le comportement à adopter. J’ai quitté une adolescente, je retrouve une jeune femme. Je n’ai pas caressé l’espoir qu’elle m’accueille à bras ouvert, voire même qu’elle se jette contre moi pour un câlin fraternel. Je me suis attendu à cette froideur, mais sans doute dépasse-t-elle tout ce que j’ai imaginé dans tous les scenarii auxquels j’ai songé et dont aucun n’est finalement adapté pour la situation présente. « Il m’a fallu un an pour arriver jusque toi. » Je ne rebrousserai pas chemin, hors de question. Si elle ne veut pas me voir, elle peut toujours tourner les talons mais si c’est ce qu’elle souhaite vraiment, elle l’aurait déjà fait. Je suis parti une fois sans invitation, à présent qu’elle m’en offre une, je ne le fais pas. Les compteurs sont en quelque sorte ainsi remis à zéro et de nouvelles bases peuvent prendre place. Comme un nouveau rendez-vous.  
 
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MessageSujet: Re: If I'd found the right words to say... If I'd found the right words to say... Icon_minitime1Mer 2 Juil - 12:28

« Que t’es bête Jayden !  »

« Jaydeeeeeeeeen, j’ai peur. Non ! Prends-moi la main. »

« Seigneur, protège tes enfants, protège papa et maman, Jasmine et Jillian que j’aime même si je me suis disputée avec elles. Et protège Jayden. Papa et maman disent qu’un jour, dans quelques mois, il partira à l’université. Je ne veux pas qu’il s’en aille, je ne veux pas qu’il m’oublie, mais je veux qu’il soit heureux alors si tu le laisses partir, fais qu’il soit heureux et protège le. »

Le passé. Celui que je croyais enterré, sous des tonnes et des tonnes de pierre était là, devant moi. Combien de fois j’avais prié, agenouillée prêt de mon lit, avec la main de Jayden dans la mienne. Combien de fois j’avais cherché ses bras pour y finir une crise de larmes ou me réconforter ? Combien de choses m’avait-il apprises ? Jadis nous étions six. Jadis, nous étions quatre frères et sœurs. Jadis, nous étions deux. Lui et moi. Pourquoi ? Je n’en savais rien. J’aimais mes sœurs. J’adorais jouer avec elles, dormir avec elles… Mais il y avait quelque chose de particulier entre Jayden et moi. Il était mon grand frère, le seul capable de me calmer, de me réconforter, de comprendre quand il ne fallait pas me parler, de dire ce qu’il fallait pour me faire exploser et que je vide mon sac. Mais tout avait volé en éclat. En tuant nos sœurs, c’était plus que deux vies que ces monstres de résistants avaient prises. Ils avaient détruit notre famille et cet amour qui nous unissait. Jayden avait dû me tenir responsable de tout cela, car il ne m’avait plus jamais regardé. Nos mains ne s’étaient plus jamais tenues, plus un mot n’avait été échangé. Et moi, à l’époque, j’avais mal, et je me sentais si coupable que son départ m’avait condamnée. Comme si tout était de ma faute, comme si je ne valais plus rien, comme si j’étais morte avec elles.

Il était parti. Un beau matin, je m’étais levée, et il n’était plus là. Je me souviens à peine du regard de mes parents qui venaient de perdre trois enfants, et qui étaient sur le point de perdre leur dernière. J’avais perdu mes sœurs, mon frère, ma foi… puis ma dignité, ma raison, mes parents, ma liberté. Je m’étais infligée tout le mal possible, cherchant du réconfort dans les chimères des drogues et de l’alcool, me réduisant à tout pour toucher un bout de paradis artificiel qui me semblait mille fois plus réel que ces mensonges chrétiens. Mais depuis trois ans, la paix était entrée dans ma vie. On avait soigné mon âme en m’entourant, en m’offrant tout l’amour dont j’avais manqué, et j’avais réappris à prendre soin de mon corps, à l’assainir, à le respecter. Sur cette piste, notamment. Et si j’avais toujours cru que le danger était à l’extérieur de ces murs, je n’aurais jamais pensé que j’aurais de nouveau aussi mal à l’intérieur de l’académie, de mon Eden, sur cette piste qui était mon territoire.

J’avais refusé qu’il parle, qu’il ouvre la bouche et rende ce moment réel. Mais il était là. Il était bien là. Après cinq ans d’absence et de silence. Pourquoi ? Que foutait-il à New-York et pire, ici ? Il était beaucoup trop vieux pour intégrer l’école. Et qu’avait-il fait ? Tellement de questions, mais jamais elles ne franchirent mes lèvres. Je voulais juste qu’il parte, que j’oublie, et qu’il ne croie pas que je m’intéressais à lui et à sa vie. Nous portions le même nom, c’était écrit sur ce maillot que je froissais sous l’effet de la surprise et de la colère. Nous avions le même passé. Mais hors de question que l’on partage le même présent ou le même futur. Je voulais qu’il s’en aille. Je voulais continuer à mener ma vie, loin des souffrances et des souvenirs.

Je le regardais droit dans les yeux, tête haute et dos bien droit. Oh, il ne pouvait pas. Bien sûr, techniquement, on ne quittait pas l’académie sans l’accord du directeur ou du directeur adjoint. Mais il n’était pas idiot, il devait comprendre que je ne voulais pas de lui dans mon champ de vision. Je ne voulais pas le croiser tous les jours, je ne voulais pas qu’il souille mes lieux de paix, je ne voulais pas qu’il y laisse la trace de notre passé et qu’il m’oblige à me souvenir.

« Il m’a fallu un an pour arriver jusque toi. »

Pardon ? Plait-il ? J’arquai un sourcil, laissant même échapper un rire nerveux. Il se moquait de moi ? Comment osait-il ? De quel droit se présentait-il devant moi pour me balancer cela en plein visage. Là, à cet instant précis, je n’avais qu’une envie : le frapper. Avec autant de violence que j’avais brisé ces trois personnes, trois ans plus tôt, ce qui m’avait valu d’être arrêtée par la police. Je n’avais jamais eu d’accès de violence depuis que j’étais ici. A part une gifle. Mais là, je sentais que cela pouvait arriver. Sa présence venait de réveiller quelque chose en moi. Comme un monstre tapi dans l’ombre, un démon de douleur et de rage contenues. Mais je ne devais pas exploser. J’étais Jade Thomas, une Platine, élève modèle. Je ne voulais pas être une sœur dépassée par ses émotions envers son frère.

