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Ma faute à toi
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MessageSujet: Ma faute à toi Ma faute à toi Icon_minitime1Lun 8 Juil - 17:39

" Tu te crois différent d'eux, Alonso ? Tu te crois meilleur ? Mais t'es exactement comme ton patron, t'es exactement comme tous les autres ! Tu penses que t'attaques pas gratuitement, qui te donne le droit de décider qui mérite ce qui lui arrive ?! Qui t'autorise à abuser de la loi du plus fort comme ça ?! Toi et tes copains, vous faites seulement la même chose que le gouvernement, vous vous donnez le droit d'écraser ceux qui n'ont pas les moyens de se défendre. Vous êtes juste des dictateurs avec des flingues. Et ça me dégoûte ! Tu me dégoûtes, tu m'entends ?! Je ne veux plus jamais te revoir ! "


J'ai besoin d'entrer chez un homme, chez un autre que toi
Toi t'as perdu ma flamme, ma flamme qu'était pour toi
J'ai besoin de t'oublier, ne pas te reconnaître
Partout où je vais, j'ai besoin de renaître


Détonation.
Luka ouvre instantanément les yeux. Dans la pénombre encore bien présente, elle émerge doucement de ses sombres songes, désagréables réminiscences. Mais ce qu'elle pensait être le petit jour est une nuit à peine avancée, et son alarme interne une explosion toute différente. Quand elle ferme les yeux pour se rendormir, un deuxième grondement la fait sursauter d'avantage. Et le clapotis régulier contre la fenêtre de toit au dessus de son visage se révèle enfin à ses oreilles ensommeillées. Un orage violent tombe sur la ville et fait tout à coup battre un coeur à grande vitesse, dans un corps chargé d'une électricité nouvelle. Luka bondit hors de ses draps et remue sa chambre pour trouver des vêtements acceptables. Comme dirait un vieux philosophe, il est temps de sortir de la grotte...

La voiture roule paisiblement le long de la route, feux allumés, suivant drastiquement le code régissant tout conducteur pour ne pas être remarquée. La pluie violente s'abattant sur les têtes est une occasion bénie de rejoindre le monde réel sans être repérée. Moins de voitures de police, presque aucune visibilité, la possibilité de cacher son visage sans avoir l'air d'un voleur. Voilà des semaines qu'un ciel entièrement dégagé la faisait désespérer de revoir la lumière des néons un jour. Mais sa patience a payé, et rien ne saurait gâcher l'allégresse lui étreignant le coeur en cet instant. Pas même les cendres oniriques d'une dispute encore marquée au fer rouge dans sa mémoire, paroles acides et gestes malheureux...
Elle se gare à quelques pâtés de maisons du centre ville. La capuche d'un gros anorak gris rabattue sur son visage diaphane, Luka enfonce ses bottes dans la boue des rues les plus mal loties de la ville, un gros sac à dos précieusement serré contre sa hanche. Et l'enfant déjà devenue trop vieille court de portes en portes apporter les médicaments de ses plus réguliers, insuffisances rénales et autres cancers, soignés à la faveur des pluies diluviennes. Peu à peu, des gâteaux maison ou des morceaux de pains en gage de remerciement remplacent les boîte de gélules.

***

" Brelan d'as, ma belle. Retourne donc te coucher dans ton petit entrepôt avant de te faire humilier d'avantage. "

Quelques rires, éclairés à la bougie, portes et volets clos. Dans le minuscule salon d'un appartement pas bien grand non plus s'entassent une demi douzaine de corps, deux couples, un fils et la belle. On jette des plaisanteries vaseuses en même temps que les cartes, on prend des nouvelles des uns et des autres. L'une des deux femmes est robuste et se prête volontiers à ces jeux sans gain réel, l'autre semble plus amaigrie, affaiblie par le chagrin. C'est celle là que Luka regarde le plus, tâchant de sourire chaque fois que la dame daigne poser les yeux sur elle. La mère de Manek. Elle ne s'est jamais vraiment remise de la mort de son fils - le peut on vraiment ? Alors en apprenant, ce soir là, qu'elle ne serait pas du voyage, faute d'une escorte convenable cette fois ci, elle s'est laissée gagner par une amertume qui ne dégrossit pas. Elle lui en veut, Luka le sait. Cette dispute n'était pas seulement idiote, alors... elle était aussi véritablement préjudiciable. Mais Luka n'est pas parfaite. Elle ne peut pas toujours l'être. Elle aimerait, mais elle ne peut pas.

" Vous avez entendu cette histoire de couple dépecé ? marmonne tout à coup l'un des hommes, lui faisant serrer les dents derrière ses cartes.
- Qui l'a pas entendue ? C'était sur toutes les chaînes. Ce Lecter, je vous jure... Si on pouvait lui tirer une balle, une bonne fois.
- Moi je trouve ça facile, tout ça. " grommelle l'adolescent, les yeux rivés sur l'écran d'une vieille console, laissant immédiatement des regards ahuris convoler dans sa direction. " Qui a dit que c'était lui, d'abord ? La presse ? Mon cul. Puis je vois pas pourquoi il serait aller pêcher tout seul un pauvre type et une bonne femme dans leur appart. Ils frappaient leur gosse, en plus. Tout le monde sait ça.
- T'es pas entrain de le défendre, là ? Parce que si tu le défends, je te jure qu'elle va partir. " s'exclame la plus robuste des femmes.
- Je dis juste que ça pue, cette histoire. Et puis tous les gars qui vont dans le Sud, ils sont riches, ça aussi tout le monde le sait. Si j'y allais...
- Quoi, quoi, si t'y allais ? T'es juste bon à jouer à tes conneries, là.
- Je pourrais te soigner, voilà ! Un vrai traitement pour ton cancer. Pas ces putains de pilules périmées qu'elle nous ramène quand ça lui chante. "

Et la gifle part. La mère traîne son fils dans sa chambre par l'oreille et les hurlements fusent, pendant cinq bonnes minutes. L'assistance retient son souffle. Tout le monde évite soigneusement de regarder Luka, et Luka regarde soigneusement ses cartes. Envolée, l'allégresse...
Quand elle revient, on lit sur son visage une colère frappante, mais surtout l'empreinte d'un découragement latent, celui d'une mère à qui son fils échappe. " Il faut l'excuser. " soupire t'elle. " Depuis qu'on le cache pour pas le faire entrer à l'académie, il a trop de temps pour réfléchir à la prochaine qu'il va sortir. Ferait mieux de trouver un job, ce petit con.
- Je vous en prie, il n'y a aucun mal. Je comprends. Moi aussi, j'aimerais bien être riche. "

On sourit, un peu, mais le coeur n'y est plus et la soirée se termine vite. Luka part récupérer les fleurs pour Manek dans son ancien appartement, enlace sa mère et son père malgré leur petite rancoeur, et rabat sa capuche sur le visage pour courir vers le quartier Sud.

J'ai besoin de vivre, de vivre devant moi
Ceux qui m'aiment me suivent, je sais toi
Tu restes là

Le malaise la prend dès qu'elle a tourné au carrefour qui en borde la frontière. C'est viscéral, elle n'y peut rien. Le seul fait de s'approcher d'une hypothétique violence la rend malade. Luk Earhart est une pure, une vraie. Elle n'est pas parfaite, elle a son caractère et ses incapacités mais elle est pure. La seule idée de porter préjudice à un autre lui retourne les tripes. S'il est une chose qu'elle pourra conserver au bout de toutes les autres, c'est bel et bien cette innocence immaculée, dont elle traîne les conséquences jusque dans la tombe de ses malades et qui, ce soir là, la rend toute autant en colère que les adolescents tentés par le confort de la violence. Elle ne sait plus où elle en est. Elle ne sait plus si elle fait bien les choses, quand bien même on ne peut pas lui reprocher de faire le mal. Et lorsqu'elle tourne à un nouvel angle, aperçoit un petit bar de criminels familiers, son malaise n'en est que grandissant. Au loin, elle croit apercevoir la carrure impressionnante de son amant, mais rien n'est moins sûr. Et elle n'a pas forcément envie d'aller vérifier.

Un nouveau gâchis dans sa conquête de plus en plus obsolète du bon. Elle a beau s'enjoindre à ne pas y penser, cette dispute lui revient en mémoire à chaque silence. Jamais elle n'aurait cru en venir à vouloir cogner sur quelqu'un, surtout pas Alonso. Il a subi pour tout le reste, elle a conscience, quand bien même le fond du problème était réel. Parce que le problème, c'est ce monde qui tourne pas rond, et les sacrifices qu'ils doivent faire pour en retrouver le sens correct. Elle sait que le cubain n'est pas mauvais, ne serait ce que parce qu'une mauvaise présence lui est immédiatement insupportable, au point d'en devenir presque un sixième sens. Il fait ce qu'il faut. Ce qu'il croit falloir. Elle était au courant de ses méthodes dès le départ et si elles sont répréhensibles, ça n'est pas à elle de les juger pour autant. Elle devait les accepter avec lui, ou partir proprement si c'était tellement insupportable, pas les lui reprocher de façon aussi minable. Elle sait tout ça. Mais elle a l'impression de se noyer dans le tout ce marasme, et lui en veut terriblement de ne pas mesurer à quel point il est difficile pour elle de garder la tête hors de l'eau quand elle est en sa présence. Parce que dans le fond, elle est terrifiée. Elle a peur chaque fois qu'il est là, et qu'elle trouve ça agréable. Chaque fois qu'il fait naître un sentiment de sécurité, un autre de peur le contrebalance. Elle entend des détonations en rafale dans tous ses rêves toutes les nuits après celle où elle le voit, pendant des jours.

