TESS & H.



interrogatoire numéro 8 —

La salle est petite, lugubre. L'atmosphère est saturé de sueur et le mobilier sommaire qui trône au milieu de la pièce ne sont pas des plus confortables.
Allegra s'arrête sur le pas de la porte, considère le tout avec un air d'infini dégoût et finalement, avance lentement vers la chaise, où elle s'assied avec classe et délicatesse. La flic qui lui fait face n'a pas l'air agressive - encore une incapable, une faible. On se demande ce qu'elle fabrique ici, sérieusement. Allegra doit bien faire une tête de plus qu'elle, encore sans compter ses Louboutins - le dernier modèle créé, fraîchement arrivé la semaine dernière. Un court silence, le temps de se dévisager, de se juger et de se bourrer d'idées pré-concues mais peut-être pas totalement erronées. Après tout, il faut être sérieusement retardé pour devenir flic. Pas d'entrée en matière - cette conne doit être sur les nerfs-, on attaque directement. Allegra sourit imperceptiblement, tout en douceur. « J'étais à mon domicile. Seule. Avec un mal de tête assez spectaculaire. Les deux abrutis qui me servent de parents se sont rendus à une soirée dans l'Ouest ce soir là. Donc non, personne ne peut le confirmer, à part peut-être les femmes de chambre, les domestiques et le majordome. De toute façon, les gardiens m'auraient forcément vue si je m'étais absentée. » La vérité absolue, rien que la vérité. Elle avait vraiment souffert de cette migraine, et avait dû se résoudre à passer la journée clouée au lit.
La flic attendit qu'elle ait répondu, nota quelque chose sur son carnet en fronçant les sourcils - en plus, elle ne ressemblait à rien. Duh. Et enchaîna les questions.
Vos relations avec Jonathan Winson, bla bla bla.
Que de la merde.

« Winson n'était pas le gentil élève sans problèmes que tout le monde croit connaître. C'était un sale pervers obsédée par le sexe, l'argent et l'alcool. Ça vous étonne ? Je ne sais pas ce que les autres ont pu vous dire à son sujet - à mon sujet, car la rumeur affirme que l'on s'est disputés quelque jours avant sa mort. C'est vrai, je ne nie pas les faits. Il a essayé de me draguer, je l'ai repoussé, il a insisté et est devenu violent. » Elle fait une pause, histoire de faire monter le suspense, ce n'est pas vraiment drôle, sinon. « Je l'ai giflé. Il m'a agrippé par le bras et cette fois je l'ai griffé au visage. Ce n'était pas une dispute mais une agression. Après les cours, autour du 20 Octobre. Les témoins se trouvaient au moins à une bonne dizaine de mètres, et si je suis certaine qu'ils auront loupé les phrases vicieuses qu'il m'a glissé à l'oreille, ça m'étonnerai qu'ils aient manqué la baffe. D'où la rumeur. » Sourire satisfait. Elle n'a rien à se reprocher, pas vrai? « Quant à Calypso, c'est... je crois, un peu comme ma meilleure amie. On traîne tout le temps ensemble, on s'entend bien. Et si elle a effectivement tué ce pauvre niais, je vous souhaite de la chance pour trouver des preuves. Elle est intouchable. » Et moi aussi.

Allegra considère la flic avec désintérêt. Les questions ne riment à rien. Le tueur est sûrement un dealer, un toxico, un psychopathe attardé comme on en trouve à la pelle dans cette Académie de tarés.
Et si Calypso avait vraiment tué quelqu'un, Allegra aurait été au courant.

Non?