« Un an pour arriver à moi ? Quatre ans pour te souvenir que j’existais. Et quelques secondes pour me laisser en arrière il y a cinq ans. Et c’est censé m’impressionner ? »

D’un geste brusque, je lui balançai le tee-shirt de l’équipe, comme s’il me brûlait les doigts.

« Je te conseille de faire changer le nom. Et de changer de club. Je ne sais pas ce que tu fiches ici, Jayden. Comme pour tous ceux qui entrent ici, je te souhaite d’aller bien et d’être heureux et de trouver la paix comme ça a été le cas pour moi. Mais ce sera tout ce qu’il y aura entre toi et moi. Un an pour arriver à moi, hein ? Félicitation, tu as réussi. Maintenant, bonne soirée. »

Je ne fuirai pas, je ne fuirai pas. J’aurais pu. J’étais en baskets, en tenue, je connaissais le terrain. Mais fuir devant lui reviendrais à avouer que je n’étais pas indifférente, qu’il me mettait vraiment en colère et que j’avais encore mal, que je me souvenais encore de ses silences et de sa façon de m’ignorer ? Aujourd’hui, les choses avaient changé. C’était à mon tour de refuser de tendre la main. Alors je fis quelques pas en avant, dans l’intention de regagner les vestiaires. Il saurait très bien se débrouiller seul, comme je l’avais fait à l’époque. Je voulais bien accueillir des nouveaux, mais la plaisanterie avait ses limites et j’avais fini de jouer.

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MessageSujet: Re: If I'd found the right words to say... If I'd found the right words to say... Icon_minitime1Dim 6 Juil - 10:08

If I'd found the right words to say...
Jade ∞ Jayden

Toute émotion humaine engendre des réactions. La colère est un sentiment qui n’échappe pas à la règle. Même plus loin que cela, elle est même un péché capital conduisant à une réaction en chaîne d’autres péchés. Elle est également liée à la tristesse, au refoulement et à un besoin profond de laisser s’exprimer ce que l’on ressent. On ne sait jamais vraiment comment réagir face à une colère : en laissant monter ce sentiment qui nous brûle de l’intérieur, en le refoulant, en y répondant avec une désinvolture horripilante ou au contraire avec une compassion faisant naître une envie très forte de devenir violent. Il n’y a pas de réaction appropriée car chaque colère est unique tout comme chaque être humain qui en est animé. Affirmer que je puisse désamorcer celle qui anime Jade est présomptueux de ma part. Depuis cinq ans, elle a changé. Et si je dois me mettre à sa place, sans doute aurai-je la même réaction. Alors que faire, que dire ? Tenir bon, seulement ceci car je n’ai pas le choix mais surtout, je ne souhaite pas l’avoir.

Jade a gagné en maturité, en répondant. Un voile léger obscurcit mon regard. Ce n’est pas l’oubli qui a duré quatre ans, c’est la pente pour remonter de ma descente aux enfers qui a été longue, éprouvante. J’ai la chance d’avoir eu des personnes qui m’ont entouré, veillé sur moi. Sans eux, je serai sans doute mort à l’heure actuelle, emporté par l’alcool ou la drogue, voire même par un mélange détonnant des deux. Il n’y a rien de glorieux dans ce passé, aucune impression à donner. Alors non, ce n’est pas censé impressionner ma petite sœur, bien au contraire. Je n’essaie même pas de me justifier sur la durée de mon absence, du moins pas pour le moment. Je ne me laisse même pas aller à ce geste de désinvolture qui est de simplement hausser les épaules, l’air de dire « pense ce que tu veux de mon absence. » Ma réaction est au contraire beaucoup plus neutre vu qu’il n’y en a pas. Elle peut même amener à se poser des questions, à soupçonner que la raison est beaucoup plus profonde et sérieuse qu’un départ sans se retourner. Encore faut-il suffisamment me connaître pour le percevoir. Nous connaissons-nous encore Jade et moi ? C’est une bonne question à se poser sans forcément y chercher une réelle réponse.

Par réflexe, je lève le bras pour attraper au vol le maillot qu’elle envoie dans ma direction. Et là, alors que je le tiens enfin en main, j’y jette un œil. Thomas. Notre nom de famille est imprimé dessus. Voici donc l’objet du délit qui accompagne ma présence, un nom qui renvoie indéniablement à un passé que l’on souhaite oublier. Changer de nom pour lui faire plaisir, voilà une requête à laquelle je ne peux accéder. Je ne renierai pas mon passé, même pour elle. J’apprends à vivre avec depuis quelques temps, à me pardonner tout comme je demande que l’on me pardonne pour trouver la paix chaque soir quand mes paupières se ferment. Je ne suis pas le seul concerné, tout va au-delà de ma personne. Nous ne sommes que des messagers après tout, seulement de passage sur terre pour une période donnée. « Je ne changerai pas le nom. » Ma voix est douce mais ferme et sans appel. Hors de question de renier mon propre nom même si elle me balance au visage que cela ne doit pas trop me déranger ayant renié ma famille cinq ans auparavant. Si elle le fait, peut-être que je connais Jade beaucoup plus qu’elle ne pense que je la connais. Quant à changer de club, l’idée est tentante mais ne me gagne pas. Un sourire esquisse presque mes lèvres. Changer de sport sans lui laisser l’opportunité de se mesurer à moi lors d’entraînements ou de compétitions ? Ma sœur est courageuse mais non téméraire. Au-delà de son sentiment de colère, il y a donc la peur, quelque part enfouie en elle et qui pointe le bout de son nez à travers une brèche que je viens d’ouvrir avec ma présence physique.