Coupable, aussi. Elle se sent terriblement coupable.

En atteignant le dernier angle, Luka entend la rumeur d'une conversation indistincte. Inquiète, elle débouche dans l'impasse reculée où est enterrée le corps, pour en découvrir deux autres bien debout, quoique chancelants. L'un d'eux à les mains portées devant lui. Et, encore en avant, elle aperçoit un jet d'urine s'échouant sur la pierre tombale gravée au nom de son ancien amour. Son coeur cesse de battre, d'angoisse et de fureur. Une exclamation s'échappe de sa bouche. Tous deux se retournent mais le premier n'a pas le temps de l'intercepter qu'elle se jette sur le deuxième et le pousse. Son poing se lève et frappe à la mâchoire, en un geste aussi enragé qu'irréfléchi. Il recule, hébété.

" Sale pute. "

Avec sa carrure de brindille, Luka a à peine le temps de le voir arriver qu'elle est jetée au sol, sous une pluie battante, assénée d'un coup de pied dans le ventre. La douleur lui coupe le souffle. Elle se recroqueville, pour entendre le bruit familier, terrible et cauchemardesque, d'un flingue tout juste armé.

" Je vais te crever, salope. "

L'homme titube. Mais en levant les yeux, elle découvre bel et bien le canon pointé sur elle. Et la terreur est assez violente pour lui figer le corps. Les yeux écarquillés sur l'arme, Luka sent sa gorge se serrer au point de ne plus laisser passer un son.

J'ai besoin d'aimer, je ne sais rien faire d'autre
J'ai besoin d'aimer et c'est pas ta faute
C'est ma faute à Toi
...

* La Rue Kétanou

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MessageSujet: Re: Ma faute à toi Ma faute à toi Icon_minitime1Lun 8 Juil - 19:43

Ma faute à toi


Fracas ; carnage en l’air. L’orage gronde … il gronde moins que lui cependant. Une table croule, poussée d’un coup de pied tandis qu’une chaise vole et le Cubain a tout juste le temps de faire un pas à gauche pour l’éviter. Et allez … c’est reparti comme en quarante. Un soupir, il se masse la nuque et serre les dents. Encore une crise du Tyran, une autre pour allonger la liste et celle-ci semble ne trouver aucune fin. Calypso, encore et toujours. Quelle idée de l’envoyer promener aussi, la blonde ne sait pas encore que Lecter est en permanence branché sur une fréquence folle et qu’un rien le fait exploser ? De toute évidence elle n’en a pas conscience. Elle n’a pas à voir ça, au pire elle n’a eu à subir la mauvaise humeur du Clown qu’une seule fois dans un restaurant … veinarde. Eux commencent à manger de ce pain là tout les jours.

« Tu veux bien arrêter de hurler ? » Finit par lancer Alonso, la mâchoire contractée.
« Ta gueule ! Toi … surtout toi tais toi ! » Ordonne Jason, le pointant d’un doigt tremblant de rage.
« Mais ça changera rien merde ! Va donc te coucher et demain t’y repenseras ! T’as failli sauter avec ta bombe y’a moins d’une semaine et t’as même pas vraiment fermé l’oeil depuis ! Putain Jason calme toi ! »    
« Me calmer ? ME CALMER ? Fous le camp de là avant que je me calme sur ta peau Alonso ! »
« Oh avec joie ! Tu me les brises tellement que je préfère encore me faire tremper toute la nuit plutôt que t’écouter brailler ! Hasta la vista ! »

Passant sa veste par dessus un simple débardeur noir le Cubain se dirige aussitôt vers la sortie sans plus jeter un œil à la nouvelle déferlante de rage qui s’abat derrière lui. Ça devient franchement dur à gérer. Main sur la double porte en fer de l’entrepôt, il la pousse rudement et tombe nez à nez avec le BoogieMan revenu d’on ne sait où. Roulant des yeux, il désigne l’intérieur d’un mouvement las de la main.

« Sérieusement, si tu l’assommes pas c’est moi qui le ferai à mon retour t’es prévenu ! »

Pas un mot de plus et il se dirige vers les garages sans attendre. Le pick-up est le véhicule qu’il utilise le plus souvent, un rien passe partout même s’il est loin du modèle réduit. Portière claquée, contact et il démarre rapidement comme pressé de fuir l’antre du Diable. Fuir … c’est à ce niveau en effet. Le vent tourne, et il est toxique à mourir. Jamais Lecter n’a été si intenable, à la limite d’imploser, frisant l’autodestruction. Même dingue, le Clown prévoyait un minimum avant mais depuis toutes ces histoires, depuis Frederic au moins rien ne va plus. Le Cubain pousse un soupir, monte le volume de la radio comme pour tenter de chasser de ses oreilles les hurlements de son patron. L’homme est une véritable maladie, à trop le côtoyer il vous bouffe, vous hante sans cesse et même Alonso doit avouer que parfois, certaines nuits il croit l’entendre rire … à moins que l’autre se marre réellement quelque part cela dit, c’est bien le genre.

S’il n’y avait que Lecter ; mais le Cubain a aussi une vie privée, un semblant au moins. Parce qu’il possède une certaine liberté d’action il a crée des liens, a entretenu certains de longues dates mais dernièrement, l’un d’eux s’est rompu comme un foutu élastique qu’on aurait trop tendu. Lui revenant en plein face et lui marquant l’esprit de la manière la plus insupportable. Pourquoi faut-il qu’Elle lui fasse une crise elle aussi ? Ils n’étaient pas bien ensemble ? A penser seulement à l’instant présent, à se couler dans les bras de l’autre, à faire l’amour ? Non visiblement. Mademoiselle lui en veut, elle lui crache qu’il ne vaut pas mieux que Lecter, qu’il décide qui doit mourir et qu’en somme : il devrait avoir honte. Vérité ? Oui. Comment nier ? Mais il n’a pas honte. Lorsqu’il accompagne Jason il exécute les ordres mais dehors, loin de son « maître » le molosse ne tue pas à vue. Il ne brise pas les os sans raison, pas plus qu’il ne se bat à mort … ne voit-elle pas ça ? Qu’il veut une justice au fond ? Elle ne le comprend pas ; qui comprendrait ? Ils ne sont que trois pour ça.
Au fond … c’est la société actuelle et Alonso en est dégoûté. On le prend et on le fout dans une case bariolée de rouge, dans la boite de Lecter, lui même balancé dans la boite des grands malades de l’histoire. C’est coutume à leur groupe, s’arracher de ces boites et arracher le masque humain pour montrer qu’ils ne sont pas à mettre ensemble dans ce panier de crabes. Jason, Boogie, Alonso, trois personnalités dont on empile les dossiers dans le même foutu tiroir du crime en oubliant qu’ils sont tellement différents de manière individuelle. L’un a massacré jusqu’à son âme, l’autre l’a vendu au Diable et le dernier l’a saigné sur des rings à la gloire d’une foule avide de spectacle qui se foutait de ce qu’il mettait en jeu, de ce qu’il voulait sauver. Le système est pourri … et si elle dit l’affronter, si elle prétend lever l’étendard de la liberté, en le rejetant de cette manière elle l’a seulement déçu.

Le mouvement des essuies glaces devant ses yeux le distrait légèrement, au fond il est blessé. Dans sa fierté, mais c’est la moindre des choses. En tant qu’homme en revanche, c’est plus douloureux. Il espérait lui inspirer quelque chose de positif, qu’elle voit et chérisse ce qu’il acceptait de ne laisser qu’à elle. Un peu de tendresse, des sourires paisibles, ses bras pour la protéger. Il ne dit pas l’aimer, ce mot là est flou pour Alonso qui a passé bien trop de temps à affronter la vie et les gens pour se faire aimant. Mais il se découvrait une facette plus « ordinaire » avec elle. Et Elle … cette femme l’a renvoyé au loin, lui a claqué ses quatre vérités au visage sans jamais connaître toute l’histoire. Il parle peu de lui, elle ne connaît que les grandes lignes parce qu’il ne s’attarde pas réellement sur cette condition d’animal d’arène qui fut la sienne. Il n’est plus ça, et il peut décider par lui même maintenant. Oublie-t-elle que sans lui, jamais son homme n’aurait eu une tombe décente ? Le Cubain n’attend pas de mercis, pas de retour d’ascenseur mais n’est-ce pas là preuve qu’il peut voir plus loin que Lecter ? Accorder honneur et respect même à un inconnu ? Elle a frappé, et il n’encaisse pas bien le choc.        
Bêtement, sans même réaliser il approche de la zone où se trouve la tombe, un peu cachée mais pas invisible. Que fait-il là franchement ? Il n’en sait rien. Ses doigts se serrent sur son volant à voir passer une silhouette et même si les phares sont éteints, même si la pluie rend les contours indistincts il la reconnaît. Pour l’avoir tellement étreinte …

« Pauvre folle ! » Grogne-t-il, descendant aussitôt de la voiture, claquant la portière et marchant à pas vif en direction de l’impasse.

Alonso arrive à peine à l’entrée qu’il entend les insultes fuser, le bruit d’un canon qu’on arme et se dessinent rapidement trois formes, dont une au sol et menacée. Trois enjambées en course et le Cubain se précipite. Les réflexes sont là, ils sont anciens et devenus mécaniques. Sa main se referme sur le poignet de l’homme armé, force à une torsion faisant vriller, craquer les os jusqu’au coude. C’est net, sordide sous la pluie battante. Le type hurle, recule aussi vite qu’il peu en abandonnant son flingue aux mains de cette ombre massive venue de nul part. Alonso le glisse à sa ceinture, sèchement.

« Putain ! Merde ! Il m’a pété le bras ! » Se lamente l’homme, en larme pendant qu’il presse ce qui reste de son bras aux articulations réduites en miettes contre sa poitrine.
« Estime toi heureux que ce soit seulement ça connard ! »

Comprenant à retard à qui ils ont à faire, les deux hommes perdent toutes couleurs. S’il n’y avait qu’Alonso, l’homme, le type des rings ce serait déjà effrayant mais Le Cubain est devenu une entité. Le Cerbère de cet Enfer du Sud, un monstre à la solde d’un autre monstre. Le regard noir porté sur la braguette encore ouverte du crétin, Alonso lâche un grognement. Il a comprit, ça lui déplaît hautement.  

« Pas de respect pour les morts je vois. Ça t’éclate peut-être ? Ose seulement me dire que t’avais une envie pressante et je te la fais bouffer ! » Lui crache-t-il, l’empoignant par sa veste au point de le faire pratiquement quitter le sol.
« C.. c’était pas … enfin, on pensait pas à mal ! » Patine le type, à moitié étranglé par son col.
« Pauvre larve ! Le mec qui est là mériterait cent fois de respirer à ta place ! Alors tu sais quoi ? Tu vas nettoyer, tu te démerdes avec ton pote mais je veux même plus un relent dans l’air ! Et pour finir, demain sept heures tapantes je te veux là où tu sais et crois moi … c’est pas une proposition. Osez vous défiler et je viendrai vous chercher moi même ! »
« O...ok. On .. on va chercher … de quoi nettoyer. »

Lâché, il retombe sur lui même et tousse. Alonso lève l’index, attirant l’attention des deux cloportes et va tapoter le cadrant de sa montre. Qu’ils n’oublient pas l’heure. Ils hochent la tête, muets et s’en vont aussi vite que leur jambes le permet encore un peu plus loin, dans le premier petit magasin encore ouvert. Avantage du Sud, certains n’hésitent pas à bosser toute la nuit. Une chose de faite. Il passe une main dans ses longs cheveux trempés pour dégager son visage et se penche sur la jeune femme. Pas d’avis à demander, et ce n’est pas avec son poids plume qu’elle le contrera. Il la relève, sans trop de délicatesse mais en y mettant un peu de retenue tout de même.
Un bras autour de ses épaules et le Cubain la traîne avec lui, sourd à toutes tentatives de protestation et il revient au pick-up. Ouvrant la portière il la soulève par la taille et l’assoie sur le siège passager, restant lui à l’extérieur pour garder un œil sur les deux gus qui s’en reviennent, les bras chargés et se sachant très bien surveillés. Au moins ça …
Puis il reporte son attention sur elle, les traits tirés et les yeux secs. Il aurait été heureux avant … le cœur plus léger, elle lui inspire tout autre chose désormais. La pluie qui lui colle ses vêtements à la peau, le froid qui lui tend les muscles, il s’en fout et il se sent vide. Pourtant, un petit rien de flamme brûle encore et c’est la voix glaciale, bien loin des intonations chantantes qu’elle lui connaît qu’il lui parle.

« Tu es complètement malade Luka ! T’as oublié où tu te trouves ou quoi ? Sérieusement j’ai pas envie d’ouvrir une tombe pour toi à côté de la sienne ! T’as déjà de la chance que j’ai assez de respect pour pas t’interdire l’accès au quartier avec tout ce que tu m’as balancé à la gueule … tente pas le diable, parce que si tu continues tu vas finir par tomber dessus et crois moi … eux c’était rien en comparaison de ce qui traîne ici. Si t’avais croisé Lecter ou Burton tu serais même plus en un seul morceau. Recommence ça et plus jamais tu remettras un pied ici, compris ? »

Il n’a pas envie de le faire ; mais si c’est la seule façon d’éviter qu’elle finisse baignant dans son propre sang  il y viendra. Au moins par respect pour Jack, par respect pour ce type enterré … et au fond, parce que pour elle au moins le « chacun sa merde » n’a plus lieu d’être. Alonso n’oublie pas, ses souvenirs lui sont précieux. Lukas était précieuse … l’est-elle encore ? Ça … il ne sait plus le dire.    
© Jason L.

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MessageSujet: Re: Ma faute à toi Ma faute à toi Icon_minitime1Mar 9 Juil - 18:12

Les jours ne sont pas éternels
Disait un astre au soleil
Le tour du monde ça je sais faire
Depuis toujours, toujours
Disait la lune à la terre
Dont les couleurs sont de ces merveilles
Issues d'hier ou du soleil
Issues de toujours, toujours

Un craquement. Un homme qui hurle.
Terrifiés, les yeux de Luka se déportent sur la nouvelle silhouette apparue derrière le rideau de pluie. Choquée, elle voit ces contours familiers maîtriser l'homme, le harponner, le menacer. Son cerveau peine encore à fixer les joints d'une seconde à l'autre, tant la vision du canon et le son de l'arme dansent encore la valse d'une connexion à l'autre. Elle glisse sur les fesses pour tenter de se relever, oubliant la douleur encore violente lui cinglant son menu ventre, quand une main ferme l'empoigne et la remet sur ses pieds, sans appel. Sonnée, Luka s'accroche au corps massif, espéré jusque dans ses songes depuis des semaines, prise d'une telle frayeur qu'elle peine à poser un pied devant l'autre. Elle sent son bras lui sangler les épaules, en une étreinte qui n'imagine sans doute pas le sentiment de protection qu'elle fait naître. Du haut de son mètre quatre vingt, rares sont les hommes capables de le lui inspirer, et Alonso est encore le seul à le sublimer tellement, comme il en a toujours été.

Elle ne fait pas la fière. Elle n'en a pas les moyens. A peine proteste t'elle quand elle se fait asseoir sur le siège passager, incapable de sortir de son état de choc. Engoncée dans sa veste suintant à grosses gouttes, elle remue seulement un peu sur son assise, cherchant un air qu'elle ne trouve plus, et ne retrouvera pas avant de longues minutes. Mais les réjouissances s'écourtent sur le discours de son ancien amant, lui faisant serrer les dents encore d'avantage. Des reproches. Presque des menaces. Et deux noms qu'elle n'avait pas besoin d'entendre.

" Je sais. " rétorque t'elle brutalement, détournant sauvagement le regard. On a sans doute déjà vu mieux, comme excuses. Mais Luka a eu peur, elle est encore effarouchée. Elle ne se contrôle plus vraiment. Son visage est livide d'angoisse, elle serre les poings pour empêcher tout son corps de trembler, en un élan de fierté absurde. Et l'allusion aux deux symptômes de ses plus terribles peurs n'arrange rien. Si elle ne se souvient plus de leur dispute que comme un enchevêtrement incertain de cris et d'excès, elle se souvient précisément que le déclencheur fut une allusion de ce genre. Même en verbe, même en hypothèses, elle ne le supporte plus. Lecter, Boogie, flingue et tralala, tout ça ne lui inspire qu'une nausée cauchemardesque. La mort est et restera pour elle la pire des choses. Il n'y a rien, dans la mort. Pas de gloire, pas de justice, pas de bonne ou de mauvaise manière... Il n'y a que la mort. La fin, et c'est tout. Des couronnes de fleurs sur une pierre tombale, qui ne comptent plus que pour les vivants, parce que les morts, eux, sont morts. " Qu'est ce que je pouvais faire ? Le laisser seul ? Tu as bien vu ce qui arrive. " murmure t'elle du bout des lèvres, les yeux braqués sur le tableau de bord avant d'ajouter, en un éternel lapsus à ses propres démons " Je ne l'abandonnerai pas. "

Elle n'a pas le courage de le regarder. Et elle n'a pas non plus envie d'observer le manège. Alors, elle continue de contempler le tableau de bord. Si elle était chez elle, elle aurait immédiatement arrêté cette mascarade. La seule idée que deux petites frappes s'affairent sur la tombe de Manek, après avoir uriné dessus, sur la simple base d'une autorité criminelle, la fait trembler de rage autant que le flingue à sa ceinture de peur. Mais c'est son monde. Elle ne va pas se lever contre ses ordres et contester cette autorité, si absurde soit elle, en pleine rue, après l'avoir successivement insulté, embarrassé et obligé à intervenir par imprudence. Donc Luka se tait. Elle regarde le tableau de bord. En tâchant d'oublier que ni l'un ni l'autre ne voulait se retrouver dans cette situation. Elle se dégage seulement de sa veste pour la déposer sur ses cuisses et imbiber son jean plutôt que les sièges en cuir du pick up, dont la familiarité revêt désormais de profonds relents d'amertume. Elle ne sait plus où elle en est. Où ils en sont. Si c'est un cas de rupture ou non, s'il y a même lieu de parler de rupture, s'ils étaient véritablement ensemble.

Le pluie tambourine sur le toit de la voiture, seul véritable bruit perçant le silence effroyable. Luka a froid, sans sa veste, dans son petit débardeur blanc. Dehors, deux silhouettes absurdes reviennent et s'affairent autour des produits de nettoyage. Les yeux baissés, elle ajoute, comme une conclusion honnête à cette situation insupportable.