Déjà elle prend congé, avançant de quelques pas. Nos retrouvailles se passent donc ainsi. Deux minutes et puis s’en vont. La prochaine rencontre se fera au détour d’un couloir, lors d’un entraînement. Si elle ne m’ignore pas royalement à ce moment-là, nous aurons peut-être l’occasion d’échanger quelques mots. Je pourrai tenter de lui expliquer pourquoi je suis parti pour au moins qu’elle trouve la paix si elle décide de ne pas me pardonner. Mais de ce que j’ai cru comprendre, les platines et les plombs ne font pas bon ménage. S’exposer avec moi nuira à sa réputation d’élève modèle, de fidèle disciple de gourous à la tête d’une secte, polissant ses plus fidèles membres à leur image avec des méthodes d’endoctrinement qui sont subtiles et nous dépassent complètement. C’est sans doute la vraie seule occasion qui se présent à moi ce soir et si je la laisse échapper, je doute d’en avoir une seconde rapidement.

« Tu ne veux pas savoir pourquoi je suis parti il y a cinq ans ? Pourquoi je ne t’ai pas réveillée pour te dire au revoir ? » Je me tourne légèrement dans sa direction. Soit mes questions vont aiguiser sa curiosité en même temps que ranimer sa colère et sa tristesse. Soit elle va être assez forte pour passer au-dessus de celles-ci et continuer sa route sans se retourner. Si elle choisit cette option, combien de temps mettra-t-elle à trouver le sommeil cette nuit, combien de temps avant d’arrêter de songer à ce que j’aurai pu dire si elle m’avait laissé m’exprimer. Sera-t-elle seulement capable de trouver la paix tant qu’elle ne saura pas la vérité maintenant qu’elle peut la connaître ? Demander son pardon ne veut pas dire que j’attends qu’elle me l’accorde. Je veux seulement que la nuit quand elle dort, elle n’ait plus aucun doute, qu’il n’y ait plus de poids sur ses épaules et ce, même si cela veut dire laisser la poussière du temps recouvrir notre histoire passée et commune. Pour vivre dans le présent et empêcher pour ma part que le futur ne se transforme en regrets à cause de cette académie.
 
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MessageSujet: Re: If I'd found the right words to say... If I'd found the right words to say... Icon_minitime1Lun 7 Juil - 21:04

Pendant des mois j’avais imaginé qu’il reviendrait. D’abord tous les jours. Il revenait, me demandait pardon, je boudais pour la forme et on se tombait dans les bras l’un de l’autre. Puis cette pensée qui me traversait l’esprit tous les jours se fit de plus en plus rare. Une fois par semaine, une fois par mois… Et puis je ne l’avais plus envisagée. Ici, j’avais retrouvé un équilibre, une famille. J’avais de nouvelles sœurs. Oh certes, elles n’étaient pas et ne seraient jamais au grand jamais Jasmine et Jillian… jamais personne ne pourraient les remplacer dans mon cœurs, mais j’avais des gens autour de moi, qui s’occupaient de moi et m’aimaient. J’avais de nouveaux frères aussi, comme James qui veillait sur moi et me voulait heureuse. J’avais des amis aussi. Alors je n’avais plus jamais espéré qu’il revienne. Les scénarii heureux que l’enfant que j’avais été n’existaient plus. Et je n’avais rien prévu pour ce jour qui ne devait jamais venir. Alors je fis ce qui me paraissait normal : je le chassais de ma vie. Ce n’était plus la Platine en moi qui avait le dessus, celle qui accueillait avec un grand sourire les âmes perdues, qui avait toujours un mot gentil au bout des lèvres et qui cherchait toujours à passe outre le passé des autres pour les accueillir comme des diamants brutes, innocents de tout passé. Non. C’était Jade qui réagissait. Celle qui avait été une sœur, qui avait aimé son frère et qui avait été abandonnée, et qui n’avait jamais réellement pardonné.

Un an pour me retrouver hein ? Et combien d’années de souffrance ? Combien de faux espoirs ? Combien de questions ? Combien de mes appels au secours restés lettre morte ? Et il ne trouvait rien à répondre, encore.

« Toujours incapable de me parler… »

Ce silence, plus aiguisé qu’une lame, celui sur lequel nous nous étions quittés jadis. Il avait renié notre famille, notre nom, en toute conscience. Il n’avait plus le droit de le porter. Il n’était plus mon frère, je ne voulais plus qu’il le soit. Quelqu’un dirait que je devrais l’accepte, parce qu’il faisait partie de mon passé et que cela faisait ma force… mais là, aujourd’hui, je n’y parvenais pas. J’avais oublié à quel point ce passé était présent, que je l’avais juste caché, enfoui, sans pour autant l’anéantir. Je refusai juste de le voir, de regarder en face. Je mis un terme à notre entretien, posant clairement les bases de notre « relation ». Savoir qu’il était là, que je pourrai le croiser au détour de n’importe quel couloir était suffisamment pénible comme cela. Sauf qu’il était une tête de mule. Et ce ton, je ne le connaissais que trop bien. Jadis, dans une autre vie, ça lui été arrivé de me gronder. Jamais il ne haussait la voix, mais il prenait ce ton-là, que je détestais aujourd’hui.

« Tu t’en foutais pourtant, il y a cinq ans de ce nom. Il a été suffisamment déshonoré. Aujourd’hui, il veut dire quelque chose. Aujourd’hui s’appeler Thomas c’est défendre des valeurs. Il est hors de question que tu les déshonores, tu entends. Tu as renoncé à ce nom autrefois, ne le salis pas aujourd’hui. »

Ce serait suffisamment humiliant d’être assimilée à un Plomb. Alors si en plus il faisait des siennes et se faisait remarquer par de mauvaises actions… Certes, j’étais Jade Thomas et j’y survivrai, je savais que j’avais les moyens de sauvegarder la réputation de mon nom – je l’avais prouvé il y a peu – mais moi je saurais… je saurais que quelqu’un avec qui j’aurais du avoir des milliers de points communs se comportait mal. J’avais Sali le nom des Thomas, il trainait quelque part sur un dossier de la police. Mais aujourd’hui, quand on disait Thomas, les gens pensaient « honneur », « gentillesse », « effort », « travail », « loyauté »… Tout ce à quoi il avait renoncé en partant.