" ... Merci. "


Les nuits ne sont pas éternelles
Disait la lune au soleil
Ils tournent en rond c'est un mystère
Depuis toujours, toujours
Disait un homme de l'univers
Dont la longueur est une merveille
Issues d'hier et du soleil
Issues de toujours, toujours


C'est étrange. Elle n'avait pas passé tant de minutes auprès d'Alonso sans le toucher depuis très longtemps. Il est si proche qu'elle pourrait lui effleurer la joue, rien qu'en tendant le bras à travers la fenêtre. Pourtant, ils ne se touchent pas. Et c'est comme un nouveau couperet d'absurdité tombé au dessus de sa tête. Elle a l'impression qu'une pièce de Shakespeare s'est fusionnée à un thriller de Vian pour lui faire vivre ses moments les plus aberrants. Tant de choses placées entre eux, tant de disparités, du crime à la charité en passant par de vieilles névroses, et c'est seulement la situation physique qu'elle peut retirer de ça. Du pick up et de la tombe sur laquelle la pluie crache à leur place. Elle en éprouverait presque un manque viscéral. Si être en contact avec lui n'a d'abord été qu'une envie longuement refoulée par ses remords, c'en est vite devenu un réflexe, presque aussi évident que l'air dans ses poumons. Elle a besoin de lui. Luka a besoin d'Alonso, de ses épaules, de son odeur et de son sexe, comme un noyé a besoin de sa bouée pour espérer happer de l'oxygène. Et rester là, assise, passive, si proche de lui, c'est comme agiter une bouteille de vodka au nez d'un alcoolique. Elle n'y arrive pas.

Sur la tombe de l'être qu'elle a sans doute le plus aimé au cours de son existence, elle est en manque d'un autre. Et cet état de fait, cette réalité incompressible, la broie tellement de culpabilité, qu'elle en est venue à le rejeter comme un vulgaire fétu de paille. Elle l'a abandonné. C'est lui, qu'elle a abandonné. Pour ne pas abandonner Manek une seconde fois.

" Chaque fois que je viens ici, je ne peux pas m'empêcher de penser à notre première rencontre. " murmure t'elle en un sourire pâle. " La première fois que je t'ai vu. J'avais l'impression d'être une adolescente en chaleur. Et je culpabilisais tellement que j'ai passé toute la cérémonie à tenir la main de sa mère, puis le reste de l'après midi à boire du gin. Jack a dû me ramener sur son dos. " Et le sourire s'étire. Luka déglutit sa salive, à défaut d'un aire qui ne passe plus. " Tu en as fait un bon souvenir. "

Elle laisse échapper un soupir. Ses yeux se baissent encore d'avantage, sur les doigts qu'elle tord maladroitement contre ses cuisses, au point de se faire mal. Ici s'arrête la limite de ses capacités. Ici débute le monde dans lequel elle est une enfant inconsciente. Luka est une femme fondamentalement traumatisée, incapable d'approcher les autres de peur de se blesser à leur contact, ou de par leur perte. Le complexe du hérisson dans toute sa splendeur. Elle est maladroite, presque impotente. Mais elle ne peut plus se permettre ce handicap. Pas avec lui. Alors elle poursuit, étranglée, honteuse, en oubliant tout le reste, de Shakespeare à Vian, en passant par le flingue calé à sa ceinture.
J'irai cracher sur vos tombes, oui, mais pas aujourd'hui.
Serre moi dans tes bras.

" Je suis désolée pour le dérangement. Et... pour tout le reste. Je sais que ça n'arrange pas tout mais c'est dur, sans toi. Je... J'y arrive pas. " Serre moi dans tes bras. Et elle se fait violence pour lever un regard suppliant vers lui, au moment que choisissent les chiens pour venir lécher ses chaussures. Les deux hommes approchent, chevrotent de leur voix minuscule qu'ils ont terminé leur travail. Serre moi dans tes bras. La pluie, à son tour, cesse de cracher sur les tombes. Un soupir sec franchit les lèvres de la belle. Il n'y a guère que dans ses rêves, que le monde réel ne les rattrape pas. Mais, éveillée, elle doit avant tout penser à ce dernier, avant de penser à elle-même. Alonso aussi. C'est toujours là que le bas blesse. Alors elle ouvre la porte du pick up et faufile sa menue silhouette dans l'interstice offert pour en descendre. Serre moi dans tes bras. " Ils ne mettent même pas une heure à reprendre les patrouilles à pied, ma voiture est loin... Il vaudrait mieux que j'y aille. Tu n'auras qu'à... " Luka fouille dans son sac à dos, en sort une couronne de fleurs qu'elle dépose sur le toit de la voiture. Elle n'a plus le temps. Elle l'aurait, si elle était encore avec lui. Ce n'est pas le cas. Et c'est entièrement sa faute. " Encore désolée. "

Ses bottes s'enfoncent dans les flaques sur son demi tour, sans que son regard ne daigne s'attarder vraiment sur son visage. Elle ne l'aura même pas vu distinctement, ce soir. Elle ne peut pas s'y résoudre.


Dis est-ce que tu penses
Qu'il faut arrêter là ?
Dis est-ce que tu crois
Que nous deux c'est tendance ?
Dis qu'est ce que tu vois,
Est-ce que nous deux c'est immense ?

* Louise Attaque

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MessageSujet: Re: Ma faute à toi Ma faute à toi Icon_minitime1Mar 9 Juil - 20:29

Ma faute à toi


Ce que tu pouvais faire ? M’appeler idiote ! Oh il voudrait le dire, il voudrait bien la gifler pour cette imprudence folle mais non. Alonso ne frappe pas si simplement. Pas elle, jamais. Tellement ancrée dans une fierté bancale, une peur viscérale du crime elle a oublié qu’il n’est pas homme à manquer à sa parole. Il lui aurait accordé ça, cette visite sur une tombe presque inconnue, parce qu’il peut comprendre. Il aurait laissé ses regrets et sa colère à l’entrepôt, derrière la porte de sa chambre et l’aurait accompagnée à défaut de l’étreindre. Elle ne lui fait même plus confiance alors ? Il serre les dents, hausse les épaules.

« Personne t’a dit de l’abandonner. Tu savais comment me contacter, j’ai donné ma parole mais ça aussi tu l’as oublié on dirait. Je t’aurai amenée. » Merci dit-elle, il soupire : « Pas la peine ... »

Du coin de l’oeil il la voit trembler, il la regarde mais reste comme figé sous la pluie. Autrefois il aurait claqué la langue, l’aurait gentiment sermonné en lui passant la couverture qui traîne dans son coffre. Celle un peu pelucheuse, qu’il lui réservait quand il la récupérait au bord du trottoir fut un temps. Il se serait fait rassurant, lui aurait passé une main sur les cheveux et aurait conduit jusqu’à un petit hôtel calme quelque part. Là il l’aurait envoyée prendre une douche chaude, se serait étalé sur le lit la tête enfoncée dans un oreiller à chasser autant que possible les rires déments de Lecter jusqu’à sentir la mince demoiselle l’aborder, passer une main délicate sur sa nuque. Alors il se serait retourné, aurait sourit à la découvrir trop mal cachée dans sa serviette miniature et l’aurait soulevée sans aucune peine pour la ramener sur ses genoux. Ils auraient fait l’amour, oubliant chacun leurs démons le temps du sortilège des amants. Aujourd’hui ? Ça semble si loin qu’il imagine à peine pouvoir l’effleurer, comme une idée à chasser. Elle l’a blessé, il le prend mal. Il est humain merde ! Il a le droit ! Il n’est pas barbare comme eux, il n’a pas éclaté sous ses talons toute notion de sentiment, il a de la peine … et comme contaminé par EUX il en vient à penser que ces deux là au moins, en un sens ils sont heureux. En cela, en cette capacité à oublier le chagrin et les cris du cœur, à se renier dans leur âme … mais est-ce vivre que d’en arriver là ? Non. Il faut un mental, quelque chose de déglingué à ce niveau. Il faut avoir toujours vécu comme ça ; et Alonso n’a pas suivi ces lignes là.  

Elle parle du passé, le Cubain sent son cœur se serrer, son estomac se retourner avec. Il se souvient des regards timides, des rougeurs sur ses joues et il en était arrivé à attraper Jack pour lui demander s’il avait fait un truc de travers. L’homme avait rit, avait haussé les épaules et s’était moqué sagement du « charme » de son grand ami. Alonso n’avait pas bien saisit sur le moment, trop habitué aux oeillades ouvertement provocantes, aux gestes évocateurs ou aux paroles crues de ces filles croisées dans les bars. Luka était si pure, si nouvelle en ce genre. Et le Cubain s’était presque senti flatté. Pas vu en simple objet, mais en homme qui éventuellement aurait pu dire non. Un beau souvenir … c’est assez vrai, en un sens.
Que lui répondre ? Il ne sait même pas. Il y a cette pointe de rancoeur, ce papillon noir qui voltige à côté de ses oreilles et fait sans cesse revenir les mots cinglants qu’elle a craché. Alors Alonso hoche lentement la tête avant de porter son attention sur les deux crétins qui reviennent piteusement. Il les congédie, leur rappelle l’heure pour le lendemain. Il décidera à ce moment là s’il les colle dans les pattes de Jason ou pas.

Luka sort de la voiture, pendant ce temps lui enfonce les deux mains dans ses poches et baisse les yeux pour la regarder faire. Avec presque deux mètres, il est bien obligé car elle est bien plus petite comparée à lui. « C’est dur sans toi ... » Il se retient d’en dire autant. Elle sort des fleurs, lui demande de les déposer pour elle sans réellement le dire. Puis s’excuse, une nouvelle fois avant de tourner les talons. Alonso ferme les yeux, les mains serrées dans les poches de sa veste. Maintenant ! Choisis maintenant ! Si elle part, ce n’est pas pas certain qu’il la retrouve un jour. Jason est fou furieux, il traîne avec une horde de chiens qui n’obéissent qu’à lui ou Boogie, et sa rage devient tellement maladive qu’il tuerait même le plus parfait inconnu en usant des pires sévices. Qui sait si là, cette nuit il n’est pas livré à sa folie dehors à chercher une victime potentielle à la faveur des ombres ? Le Cubain ne peut pas, rien qu’à imaginer ce qui se passerait il ne peut pas imaginer que ce serait pour alléger sa fierté à lui qu’elle est morte ; parce qu’il n’a pas su lui prendre la main.  Un œil sur les fleurs, sur elle qui s’éloigne et sa voix tonne dans l’air.

« Luka ! »

Il bouge enfin, passant les deux mains dans ses cheveux trempés pour les renvoyer en arrière et une fois à sa hauteur il rabaisse lentement les bras le long de son corps. Un soupir passe, il plisse la bouche une seconde le temps de chercher ses mots mais doit en venir au fait que non ; il n’aime pas chercher.

« Viens les poser toi, c’est toi qui dois le faire. C’est ton hommage … je te raccompagnerai après. Allez. »

Mais elle a peur, certainement. Alors le géant Cubain approche, lui passe encore un bras autour des épaules et l’entraîne. Doucement, il étire son bras libre et récupère la couronne une fois revenu à hauteur de la voiture pour lui poser dans les mains. Profitant de sa vitre ouverte il déverrouille la boite à gants et sort une bouteille avant de la retrouver et de renouveler cette étreinte légère. Juste enlacer ses épaules, comme un manteau, une cape qui éloigne d’elle n’importe quel truand, n’importe quel notion du mal autour.
Ensemble ils retournent à la tombe, mais avant que Lukas approche Alonso s’agenouille devant la pierre et ouvre la bouteille, y déversant les trois quart du contenu.

« Désolé, j’aurai préféré un bon vin mais j’ai que du Gin vieux. La prochaine fois je ferai mieux. » Un sourire, il soupire légèrement et lève la bouteille à l’intention du mort. « a tu salud amigo* ! »  

Portant le goulot à sa bouche, il avale une gorgée et se redresse, tendant l’alcool à la jeune femme. Un peu maladroitement, il lui exprime une attention toujours présente et aussi qu’il sera toujours là. Il a promi et Alonso n’est pas homme qui revient sur ses promesses. Quand bien même demain Luka ne pourrait plus se rendre sur cette tombe lui viendrait encore, il viendrait lui raconter trois conneries même s’il ne l’a pas connu. Seul, parce que quand la famille venait il ne se permettait pas et les laissait entre eux. Parlant de ça ; ils ne sont pas présents ce soir eux.

« Tu veux retourner les chercher ? Sa famille … Pour sa mère, ça doit pas être facile de manquer une occasion. J’ai du temps, c’est comme tu veux Lukas. »

Cette fille si fragile, qui lutte si fort contre elle même et le monde, il ne peut pas la laisser. Alonso y a pensé oui, dans toute son envie de soigner seul sa fierté d’homme, mais les mots ne peuvent pas faire s’achever ça. Pas si facilement. Il lui en veut encore mais pas question de l’abandonner. Peut-être que rien ne sera plus jamais pareil, il aura toujours cette impression dérangeante qu’elle le hait pour ce qu’il incarne mais il a l’habitude. On ne l’a jamais réellement vu comme quelqu’un de bien. Une bête sauvage, l’ombre de Lecter, un criminel et sans doute qu’elle fait pareil maintenant. Mais le Cubain prendra sur lui, il ne reprendra pas la main qu’il a tendu un jour.

« Je dis pas que j’oublie, non … ça je peux pas. Mais je ne veux pas qu’il t’arrive quelque chose. Tu te souviens, je te l’ai dit déjà, que peu importe les problèmes je serai là pour toi. Merde Luka je sais que tu hais  mon rôle, que peut-être même tu me hais profondément pour moi même maintenant mais au moins … fais moi confiance. J’ai qu’une parole et ça, tu le sais très bien. »


* à ta santé l'ami
© Jason L.

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MessageSujet: Re: Ma faute à toi Ma faute à toi Icon_minitime1Mer 10 Juil - 1:17

A l'appel de son nom, Luka se fige. Ecartelée entre un immense soulagement et une gêne affreuse, elle pivote légèrement dans sa direction, refrénant malgré tout ses espoirs sous-jacents. Peut être qu'il ne vient pas la ramener. Peut être a t'elle seulement oublié quelque chose. Elle l'observe chercher ses mots, en oublie de respirer, tant ces menues secondes lui semblent interminables. Et enfin, quelques bribes tant attendues de retrouvailles. Ce n'est pas grand chose, ils sont encore loin d'avoir franchi la distance née entre leurs êtres, mais c'est un commencement. Elle ne peut retenir un soupir bref, seulement soulagée d'être capable de respirer à nouveau. Encore hésitante, presque un peu vacillante, elle sent le bras papillon se déposer sur son épaule, inspire plus profondément l'odeur qui se dégage de lui. Malgré elle, son corps se serre contre celui qui lui a tant manqué, quoiqu'elle n'ose pas l'enlacer en retour. Elle n'en a certainement plus le droit.

Luka se laisse conduire dans l'autre sens, les yeux rivés sur la tombe qu'elle n'avait pas encore réussi à atteindre. Légèrement en retrait, elle s'écarte un peu pour le laisser s'agenouiller, observant le rituel en un sourire d'infinie tendresse. Son coeur se serre d'émotion, à voir cet homme rendre hommage à une partie de sa vie sans même la connaître. Et pour la première fois depuis cette horrible dispute, elle a enfin l'impression de le retrouver vraiment. La distance s'estompe, elle sent à nouveau les réflexes vitaux lui revenir. Même sa culpabilité inhérente semble lui laisser un peu de répit. Manek aurait sans doute voulu ça, la voir retrouver un peu de chaleur auprès d'un autre. Quand bien même c'est un foutu bordel, qu'ils n'ont pas le vent dans le dos ni le monde en leur faveur. C'est dans ce genre d'instants qu'elle se sent le mieux. Dans ces moments là qu'elle aime Alonso de tout son être. Elle accepte la bouteille en un sourire pâle, s'arrache une bonne gorgée, puis une légère grimace. Elle avait oublié que c'était aussi fort. Mais Luka manque de courage, ces temps ci, et elle cède à l'envie d'en prendre une deuxième avant de la lui rendre. Pour le courage. Pour avoir la force d'accepter sa proposition, étreinte d'une infinie reconnaissance. Non, elle n'en a pas envie. Elle a envie de penser à elle et à elle seule, l'espace d'une petite seconde, ce qu'elle n'a pas fait depuis des mois. Elle n'en peut plus, de tout ce monde pour qui c'est pénible, à qui il faut venir en aide, au sort duquel il faut compatir. Mais elle accepte. Elle reprendra peut être seulement un peu de gin, ce soir.

Luka inspire de nouveau profondément, savoure enfin ce répit accordé à son âme. De courte durée. Car la suite lui coupe littéralement le souffle, à nouveau, bien plus brutalement cette fois. Aux mots qu'Alonso lâche dans l'air, la belle tourne un regard horrifié vers lui. Elle se serait attendue à tout. Mais pas à ça.

" Bien sûr que non, je ne te hais pas ! " s'exclame t'elle, d'une voix qu'elle reconnaît à peine. Un claquement aigu d'une incrédulité sans borne. " Jamais je... " la suite des mots se perd dans sa gorge pour y être brutalement étranglée. Baissant les yeux, Luka ouvre la bouche, le coeur prêt à lui faire sauter la cage thoracique.

Comment a t'elle pu laisser une chose pareille se produire ? Fallait il qu'elle soit idiote pour réussir à le convaincre d'une telle négativité à son égard. C'est pire que tout ce qu'elle avait imaginé. Bien sûr, elle a dit des choses affreuses, excessives, mais elle pensait qu'il les savait nées d'une colère irrationnelle et pas tirées d'un fond de vérité quelconque. Ce n'était qu'une dispute. Jamais elle n'aurait cru qu'il y apporterait plus de crédit qu'un emportement idiot.
Bien sûr, que tu n'oublies pas. Si je t'ai fait croire ça, comment diable pourrais tu l'oublier.
Elle soupire, le visage baissé. Elle est à nouveau incapable de le regarder. Et cette fois, elle en a les larmes aux yeux. La gorge encore trop serrée pour prononcer un mot, elle laisse le silence parler pour elle, au risque de se voir déformer ses propos. Il faut croire, de toute façon, qu'elle n'est pas douée pour communiquer les bons, quand il s'agit d'émotions. Ah ça, pour les discours et les encouragements, les sermons et les idéaux, tu es très forte. Tu captiverais des foules entière. Mais quand il s'agit d'un homme, il faut que tu reproduises éternellement les mêmes erreurs. Tu ne peux pas t'en empêcher, hein.
Sombre idiote.