Au moins, il ne dit pas non pour le changement de club. Plus loin il serait mieux je me porterai. Pour l’heure, j’estimai la discussion close. Puisqu’il était borné, je n’allais pas m’échiner à lui faire entendre raison. Je voulus partir, refermant la porte de ce passé. Je ne la voulais plus ouverte depuis longtemps, il était beaucoup trop en retard. Sauf que ses mots me percutèrent. Même si j’aurai voulu avancer, de toutes mes forces, j’en fus incapable. L’enfoiré. Un simple mot. Brutal. Douloureux. Dérangeant. Infect. Pourquoi ? Chaque minute de chaque jour pendant des mois je m’étais posé cette question. Et si je ne m’adressais plus à Dieu, c’était à lui que je parlais avant d’essayer de dormir le soir. A lui que j’adressais, en pleurs, des « pourquoi » qui restaient sans réponse. A cause de lui que le sommeil ne m’emportait que suite à un épuisement total. Les pourquoi étaient partis dans la fumée des drogues et les vapeurs d’alcool. Et aujourd’hui, il osait le remettre sur le tapis. Je dormais enfin. Je ne me posais plus cette question. Pourquoi faisait-il cela ? Pourquoi venir ici et me faire autant de mal ? Ça l’amusait de me torturer ? Je devrais le laisser parler, laisser ses mots glisser sur moi comme la pluie, les laisser n’attendre que l’extérieur sans m’atteindre. Je devrais me contrôler. Rester forte, encaisser. Partir.

«  Ton problème Jade c'est que tu refuses de reconnaître ce que tu es et ce que tu as été. Tu nies ton passé, tu ne veux plus en parler. Tu le fuis au lieu de l'affronter et cela te bloque.»

Sauf que là, c’était mon présent qui me bloquait. Il fallait que je l’affronte. Et même si je ne voulais pas les entendre ses raisons, le savoir c’était le pouvoir et il aurait toujours un coup d’avance sur moi s’il savait quelque chose que j’ignorais. Mes points se crispèrent. Je sentis des larmes monter. Non… Il était le seul homme à m’avoir fait pleurer. Je n’avais plus versé la moindre larme depuis des années. Je refusai que cela arrive encore aujourd'hui. J’étais si en colère. Cette brèche, c’était une plaie ouverte, béante, saignante. J’avais la possibilité d’avoir une réponse à une question qui m’avait consumée des nuits et des journées entières, mais que j’avais fini par enfouir. Je m’étais faite à l’idée de ne jamais savoir, de ne jamais avoir de réponse. Tout me revenait. Absolument tout. Le vide, le chaos, l’incompréhension, la colère, la tristesse. Du jour au lendemain, je n’avais plus eu les bras de mon frère pour me porter quand j’en avais besoin. Je n’avais plus eu sa main dans la mienne pour m’aider à traverser la tempête. D’autres mains avaient remplacé les siennes. Crispant tout mon corps et fermant mon visage, même si mon regard devait trahir le chaos qui m’habitait je me retournais pour lui faire face, avant de replier mes bras sur ma poitrine.

« J’avais besoin de réponse il y a cinq ans, Jayden. J’avais besoin de toi. J’ai eu besoin de toi pendant plus d’un an et demi. Tu n’as pas la moindre idée de ce que j’ai traversé parce que tu m’avais abandonnée. J’avais perdu mes sœurs. Par ma faute. Je me détestais. Et tu m’as tourné le dos. Même toi tu n’étais plus capable de me regarder en face. Il m’a fallu du temps pour oublier et remonter la pente. Pour être heureuse et ne plus me coucher tous les soirs en me demandant où tu étais et pourquoi tu étais parti. Mais visiblement ce n’est pas fini, n’est-ce pas ? Je n’ai pas le droit d’être heureuse, il fallait que tu viennes et que tu m’obliges à me rappeler ? Alors vas-y, libère-toi. Dis-moi pourquoi tu es parti. Dis-moi pourquoi tu m’as privé de mon frère et de la personne en laquelle j’avais le plus confiance. Dis-moi pourquoi j’ai traversé tout ce que j’ai traversé. De nous deux c’est toi que ça va aider. »

Si j’avais réussi à me contrôler jusqu’à présent, mon ton avait changé. La colère avait déferlé en moi, me submergeant totalement. Je criais maintenant.

« Et pourquoi tu es là ? Pourquoi vouloir me retrouver maintenant que j’ai retrouvé la paix ? Avant de me dire pourquoi tu m’as abandonnée, dis-moi ce que tu attends réellement, parce que visiblement, ce n’est pas du tout mon bonheur. »

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MessageSujet: Re: If I'd found the right words to say... If I'd found the right words to say... Icon_minitime1Sam 9 Aoû - 21:49

If I'd found the right words to say...
Jade ∞ Jayden

Ton souci Jayden, c’est que tu es incapable d’exprimer ce que tu ressens réellement. Combien de fois ai-je entendu cette phrase. Combien de fois ai-je lutté contre ce comportement de repli qui me caractérise. J’ai toujours aimé mes parents, mes sœurs. J’ai toujours réussi à me confier, surtout à celle qui se trouve à quelques mètres de moi aujourd’hui. Pourtant, mes vannes sont restées à chaque fois à moitié fermée et ne se sont jamais ouvertes complètement. Il est facile d’exprimer une pensée, de parler et de tourner ses phrases telles que l’on espère qu’on les prononcera. Il est par contre beaucoup plus difficile de cerner ce que l’on ressent réellement à l’intérieur, de mettre des mots dessus et surtout de réussir à les sortir. Je n’ai que trop rarement réussi à faire ceci, me contentant de façades plutôt que de profondeurs. C’est peut-être parce que je suis ainsi que je n’ai pas réussi non plus à faire face après la mort de mes sœurs. Ce n’est pas notre nom de famille que j’ai déshonoré avec mon départ mais quelque chose de plus profond, de beaucoup plus réel et qui porte le nom de famille.