Luka laisse échapper un nouveau soupir, qui n'a plus rien d'heureux, ni même de soulagé. Son regard dérive à nouveau vers la tombe. Elle se sent complètement assommée. Plus dépassée que jamais. Ouvrant légèrement la bouche, elle laisse filer de nouvelles secondes avant de parvenir à murmurer, d'une voix que l'émotion a rendue rauque.

" Il m'arrive de me dire que dans un monde idéal, on serait installé tous les deux, au grand jour, avec un travail honnête. Et de me rendre compte ensuite que ça nous rendrait malheureux. On n'est plus capable de vivre normalement. " elle étire un pauvre sourire, les bras serrés contre sa poitrine. Elle a froid, de nouveau, tout à coup. Mais les faits sont là. Ils se sont enfoncés trop loin, l'un et l'autre, pour espérer se contenter un jour d'une vie normale. Que ce soit un complexe de héros ou beaucoup plus de choses en une vie qu'un être serait en droit de voir, ils ne vivent plus dans le même monde que les autres. Elle commence même à se demander s'ils vivent réellement dans le même monde, l'un et l'autre. " Et puis, ils comptent sur nous. Parfois j'ai l'impression de n'être plus rien d'autre que tout ça. La femme forte et inébranlable à la tête d'une cause perdue. D'avoir enterré Luka ici, six pieds sous terre. "

Elle hausse les épaules. Elle est terriblement fatiguée. Plus le temps passe, plus elle sent bien qu'elle a abandonné une partie d'elle-même dans cette fichue tombe, avec ses regrets et sa colère, et empêche quiconque oserait tenter de venir l'en arracher. Mais ce soir, elle a seulement envie de se reposer, de laisser tout ça derrière elle et de retrouver le seul être capable de la sortir de son rôle. De la faire se sentir un peu moins grande, et un peu juste Luka. Elle déglutit, péniblement, dans un frisson proche du tremblement.

" Je ne peux pas effacer ce que je t'ai dit. J'aimerais, mais c'est impossible. C'est vrai, je ne suis pas d'accord, je déteste la violence gratuite, je déteste l'idée de te savoir enfermé dans ce carcan et par dessus tout, je déteste le danger que ça représente pour toi. Si tu disparaissais, je... Je ne le supporterais pas. Je ne veux pas revivre ça. Je ne peux pas. " Sa tête se secoue légèrement, comme pour appuyer ses dires, inconsciemment. Depuis des semaines, chaque nouveau blessé arrivé au quartier général était une nouvelle montée d'angoisse. La simple évocation de cette hypothèse achève de faire couler les larmes qu'elle retenait. Mais il faut finir. Ne pas le louper. Pas encore. " Et peut être que c'est pour ça que j'ai dit toutes ces choses affreuses. Je... comprendrais que tu ne me pardonnes pas mais je refuse d'entendre ça. Jamais, jamais, je ne serai capable de te haïr. "

Elle renifle, essuie son oeil d'une main rageuse. Le coeur au bord des lèvres, elle se retourne enfin vers lui. Au diable ce qu'elle a le droit de faire ou non. Au diable les choses compliquées, la distance et tout le reste. Le reste sera pour plus tard. Le reste la fatigue. Et, souriant légèrement derrière ses yeux brillants, elle lève seulement la main vers sa joue, la passe sur les gouttes de pluie dégoulinant de ses cheveux long. Elle l'y laisse, ses doigts s'enfonçant très légèrement dans sa nuque, pour murmurer enfin, dans un élan de grâce. Car s'il est une chose en laquelle Luka sait être belle, c'est quand elle parle de ce dont elle est intimement convaincue.

" Tu es une bonne personne, Alonso. L'une des meilleures que j'aie eu la chance de rencontrer. Ne l'oublie pas. Ne laisse personne te le faire oublier. Même pas ce quartier. Même pas moi. " Elle esquisse un bref sourire et se rapproche enfin de lui, glissant sur ses pointes pour étreindre ses épaules au creux de ses bras. Sa joue se colle à la sienne, elle savoure ce contact, noyée accrochée à sa bouée. Qu'il la repousse, s'il veut. Au diable. Même cette famille en deuil attendra quelques minutes de plus. Au diable. " Si tu savais à quel point je regrette. " souffle t'elle au creux de son oreille, ses bras se serrant de plus belle.

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MessageSujet: Re: Ma faute à toi Ma faute à toi Icon_minitime1Mer 10 Juil - 4:13

Ma faute à toi


S’il n’était pas lui, il aurait sursauté à l’entendre dire que non, elle ne le hait pas. Ce n’est même pas le dire, c’est le crier, c’est comme pour chasser un doute et s’il est sincèrement surpris le Cubain se contente de lever les sourcils sans trop savoir s’il a réellement bien entendu. Ne lui a-t-elle pas dit qu’il la dégoûtait ? Si, alors pourquoi prétendre le contraire maintenant ? Parce la colère est mauvaise conseillère très cher, ne le sais tu pas ? Oh ça si, il en a une vague idée mais à vivre avec certaines personnes Alonso en vient à tout prendre pour argent comptant. Il a apprit à disséquer les phrases, à voir les sous entendus mais il en saisit la substance aussi parce que dans son monde, dans LEUR monde on n’a pas le droit à l’erreur. Pas qu’il craigne de se faire tuer mais autant éviter de provoquer le courroux d’un homme dont l’instabilité est devenue légendaire. Les mots étaient blessants malgré tout, et Alonso a beau essayer il a du mal à les laisser de côté.

La voix qu’elle laisse passer est mal assurée, il lui connaît ce timbre cassé aussi celui d’une émotion forte. Dans un autre monde ils auraient pu être tellement d’autres choses oui. Mais ça ne leur va pas, ils ont une place et doivent la tenir quand bien même elle n’est pas simple au quotidien. A sa dernière réplique le géant secoue lentement la tête.

« Tu n’as enterré personne ; surtout pas toi même. Seulement, on en est tous là … on oublie de vivre pour nous. J’ai connu ça, à une époque. À me demander ce que je foutais là mais à y réfléchir, je me suis dis que c’était en aidant quelques personnes, ma famille en mon cas, que je me sentais complet. »

Encore maintenant, Alonso se sent un devoir nouveau envers Jason et Boogie. Comme il se sentait le devoir d’arracher les siens des bas-fonds de Cuba, maintenant il met un point d’honneur à garder un œil sur eux. Sans s’apprécier, sans jamais en parler mais quoi qu’il se passe le Cubain ne quittera pas le navire en marche, jamais. Il ne peut pas aimer ces gens là et ils ne l’ont jamais demandé d’ailleurs parce qu’il y a une sorte de codes même entre les pires ordures au monde. Alors Alonso en tient compte, il respecte et le tout fait de lui cet homme un peu bourru, aux mains peu sanglantes peut-être mais encore capable de venir ici devant la tombe de cet homme qu’il n’a jamais pu connaître de son vivant, le traitant comme un vieil ami auquel il rend hommage sans la moindre arrière pensée.

Devant lui elle frissonne, il ne sait si c’est à cause du froid ou à cause de cette gêne qui lui coule du corps, ce mal être qu’elle ne cache pas et qu’elle ne peut pas dissimuler. Et comme pour ne pas en rajouter l’homme se tait, écoute sans interrompre. Son cœur manque un battement ; elle s’inquiète donc ? Réellement ? Franchement … il est bien le dernier à craindre quoi que ce soit ici. Elle ne le supporterait pas s’il disparaissait mais et lui en fait, dans son cas ? Le Cubain s’interroge. Le supporterait-il si demain on lui annonçait sa mort ? L’homme en lui n’y survivrait pas sans doute … ne resterait plus que le sauvage des rings, la bête à la suite d’autres bêtes sans plus d’états d’âme. Parce qu’elle représente quelque chose ; quoi qu’il dise ou fasse elle l’a marqué. Innocente, charmante, tendre Luka elle a arraché à la brute qu’il était les dernières flammes de la passion et de la tendresse, a ravivé un brasier qu’il ne pensait plus capable de ressentir. Se plaire auprès d’une autre personne, lui ouvrir les bras, protéger par affection. Il avait tellement imaginé tout ça passé, enterré dans ce bar où une certaine nuit, il avait emboîté le pas au Diable.

« Hm … pourtant je te dégoûte tu disais. Bah, ça me rassure tout de même de pas me savoir détesté. Au moins ça. » Elle renifle et là seulement il prend conscience qu’elle pleure. C’est presque déchirant et tout insensible qu’il est en général aux autres, fervent adepte du « chacun pour sois » il n’a jamais aimé ça. La faire pleurer, en être la cause alors il murmure : « Pleure pas Luka merde ... »

La belle revient vers lui, se hisse sur la pointe des pieds et logiquement il se penche pour écouter ce qu’elle ajoute. Elle l’enlace comme elle peut, la position n’aidant à rien et elle le redit qu’elle regrette. Qui est-il lui pour repousser les excuses ? Il n’a jamais ignoré ça car il lui reste des sentiments. Souvent violents, souvent trop nets mais il en a. Alonso soupire doucement, il n’oubliera jamais qui il est car depuis trop longtemps il a dressé la tête, le jour où il a embarqué sur la bête de fer c’était en se promettant que jamais, en aucun cas il ne serait autre chose que cet homme né à Cuba, honoré de sa famille, fier d’être lucide et de s’opposer à la dictature. Alors il passe les bras à sa taille, la soulève d’un seul mouvement pour la ramener à la hauteur de son visage et un demi sourire étire ses lèvres.

« Si ce n’était pas toi, je te collerai des baffes ! Ne me sors plus jamais que tu es enterrée là Luka. Moi, ce n’est pas la chef d’un mouvement que je vois. C’est toi, cette fille idéaliste, qui peut pleurer et qui s’excuse, qui croit en quelque chose. Tu es une femme bien mais tu ne le vois pas. Et lui, il le savait. Il ne voudrait pas te voir malheureuse, il devait aimer ton sourire. Je l’aime bien ce sourire moi aussi tu sais, ça me rappelle d’où je viens. On avait pas grand chose mais y’avait des gens dans ton genre et parce qu’on s’entraidait, même si c’était trois fois rien ça valait de l’or. Perds pas confiance en ce que tu fais, ça paiera un jour. J’y crois. »

Au fond de ses yeux le Cubain croit apercevoir une lueur d’espoir comme une question, un tu me pardonnes alors ? Comme si elle n’imaginait plus la chose possible. Elle lui semble si jeune et si innocente, comme au première jour lorsqu’elle rougissait à sa vue. Quand elle n’osait pas encore lui parler, comme à leur début où elle hésitait certainement à le toucher. Un rire lui échappe, ça faisait longtemps mais ça fait du bien de retrouver cette espèce de chaleur. Oui le Cubain est un criminel, il vit dans le Sud, c’est son terrain de chasse mais il n’attend pas la fin du monde ni celle de la ville. Il attend une justice, la même pour tous. Une liberté honnête, autant que possible au moins. Oh il n’est pas parfait loin de là, il en a fait des choses affreuses mais il sait aussi se poser, réfléchir, prendre en compte et il sait apprécier … même si c’est à son échelle, sans grande envolée.

« Je te pardonne Luka ... Mais me refais jamais un coup pareil ! »
© Jason L.

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MessageSujet: Re: Ma faute à toi Ma faute à toi Icon_minitime1Mar 16 Juil - 17:01

" Dis, Manek... Tu t'es déjà demandé ce qu'on deviendrait dans dix ans ?
- Pas besoin. Je le sais déjà.
- Ah bon ?
- Oui. Tu seras un mannequin mondialement célèbre et moi un photographe artistique très à la mode. On aura une maison, trois chiens, deux enfants mais pas plus - je devrai garder des sous pour la garçonnière où j'emmènerai mon amante.
- Idiot. Tu ne me tromperas jamais. Tu aurais beaucoup trop peur que je te quitte.
- ... C'est vrai, je ne te tromperai pas. J'en aurai pas besoin. Mais si je le faisais, tu ne me quitterais pas, Luka.
- Tu crois ça ?
- Bien sûr. Ou alors, tu reviendrais. Parce que ce qu'on vit, c'est trop fort pour être gâché à cause d'une midinette. Ca n'arrive pas souvent, tu sais. Il y a certaines personnes qui ne le trouvent jamais. Alors deux fois, tu penses... Ce serait du gâchis, de se séparer. C'est comme couper un membre sous prétexte qu'il a un petit défaut. Sans moi, tu verras, ce sera comme si on t'avait arraché une partie de toi-même. Moi, je le sais déjà. On n'aime qu'une fois.... après ce ne sont que d'autres rendez-vous. "






Parfois, je me demande si tu as conscience de ta propre humanité. Moi je sais que tu es quelqu'un de bien. Mais toi, Alonso ? Est ce que tu t'en souviens ?

Cuba. Sa famille. Luka laisse échapper un sourire intime. Alonso a toujours eu cette intelligence hors du commun, celle des gens de coeur, intacte et sans défaillance. Capable de sourire de tendresse un soir après avoir vu les pires aberrations de violence tout le jour. Au point que Luka s'en demande comment est il capable de conserver intactes ces deux parties de lui-même, sans faiblir à son devoir de tueries comme à celui d'affection. C'est vrai, elle s'en inquiète de plus en plus, et si elle refuse de le perdre, elle sait malgré tout que la conversation n'est pas close. Elle sent son monde s'enfoncer de plus en plus dans les ténèbres, l'entraînant avec. Il y a quelques semaines, avant leur dispute, il avait des absences de plus en plus fréquentes, et peinait à être réellement avec elle, passait des minutes pleines le regard dans le vide. Elle ne sait plus lequel de ses deux acolytes il a cité, dans un instant d'égarement, mais c'était suffisant pour infliger une peur atroce à la jeune pacifiste, aussitôt mue en une colère lancinante. Oui, elle est en colère contre ce monde. Ce monde qui évince la tendresse du Cubain, au profit d'un travail à rendre fou le meilleur des hommes. Ce monde qui tente la jeunesse et ne la prévient pas que, quand on y entre, il n'y a plus d'issue possible. Ce monde qui la privera un jour de son homme, comme l'autre lui a arraché ses premiers amours, inexorablement. C'est une évidence. Elle n'est pas idiote. Il pense peut être être totalement immunisé mais elle, elle le voit bien. Il se passe des choses hors de leur portée, hors de leur compréhension. Des choses capables d'anéantir tout sur leur passage. Des choses qui la terrorisent, plus sûrement encore que le canon d'un flingue.

Pourtant, quand Alonso est là, contre elle, à lui parler de sa famille, elle pourrait plonger toute entière de ce sentiment d'absolue sécurité qu'il est capable d'insuffler. Cette impression d'être seuls au monde, avec rien d'autre qu'un fil, fragile et ténu, de tendresse. Alonso est son intelligence du coeur, Alonso et ses certitudes idéalistes, capables de renforcer les siennes, quand le découragement l'accable. Une couverture pelucheuse et une chambre d'hôtel. Luka sent son coeur manquer un battement lorsqu'il évoque l'endroit d'où il vient, la bonté de ces gens là retrouvée en elle. Touchée, elle efface ses peurs sur l'ombre d'un nouveau sourire. Elle n'a pas envie d'y penser. Pendue à son cou, les jambes dans le vide, elle acquiesce à sa dernière requête, appuie son front contre celui du géant, soufflant contre ses lèvres, les paupières closes.

" Je te le promets. " Luka hume son odeur sans lassitude, sent les gouttes de pluie rouler sur les doigts qu'elle a enfouis dans sa chevelure. Resserrant son étreinte encore d'avantage, elle l'embrasse enfin, savourant le goût de ses lèvres puis de sa langue, comme un rescapé trouverait enfin une source d'eau pure. Elle déterre en un frisson l'empreinte de sa bouche sur la sienne, de son nez sur sa joue et de ses épaules massives tout le long de ses bras. Comment se laisser gagner par le réalisme, quand on peut se saouler encore d'espoir, jusqu'à ne plus marcher droit ? Son sourire s'étire, elle mordille sa lèvre et love son nez dans sa gorge, glissant dans un murmure hilare. " On ne fera avaler à personne que je suis cubaine, tu sais. "

Plus blanche que blanche, tellement que sa peau semble avoir été cousue avec du véritable lait, elle n'a pas vraiment l'allure des femmes brunes de là bas. Il lui arrive même de s'en demander comment Alonso peut il ne pas se lasser d'elle, tant elle paraît menue et si peu charnue, en comparaison d'autres filles qu'il a dû connaître. D'une beauté incontestable sur les papiers glacés, Luka peine malgré tout à trouver sensuelle la brindille lui servant de corps, amincie encore d'avantage depuis que son régime alimentaire est entretenu par des caisses trop souvent vides.

Laissant sa joue caresser la peau de l'homme encore quelques secondes, elle glisse enfin à regrets pour reposer pieds à terre. Si ça ne tenait qu'à elle, elle accaparerait l'homme et sa couverture à l'arrière du pick-up pour rattraper le temps perdu mais il est temps d'oublier son égoïsme éphémère. S'écartant complètement de lui, elle avance de quelques pas et dépose enfin sur la tombe la couronne de fleurs adressée par ses parents. Ses doigts caressent la terre où l'herbe a repris ses droits, elle s'abandonne à quelques nostalgiques secondes, le coeur serré. Luka ne saurait dire si elle pourra un jour entièrement faire son deuil. L'histoire est trop brutale, trop répétitive, et son combat l'empêche d'oublier, puisqu'elle a voué sa vie à empêcher que ça se reproduise. Une partie d'elle-même arrachée. Il avait raison, finalement. Si elle n'est pas enterrée là, si le feu continue de brûler, elle a parfois véritablement l'impression qu'on lui a arraché un membre invisible pour le jeter dans cette tombe. Son avenir passé est là, six pieds sous terre. Cette chose qui n'arrive qu'une fois dans la vie.

Inspirant un air quelque peu enserré, elle se relève, retourne vers Alonso et lui arrache la bouteille des mains, dans un sourire qu'elle veut détaché. Il faut savoir ne pas traîner trop longtemps sa douleur.