J’ai conscience de mes erreurs, je reconnais mes torts et je dois une vérité à Jade, aussi douloureuse ou dérangeante soit-elle. Pourquoi ? Cette simple interrogation est revenue régulièrement dans ma tête. Dans des formulations différentes que celles auxquelles elle doit penser mais pourtant bien réelles. Le poids sur nos consciences n’est pas le même mais quelque part, il amène les mêmes effets, les mêmes réactions en chaîne qui provoquent de profonds bouleversements. L’être humain est de nature curieuse, et même s’il tente d’enfouir ce qu’il ressent, ses interrogations finissent toujours à un moment ou un autre par être les plus fortes. J’espère qu’elles vont prendre le dessus sur Jade pour qu’elle ne disparaisse pas aussi rapidement qu’elle vient de rentrer dans ma vie. C’est plutôt l’inverse qui se produit en fait,  j’ai l’impression d’être une comète qui est entrée dans son champ gravitationnel, amenant dans mon sillage des dégâts que je suis moi-même bien incapable de contenir ou d’estimer de quelle hauteur ils seront.  Car sa présence dans ma vie, voilà plus d’un an que j’ai le temps de m’y habituer, prenant le recul nécessaire pour non pas trouver une parade à chaque réaction de sa part, mais simplement pour me montrer suffisamment fort pour y faire face. Comme à cet instant où elle s’éloigne de moi.

Pourtant, elle s’arrête. La curiosité est la plus forte, ou la douleur est bien trop présente pour qu’elle puisse la chasser. Je remarque ses poings qui se serrent et je ne peux m’empêcher de m’interroger. Est-elle capable de rebrousser chemin pour me mettre son poing dans la figure ? A-t-elle gagné assez en force de caractère pour le faire ? Cinq ans auparavant, j’aurais parié sur son incapacité à le faire. Ce n’est plus le cas à présent. Alors, quand elle se retourne pour de nouveau me faire face, j’accroche immédiatement son regard. Lui seul peut me révéler ce qu’elle ressent, ce qu’elle pense. Il ne ment pas contrairement aux expressions corporelles. Si elle se ferme en repliant ses bras sur sa poitrine en guise de défense, ses prunelles laissent percevoir quelque chose de plus profond, beaucoup plus intense, et en quelque sorte aléatoire. Je m’attends à ce qu’elle m’interroge vivement, mais pas à ce déballage et à cet emportement de sa part. Cela ne doit pourtant pas me surprendre, quand elle est en colère, triste, ou en proie à une violente émotion, elle a toujours eu tendance à parler, beaucoup même.

Elle commence à m’ouvrir la porte de ses sentiments et émotions passés. Je me rends compte à présent du gâchis que j’ai causé avec mes propres réactions. La culpabilité. La haine. La honte. C’est tout ce que j’ai ressenti et que je ressens encore parfois par moment. Nous ne sommes pas différents et nous ne sommes pas frère et sœur pour rien car nous avons réagi en parallèle de la même façon. Il y a pourtant en moi quelque chose de beaucoup plus profond, dont je n’ai jamais parlé à personne, seulement à notre seigneur pour qu’il me pardonne. C’est peut être aujourd’hui que je vais l’évoquer pour la première fois, ou peut-être pas. Suis-je seulement capable de le révéler sans m’écrouler comme il y a cinq ans ? Je fais un pas en direction de Jade alors qu’elle reprend déjà, me criant dessus, déversant un nouveau flot de questions non plus sur le passé mais bien sur le présent. « C’est pourtant ton bonheur que je veux. » Cette fois, je suis capable de parler pour répondre quasiment aussitôt. Je m’avance d’un nouveau pas dans sa direction mais m’arrête, maintenant une distance entre nous, craignant de la faire fuir quand je vais commencer à répondre à toutes ses interrogations.

« Jasmine et Jillian ne sont pas mortes à cause de toi. Qui vous a laissé dans cette boutique ? Qui n’était pas là quand ça s’est produit ? Qui devait veiller sur vous ? C’était à moi de vous protéger, toutes les trois et je ne l’ai pas fait. Elles sont mortes car je n’étais pas là. Je m’en suis voulu pour ça et… J’aurais dû être là. » Je bloque, marquant une très légère hésitation, ne réussissant pas à sortir l’autre chose que je garde depuis si longtemps. Je me suis cru capable de le faire, je me rends compte que je n’y arrive toujours pas, que je ne suis pas encore passé au-dessus de ce dernier sentiment. « Je n’attends rien de toi Jade, même pas ton pardon que tu es en droit de me refuser. Je suis désolé de briser l’équilibre que tu t’es bâtie mais je ne ferai pas la même erreur qu’il y a cinq ans. Je ne laisserai pas le gouvernement m’enlever ma dernière sœur. Non… Pas après qu’il m’ait déjà pris les deux autres. »
 
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MessageSujet: Re: If I'd found the right words to say... If I'd found the right words to say... Icon_minitime1Jeu 14 Aoû - 9:29

Il était là, rouvrant une blessure avec laquelle j’avais appris à vivre. Il était là et ravivais une douleur qui s’était pourtant anesthésié avec le temps. Il était là, me rappelant une question qui m’avait hantée jour et nuit pendant longtemps. Une question simple mais qui en sous-entendait tellement plus ; pourquoi m’as-tu abandonnée ? Pourquoi ne m’as-tu pas dit au revoir ? Pourquoi as-tu oublié de m’aimer, oublié que tu avais une sœur pendant cinq longues années pour réapparaitre aujourd’hui ? Jayden… Mon frère unique… Il avait été ma moitié durant des années. Le seul en qui j’avais une confiance absolue, celui à qui je confiais tout, celui avec qi je priais. Aujourd’hui, je ne priais plus et il m’était pénible d’être face à lui. J’avais eu besoin de mon frère à la mort de Jillian et de Jasmine, j’avais eu besoin de lui, mon repaire de toujours, mon lien avec Dieu. Je l’avais perdu, je m’étais perdue. J’aurais eu besoin de lui pour comprendre aujourd’hui les sentiments que j’avais, ce trouble dans mon esprit, dû à quelqu’un. Mais était-ce encore mon frère en face de moi ? Etais-je encore sa sœur ? Nous avions grandi séparément, suivi d’autres routes. Et là, nous n’arrivions pas à nous parler. Il ne parvenait pas à dire les choses et moi… je ne lui avouais pas tout ce par quoi j’étais passée. La drogue. La fugue. La violence. La perte de ma dignité.