" Toi, tu conduis; moi je bois. L'alcool au volant, c'est illégal. "

Elle lève la bouteille pour appuyer ses dires, dans un rire léger, amusée à la pensée de cette petite infraction sur le casier judiciaire du Cubain. Bondissant grâcieusement à l'arrière du pick up, elle s'allonge sur sa couverture et attend qu'Alonso ait tiré la bâche de tissu par dessus elle, pour la cacher, ne pouvant se permettre de voyager à découvert dans les quartiers du centre. Dans son obscurité, Luka sent le moteur vrombir et prélève une dernière gorgée de gin, laissant la tiédeur envahir ses joues et lui faire oublier un peu les nids de poules qu'elle va rencontrer. Ca, et puis tout le reste. C'est qu'elle n'aime pas vraiment se confronter à la famille de Manek trop longtemps. Elle les adore, mais il est toujours difficile de les regarder dans les yeux sans sentir une nausée d'angoisse et de honte la prendre. Et pour cause, elle leur ment depuis cinq ans. Persuadée que sa mère ne survivrait pas à la vérité, et que son père ferait une chose inconsidérée en l'apprenant, elle leur a raconté que les tirs étaient des balles perdues, et que les médecins avaient tout fait pour lui venir en aide. Parce qu'il n'y a rien de pire qu'imaginer son propre enfant à l'agonie sur un trottoir, sans personne pour se soucier de son sort. Alors elle a refait l'histoire, joliment, comme elle aurait dû se passer dans un monde normal. Pour les épargner, certes, mais elle n'en est pas moins mal à l'aise.

Après quelques minutes de route, épargnée de trop de nid de poule, Luka sent la voiture s'arrêter. Le coeur serré, elle se libère de sa cachette et va frapper à la porte du couple. En haut, au troisième étage de ce qu'on ose appeler un immeuble, d'avantage semblable à un bâtiment désaffecté, elle voit le visage de la mère s'éclairer d'un sourire radieux à travers une fenêtre. Quelques éclats de voix se font entendre. Malgré elle, Luka glisse sa main à travers la fenêtre conducteur et serre le bras d'Alonso, pour oublier sa nervosité. Les yeux rivés sur la porte qui ne va pas tarder à s'ouvrir, elle murmure du bout des lèvres.

" Je peux dormir chez toi, cette nuit ? Je serai sage, promis, on ne me remarquera même pas. J'ai pas envie de rentrer. Le QG... il me sort par les yeux."

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MessageSujet: Re: Ma faute à toi Ma faute à toi Icon_minitime1Jeu 18 Juil - 0:19

Ma faute à toi


Les souvenirs qu’il garde de Cuba restent clairs malgré la distance, malgré le temps passé. Lorsque Alonso ferme les yeux il entend encore le son d’une guitare devant un feu, il revoie ses sœurs, sa mère esquisser quelques pas de danse dans la poussière et ses frères, son père à ses côtés, les yeux fiers de sa famille. Ils n’avaient pas grand chose, dormaient sous des tôles mais ensemble disaient ses parents, nous pourrions déplacer des montagnes et des déserts. Jeune, Alonso n’avait pas saisit le sens profond de ces paroles et s’était contenté de sourire simplement. Puis il les avait rencontré, ces deux là, Monstres pour les uns mais sans même s’apprécier ils faisaient de l’union de leur trio une force considérable. Il pouvait bien détester Jason pour ses humeur, rêver d’étrangler le Croque Mitaine lorsqu’il usait de ce ton condescendant ; lorsqu’ils s’agissait de plans ils connaissaient leur place et mettant en commun leurs capacités propres le résultat était là : Maîtrise totale d’un quartier. Alonso taira à jamais la gratitude qu’il éprouve car ces bêtes là n’ont pas besoin de merci, pas besoin de pardon. Elles sont égoïstes mais justes à leur manière. Il aimerait l’expliquer à Luka mais elle ne comprendrait pas ça. Trop pure, elle ne tolère aucune forme du « mal » elle y voit une menace lorsque lui y trouve une libération. Jamais Alonso ne sera agent du Chaos, il ne veut pas la fin du monde mais il comprend Jason et Boogie. Il réfléchit au point de vue des autres et doit bien constater que l’humanité le dégoûte régulièrement. Pas à leur échelle, il n’est pas aussi extrémiste. Mais quelques fois oui … il faut se salir les mains. Il n’est pas homme à baisser les yeux au sol et à faire l’autruche, la tête dans le sable pour ignorer qu’autour des populations agonisent tandis que des politiciens arborent des rolex hors de prix, se paient le luxe de l’anonymat et passent leur nuit au couvert de chambres blindées. Rester pacifique face à cet état de fait tient de la lâcheté à ses yeux. Il n’y arrive pas et comme emporté dans la ronde du Clown il libère la bête, la sienne et referme les crocs sur la nuque des biens pensants souvent trop loin d’être bien blancs.    

Souvent il s’est interrogé, sur elle et son entreprise. Il pourrait la qualifier de faible mais ce serait seulement injuste. Elle, tellement incapable de faire consciemment du mal se dresse en petit comité contre le monstre gouvernemental et ses hideux principes réducteurs. Elle soulève un drapeau blanc le plus haut possible et ignore ses propres blessures avec détermination, capable comme cette nuit de risquer tellement plus que sa vie. Elle est un petit lapin blanc, une petite colombe qu’on la jetée au milieu des fauves et si elle a peur elle essaie, malgré elle, elle ravale ses larmes et elle s’efforce. Alors non, aussi pacifique qu’elle soit Luka n’est pas lâche ou faible et elle ne le sera jamais.  
Là dans ses bras, physiquement fragile comme une bulle de savon elle vient quémander un baiser, un peu d’amour dans ce monde barbare qui ne cherche qu’à la mordre, arracher sa peau diaphane par lambeaux. Alonso ne mord pas la petite colombe. Aussi sauvage soit-il il ne tend ses pattes griffues que pour la protéger et devenir un sanctuaire où enfin elle est en droit de souffler sans penser qu’on la traque. Elle est précieuse, lueur d’espoir. Elle lui laisse entendre qu’en l’humain il y a encore du bon. Baiser amer cependant, car entre eux demeure une incompréhension mutuelle. Deux mondes trop différents qu’ils doivent mettre de côté au risque de s’entendre dire qu’il fait parti du mauvais panier.
Ha pour sûr elle n’a rien des filles de là bas, c’est le total inverse mais ce n’est pas bien important. En matière de femmes Alonso ne s’est jamais arrêté à un type précis. Fut une époque où il s’en moquait complètement. Asiatique, Cubaine, Américaine, Africaine ; il n’est pas sélectif. Quelque fois il suffit d’un regard, un parfum, un détail. « Oh mais dans le fond, tu dois l’être un peu quand même. Tu sais brûler à ta façon et j’aime bien ça. »

Elle rejoint le sol, va poser les fleurs. Il la laisse. Lui a un minimum de patience, il laisse le temps au temps et n’interrompt pas le recueillement. Elle revient à sa hauteur, subtilise la bouteille et déclare qu’il doit conduire sur un ravissant sourire. Un sourcil levé, il rit chaleureusement et écarte les bras. « Ce que femme veut … après toi ! » Elle s’installe à l’arrière et il la couvre rapidement afin de la cacher au mieux pour le trajet vers le centre. La route file, le Cubain la prend sans grande vitesse pour minimiser les secousses et lorsque enfin ils atteignent leur destination il se gare. Ils semblent heureux de savoir qu’il est là, c’est déjà ça. Alonso se met un peu à leur place, si demain il arrivait quoi que soit à sa famille il reprendrait le train de la mort et braverait le monde pour se rendre sur une tombe aussi froide qu’elle soit. Luka revient, pose une main sur son bras. Dormir chez lui ? Oh ça non, par les saints et les diables c’est hors de question qu’elle mette un cheveu chez lui … car chez lui, c’est aussi chez eux. Les bêtes vivent en communauté.

« Hm c’est pas ce qui a de plus sûr chez moi. On ira à l’hôtel à l’entrée du Sud. Je préfère avoir la main mise sur les lieux. Et puis … le Sud, c’est chez moi après tout. » Glisse-t-il en lui accordant un clin d’oeil. « Par contre hors de question que tu mattes à travers les vitres de la douche j’te préviens ! Je t’ai vue l’autre fois, vicieuse va. »

Comme s’il ne l’était pas. Il sait trop comment la charmer et la faire rougir est une fierté en un sens. Pas que le Cubain ait à chercher de confirmation sur ses atouts physique, il sait très bien qu’il plaît mais provoquer la belle est un jeu dont il ne saurait se lasser.
Les gens sortent, il les salue d’un signe de la main et les laisse monter à l’arrière du véhicule avec Luka. Il n’y a rien à craindre de toute manière, il ne laissera personne les déranger. Luka ou eux, aucun n’a pas besoin de savoir qu’ils roulent dans une voiture qui est passée sous les yeux polaires de Boogie. Chacun des moyens de transport recèle des armes sous les sièges, sous des faux plancher et il suffirait de presser un bouton quelque part pour déclencher la bombe qui dort sous le capot. Ils ont prévu. Chose amusante d’ailleurs de modifier ces engins avec le Croque Mitaine. Alonso ne songeait pas au départ qu’il puisse avoir la moindre connaissance en la matière mais ce type est un puis de science et si la journée « garagiste » avait été riche en vannes et autres et autres réflexions fusantes, ils avaient bien bossé ensemble. Exit les rires de Jason qui étaient venu les asticoter et mettre son grain de sel. Grain de sel explosif mais qui ne laisserait aucune trace de leur passage en cas de pépin.
De nouveau il se gare à l’entrée de la rue et ne descend pas cette fois. Ce n’est pas son affaire …
Ensuite il les ramènera et quand ce sera fait il rentrera avec elle quelque part, loin de sa chambre habituelle. Leurs retrouvailles devraient être agréables … Au loin, les deux types s’enfuient à toutes jambes en ayant reconnu la voiture. Ah oui, il faudra penser à ces deux là aussi. Bah, demain … Demain, il les collera dans les mains du Clown.
 
© Jason L.


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