J’attendais ses explications puisqu’apparemment il mourrait d’envie de me les donner. C’était égoïste de sa part de faire ça ! J’allais bien. J’avais trouvé ma place, je m’étais reconstruite malgré ces silences et ce manque, ce vide, ma main sans la sienne. S’il avait besoin de parler aujourd’hui, c’était uniquement pour soulager sa conscience, sinon il m’aurait laissée. Je le lui balançai à la figure… je ne comprenais pas moi-même ma réaction… J’étais Jade Thomas, quelqu’un de calme, qui ne se mettait jamais en colère, qui aidait les autres à s’accepter et à aller de l’avant. Je contrôlais mes émotions, mes réactions… Mais devant quelques personnes, ça ne fonctionnait visiblement pas. Et Jayden en faisait partie. Peut-être parce que ce qui nous avait unis autrefois avait été fort. Peut-être parce qu’il était la plus grande douleur de ma vie.

« Je suis heureuse, Jayden… »

Mon bonheur ? Savait-il encore ce qu’il me fallait pour être heureuse ? J’avais été heureuse en tout cas. J’allais à l’école, j’avais l’avenir qui me tendait les bras, j’étais la championne en titre du sprint… J’avais des amis, une nouvelle famille… Et lui, maintenant en face de moi. S’il faisait un pas de plus, je partais en courant. C’était peut-être lâche, mais j’ignorais comment faire face. Et je détournais le regard quand il évoqua la mort de Jasmine et de Jillian… Tout était arrivé parce qu’on avait voulu un vêtement… pour faire comme tout le monde. On avait fait nos petits yeux de malheureuses à Jayden, parce que nos parents avaient dit non et qu’on savait que lui finirait par céder… Juste pour des vêtements… J’avais déchiré le mien en rentrant à la maison après qu’elles soient mortes. J’avais hurlé ma rage, pleuré toutes les larmes de mon corps en détruisant ce bout de tissu qui avait causé leur perte… notre perte… Tout ça pour ça. Il voulait que ce soit sa faute ? Très bien ! Qu’il l’endosse mais qu’il arrête de me forcer à me souvenir ! Ma langue passa sur mes lèvres, comme à chaque fois que j’étais concentrée ou énervée. Je me mordis la lèvre pour passer la douleur. Je me souvenais de tout. De notre joie… de ce bruit…des cris… du sang. Et de moi me demandant pourquoi. Pourquoi Dieu, s’il existait, avait laissé des gens prendre aussi violemment la vie de mes sœurs, alors qu’elles étaient bonnes et généreuses ? Pourquoi avait-il laissé la vie sauve à leurs assassins, ces maudits opposants ? Pourquoi elles deux et pas moi ? Je n’avais pas su gérer seule ce qui s’était passé. C’était à Dieu de nous protéger, pas à Jayden, mais il aurait dû être là, après. Il s’en voulait… pour ça et ? Et quoi ? S’il n’allait pas au bout de ses pensées, nous ne nous en sortirions jamais !

« Et quoi ? Et pourquoi tu ne m’as pas protégée moi ? »

Ça venait de sortir et j’étais morte de honte. Un diable d’égoïsme, voilà tout ce que j’étais. Un monstre. C’était répugnant même de penser comme cela, et je ne le savais que trop bien. Mais là, je n’arrivais pas à être quelqu’un de bien. J’ignorais ce qu’il avait vécu durant ces cinq dernières années, mais je savais ce que moi j’avais enduré, et la honte dont j’étais encore habitée à ce souvenir. Je réagissais comme une petite fille, une enfant qui avait désespérément eu besoin de son grand frère. Cela ne dura pas… J’entendis ses dernières paroles… elles me pénétrèrent comme autant de coups de poignards assénés avec violence. Avait-il bien dit ce que je croyais avoir entendu ? Il accusait le gouvernement de… mais quel abruti ! Mon sang ne fit qu’un tour dans mes veines tandis que la colère remplaçait la souffrance. Je perdis le contrôle, ce qui m’arrivait bien trop souvent ces derniers temps, ce qui n’était pas pour me rassurer. Je fondis sur lui pour lui coller mon poing dans la figure, me faisant superbement mal au passage. J’avais perdu la fâcheuse habitude de frapper et mes mains étaient redevenues sensibles à ce niveau. Je me massais la main, rageuse, en furie contre lui, contre ces mensonges, contre moi.

« Je t’interdis de tenir ce genre de propos ! Je t’interdis de dire ça ! Pas ici et pas en ma présence ! Comment oses-tu ? Ce sont des opposants qui ont tiré comme des crétins sur nous ! Pour faire un de leurs coups d’éclats ! Encore des opposants qui ont ouvert le feu ici dans l’école ! Je t’interdis de dire ça, Jayden ! Tu parles de ceux qui m’ont sauvée et se sont occupés de moi alors que j’étais plus bas que terre ! Ils m’ont sauvée Jayden ! Ils m’ont tiré de la rue et de la dr… Et quand bien même, tu les as laissés s’occuper de moi ! Et maintenant tu voudrais… N’accuse pas ceux qui agissent pour nous ! Si tu veux t’en prendre à quelqu’un, attaque-toi à ces opposants qui ne pensent qu’à tuer ! Attaque-toi à toi, au fait que tu sois parti ! Attaque-toi à ces mensonges qu’on nous racontait, comme ce Dieu à la con ! Tiens encore ce genre de propos à l’égard du gouvernement et je te jure Jayden que tu regretteras de m’avoir retrouvée. »

Mon frère… ici… et contre Gordon, contre cette institution qui m’avait rendue à la vie, qui m’avait rendue heureuse. Qu’avais-je fait pour mériter cela ? Et pourquoi m’avoir demandé de l’accueillir ? A quoi s’attendaient-ils ? J’avais l’impression de devenir folle et une nouvelle fois, je me sentis toute seule. Profondément seule. Rebecca devait être avec Cookie… Daniel me dirait que je n’avais pas à me mettre dans un tel état, que je devais contrôler… James… James trouverait certainement les mots et verrait le bon en Jayden mais ce n’était pas ce dont j’avais besoin. J’ignorais en réalité ce dont j’avais besoin, j’avais juste mal au crâne et envie d’évacuer toute ma rage…

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MessageSujet: Re: If I'd found the right words to say... If I'd found the right words to say... Icon_minitime1Sam 30 Aoû - 16:27

If I'd found the right words to say...
Jade ∞ Jayden

Cette discussion est en quelque sorte comme une cérémonie de mariage qui se déroule dans une église. L’occasion nous est donné pour parler ou de décider de nous taire à jamais. Sans aucun témoin si ce n’est celui en qui je crois et pour lequel Jade a perdu la fois. J’endosse la culpabilité des morts de Jillian et Jasmine. Il ne peut en être autrement. Le facteur déclencheur qui les a déposées devant la boutique ce jour-là, c’est moi. Ce n’est pas Dieu non, seulement moi qui ai pris une décision qui s’est avérée lourde de conséquences. Au-delà de celle-ci, de la douleur déclenchée par le drame qui s’est produit ce jour-là, il y a autre chose qui a suivi, beaucoup plus intérieur, profond au point que cela me marque au fer rouge à jamais. Et quoi ? L’explication est interrompue. Ce dernier point refuse de sortir et ce, même avec une invitation pour le libérer. Pourquoi je ne t’ai pas protégée….

Je ne suis qu’un simple mortel sans aucun pouvoir ni don. Celui qui a protégé Jade ce jour-là et tous les autres qui ont suivi depuis, c’est Dieu et uniquement lui. Elle est toujours en vie, voici une belle preuve de la bonté de notre seigneur qu’elle remettra et remet déjà en doute. Chacun a une mission dont il ne connait pas la nature. Chacun choisit sa propre voie pour la mener à bien. C’est y aller à l’aveugle pensera-t-on. Peut-être est-ce tout simplement accorder sa confiance en quelque chose qui nous dépasse et que l’on ne peut pas mettre dans le creux de la paume de sa main. Le gouvernement… Jillian et Jasmine… Jade…. Une mission parsemée d’embûches, difficile… Et un poing qui s’abat sur mon visage, annonçant non pas seulement des difficultés mentales mais également physiques. Ma tête ne peut qu’accompagner le geste de ma petite sœur. Mon visage exprime une grimace de douleur. Je penche un peu sur le côté mais ne plie pas, restant sur mes jambes. Mon dos se voûte légèrement, réduisant un peu la distance qui me sépare du sol. Mes doigts se posent sur ma joue. Au début, on croit que rien n’est en train de se passer mais c’est faux. Il y a un minuscule moment de flottement comme si rien ne vient de se produire. Puis elle arrive au triple galop, cette douleur qui cogne dans ma tête, contre ma joue, ne demandant qu’à sortir mais étant arrêtée par mon épiderme.

Le gouvernement est un mot tabou dans le vocabulaire de Jade du moins, si on ne le glorifie pas ou qu’on ne vante pas ses louanges. Sa fureur l’emporte, en paroles et le temps qu’elle termine, je masse légèrement ma joue. Je déteste ce goût que je ressens, comme du sang, ou alors du métal, peut-être un mélange des deux. Mes prunelles se posent sur la terre. « Qui t’a dit que c’était les opposants qui ont tué nos sœurs ? Quelqu’un du gouvernement ou de cette académie, non ? T’ont-ils fourni une preuve réelle et non falsifiée ? » J’ai conscience de m’exposer une nouvelle fois à son courroux.  Si quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends-lui aussi l’autre, n’est-ce pas ce que dit à quelques mots près le Nouveau Testament et que je suis en train de faire ? Ma main s’éloigne de mon visage alors que je me redresse vers ma petite sœur, lui faisant face, prêt à encaisser de nouveaux coups si elle juge bon de me punir ainsi. Si cela l’aide à se sentir mieux, qu’elle agisse donc de la sorte. Je réfute la violence en ce qui me concerne et même si la pensée me venait un jour de frapper quelqu’un, elle sera bien la dernière que je mettrai sur ma liste de victimes. « Je pourrai agir comme toi et t’interdire de t’attaquer à Dieu comme tu m’interdis d’avoir des propos négatifs à l’encontre du gouvernement… Mais cela nous avancerait à quoi, dis-moi ? Toi finissant par me rouer de coups sans que je ne réplique ? » Peut-être qu’elle se sentira mieux ensuite, fière d’avoir défendue son grand gourou de gouvernement en bon petit disciple qu’elle est mais ce n’est pas une solution. Il n’en existe même pas qui convienne mieux qu’une autre d’ailleurs, et je ne suis pas en mesure d’en trouver une. Par contre, je peux apporter des réponses. Ne pas révéler pour le moment ce que j’ai trouvé comme preuve contre le gouvernement dans la mort de nos sœurs mais enfin lâcher ce qui me bloque depuis si longtemps. « Je ne t’ai pas réveillée cette nuit-là… Je ne t’ai pas protégée… Comment aurai-je pu Jade ? Au-delà de la douleur, il y a un sentiment qui est beaucoup plus ravageur… La honte. Comment aurai-je pu rester quand je me suis rendu compte que, dans notre malheur, j’ai ressenti du bonheur ? Que j’ai eu la sensation honteuse d’être heureux que tu sois en vie ? La pensée que si j’avais pu faire quelque chose ce jour-là et eu la possibilité de sauver une seule de mes sœurs, c’est toi que j’aurai choisie ? Quel genre de frère suis-je pour avoir eu de telles pensées ? Quand je l’ai compris, je n’ai plus été capable de te regarder, ni de regarder nos parents. Etre confronté tous les jours aux souvenirs de Jillian et Jasmine, ainsi qu’à ce sentiment… Il ne me restait plus qu’à partir... »
 
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MessageSujet: Re: If I'd found the right words to say... If I'd found the right words to say... Icon_minitime1Dim 7 Sep - 20:56

Je ne comprenais plus rien à ce qui se passait. Jusqu’à il y a peu, j’avais été heureuse. Si je n’avais jamais réellement tourné la page de mon passé, j’avais sagement et précautionneusement recouvert le livre, pour le ranger dans une étagère et en commencer un nouveau. J’avais eu trois deuils à faire. Jasmine, Jillian que j’avais vu mourir sous mes yeux pour une idiotie et Jayden. Et ce deuil-là avait certainement été le plus pénible de trois. Parce qu’on ne me l’avait pas arraché comme mes sœurs, non… il avait décidé de partir. Au pire des moments. J’avais sombré, je m’étais relevé. Je croyais être forte… Oh, oui… je le croyais tellement. D’autres personnes me pensaient forte. Je réalisais aujourd’hui à quel point ils avaient tort. Jayden était mon exception. Il l’avait toujours été. Quand j’avais eu peur d’aller dans le grand bassin à la piscine, et que mes sœurs et mes parents avaient tout fait pour que je plonge à mon tour, alors que je criais et pleurais que je ne voulais pas y aller… il avait réussi à me faire aller dans l’eau. Ou quand je me murais dans le silence. Il pouvait rester à côté de moi pendant des heures sans parler, attendant que je me décide, mais refusant de me laisser toute seule parce que ça n’allait pas et qu’il le savait. Il lui était arrivé de me sermonner parfois, quand j’avais fait des bêtises… ça avait toujours eu plus d’impact quand c’était lui que mes parents étrangement. Je ne savais pas pourquoi, mais cela avait toujours été ainsi.

Aujourd’hui, il m’obligeait à revivre ce passé et tout ce qui s’en été suivi et je ne supportais pas de revoir ces images défiler dans ma tête. C’en était trop. Ça et qu’il ose dire que c’était la faute de notre Gouvernement ! Non, ça je ne pouvais pas le laisser passer. C’était eux qui m’avaient sauvée, eux qui m’avaient donné une chance de changer pour devenir quelqu’un de meilleur. Comment est-ce qu’il osait ? Comment est-ce qu’il pouvait seulement me regarder dans les yeux et balancer une chose aussi… aussi… outrageante ?

Jayden avait toujours été mon exception. Je perdis le contrôle et le frappai, ne supportant plus la réalité comme je ne l’avais plus supportée cinq ans en arrière. J’avais mal, physiquement et mentalement.

« Je n’ai pas besoin de preuve ! J’ai vu ce que les opposants étaient capables de faire ! »

Je criai encore, comme si la communication était totalement rompue. Oh on ne serait pas fier de moi si on me voyait si peu maitresse de moi-même. Avec une toute autre personne que Jayden, cela aurait été plus simple, j’aurais certainement pu gérer la situation. Après tout, j’étais parvenue à manipuler Winthrop et à garder mon calme alors qu’il proférait des aberrations sur notre dirigeant. Mais Jayden… Il ne savait pas, il n’était pas là quand il y avait eu cette fusillade dans l’école. Les opposants avaient pénétré l’enceinte de l’Académie, ils avaient tiré sur des étudiants… Des étudiants ! Et il osait soupçonner le gouvernement ? Alors non, tout comme il croyait à son Dieu, je croyais en Gordon et en sa bonté. Il nous offrait une seconde chance, il nous offrait une vie. Je serrai les poings en entendant sa réplique cinglante. Le rouer de coups, je pourrais. Après tout, j’avais été arrêté après avoir tabassé presque à mort trois personnes sous l’effet du manque. Mais je n’étais plus cette fille-là. J’avais changé et je ne voulais pas retomber dans ces vieux démons. Et certainement pas à cause de lui. Je gardai mes yeux rivés dans les siens, contenant ma colère et ma rage… Il défendait un mensonge… un dieu d’amour et de bonté ? C’est cela, tu parles ! Un dieu qui protège les mauvaises personnes et enlève des enfants à leurs parents et des sœurs aux fratries. Je n’aimais pas quand il me parlait ainsi, comme à une enfant… Mais il reprit. Est-ce qu’il allait enfin répondre à ça, à cette question qui m’avait torturée pendant des années avant de ne devenir qu’une… douleur sourde, récurrente, terriblement familière, une plaie qu’il avait ravivée aujourd’hui ?

La honte… que croyait-il ? Moi aussi j’avais eu honte. Honte de succomber à ce désir d’être comme tout le monde, honte d’avoir désobéi, honte de m’en être sortie vivante alors qu’elles étaient mortes. Du… bonheur ? Que voulait-il dire ? Je l’observais, ne comprenant rien. Et je demeurais interdite. Il…  non. Pourquoi ? Et pourquoi mettait-il ce fardeau sur mes épaules aujourd’hui ?  Je culpabilisai assez d’être responsable de leur mort, maintenant j’apprenais qu’en plus c’était moi qu’il aurait sauvée ? Mais pourquoi ? Pourquoi ? Je le savais, en réalité, pourquoi… Parce que même si aujourd’hui je ne pouvais absolument pas le reconnaitre, si les situations avaient été inversées, j’aurais fait sensiblement la même chose. Il avait été mon grand-frère et je savais, même si je ne me l’expliquais pas, que nos liens avaient été plus intenses que ceux que j’avais avec mes sœurs que j’aimais pourtant de tout mon cœur. J’avais toujours su que je ne m’en remettrais pas si je devais le perdre… Et c’était précisément ce qui était arrivé.

Ma poitrine se soulevait et se rabaissait doucement alors que ma bouche s’ouvrait et se refermait en même temps, comme si j’essayais de reprendre pied. Pourquoi… finalement cette question revenait encore et encore.

« Sauf que je suis morte, Jay… Je suis morte quand tu es parti, parce que tout ce que j’ai compris moi, c’est que tu t’es barré comme si je n’étais pas là, comme si je n’existais pas. J’avais 15 ans, et tout ce que j’ai vu c’est mon grand frère qui ne voulait plus de moi… Qu’est-ce que tu voulais que je comprenne Jayden ? »

Une larme roula sur ma joue. J’étais encore en colère, mais il y avait autre chose. Comme un sentiment de gâchis. Je ne criais plus. Je n’en avais plus la force de toute façon. Il me faisait pleurer. Il avait été le dernier garçon à me faire pleurer. J’avais l’impression qu’il serait à jamais le seul capable de le faire. Je n’étais plus sa petite sœur, plus celle qu’il avait connue. Avant, nous priions ensemble, ce qui n’arriverait plus jamais. Avant, nous  nous confions tout… je doutais que ce soit possible aujourd’hui. J’aurais voulu qu’il reste mon grand frère, qu’il reste, tout court.

« Je t’aurais sauvé aussi, Jay… Mais tu n’as pas misé sur la bonne sœur. Je ne méritais pas de m’en sortir, parce que je n’aurais même pas eu honte de te choisir. Et parce que tout ce que j’ai fait montre bien que je n’étais pas quelqu’un de bien. »


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