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[Flashback] Carcasses[PV]
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MessageSujet: [Flashback] Carcasses[PV] [Flashback] Carcasses[PV] Icon_minitime1Mer 11 Mar - 20:58

The sound of iron shocks is stuck in my head,
The thunder of the drums dictates
The rhythm of the falls the number of deaths
The rising of the heights ahead

C'est un enfer de pierre et de métal étalé à perte de vue.
Aux monstres épars de géants qui faisaient autrefois office de refuge pour des êtres humains se sont ajoutés des blocs de taule éparpillés, vieilles carcasses de véhicules abandonnés par leur propriétaire assassiné. Des poutres de fer hautes et oblongues tranchent les silhouettes massives de masses de pierre disséminées, au milieu d'un entassement de poussière opaque. Dans ce décor abandonné par l'humanité, de temps à autre seulement, une marque de civilisation pointe. Une bouteille d'alcool échouée, une seringue qu'il faut prendre soin d'éviter, une plaque de tôle posée entre deux murs fracassés pour faire office d'abris, même une paire d'yeux estomaqués de voir encore quelqu'un marcher ici, debout, seul. Une silhouette spectrale dans une chemise légère, avec pour se protéger les pieds rien d'autre que des pantoufles lacérées par son périple. Et si dans n'importe quel autre endroit, l'allure de cette créature malingre aurait de quoi surprendre, c'est seulement de la voir encore debout dont on saurait s'étonner ici. A vrai dire, elle sied presque à la perfection à se paysage mort, son corps épuisé déambulant au milieu d'une poussière si épaisse qu'elle pourrait faire office de brouillard perpétuel. Il faut reconnaître à cet être ridicule le mérite de marcher encore sur ses deux jambes.
Ou du moins l'aurait il fallu, quelques mètres plus loin.

Jane a dit bonsoir.
Elle s'en sortait bien, jusque là. Elle ne s'est pas blessée une seule fois en se faufilant entre géants de métal. Elle a enjambé deux alcooliques et trois toxicomanes sans les déranger dans leur sommeil. Et puis il y a eu ce type qui avançait jusqu'à elle. Elle a dit bonsoir. Un élan de panique, peut-être.

Son visage grince quand il frotte le béton et les gravats, agité par son corps secoué de spasmes inutiles. Le type est assis sur son dos à l'en écraser, il tient ses poignets et veut la retourner comme une crêpe. Il a posé son couteau près d'elle, qui l'encombrait plus qu'autre chose face à un être si maigre. Dans un jeu sadique, il relâche une main, parfois, au milieu de cette lutte endiablée pour l'une et si aisée pour l'autre, la regarde essayer de se saisir de la lame et manque de lui déboîter l'épaule quand il l'entrave à nouveau. Elle entend son rire au dessus d'elle, sent la chaleur de sa peau en étau autour de la sienne. Les jambes nues de Jane, qui battent l'air à la fréquence des cris qu'elle lâche, s'épuisent et s'écorchent sans le moindre impact sur sa défaite. Quelque chose fatigue déjà en elle, ses muscles trop sollicités après tant de mois d'inerties brûlent à s'ankyloser sous ses chairs. Et l'espace d'une seconde, Jane s'affaisse. Et l'un des cris s'étrangle dans sa gorge en un sanglot bref.
Victoire attendue mais trop facile de l'homme venu lui arracher dieu sait quoi et qui n'attendait qu'elle pour la retourner enfin, face à lui, le dos contre le sol.
Sans doute qu'il veut lire cette victoire sur son visage. Ou alors son ventre est plus confortable que son dos.

Mais Jane a abandonné la lame et s'est contentée d'un amas de poussière dure, tranchante, empoigné à pleine main pour la lui jeter au visage. Elle se dégage sitôt la prise relâchée, se retourne cherche à se ruer sur la lame, son seul espoir de salut qu'est l'arrogance de ce type à la lui avoir laissée à portée, au milieu de ce combat inégal. Elle est jetée contre un muret avant d'espérer l'atteindre.

Ses côtes frappent les bords rugueux et son corps s'écrase de l'autre côté, avec une violence qui la laisse sans souffle pour respirer. Dans sa chute quelque chose s'enfonce dans son bras et en lacère jusqu'aux chairs les plus profondes. Le corps qui a déjà poussé tant de cris s'exprime une dernière fois, en un gémissement bref, pâle reflets des vaines tentatives qui l'avaient animé pour survivre.

Haletante, Jane frotte son visage au sol. Elle sent l'air traverser faiblement sa cage thoracique meurtrie, repartir en arrière et revenir à son visage. Elle a l'impression de le sentir percer, cogner, enfoncer chacune de ses côtes, mutiler sa gorge à chaque inspiration. Et l'haleine que son souffle expire a déjà l'odeur cadavérique d'une mort lente et pitoyable. Le filet de sang qu'un coup de poing a fait jaillir de ses lèvres s'emmêle aux relents d'un jour et demi d'égouts, de marche dans les déjections d'une ville entière. Elle qui les pensait assez repoussantes pour dissuader les prédateurs de lui trouve des airs de proie intéressante. Sans doute que sa chair a l'air encore trop tendre en dessous de la crasse. Sans doute que dans cette tenue de mauvais augure mais si légère, si prompte à faire dépasser la peau, ses os sont appétissants ou encore, que sous la cascade crasseuse lui servant de cheveux, on voit de loin ses yeux clairs au milieu des géants de métal.
Alors quand un nouveau rire signe à ses oreilles son arrêt de mort, Jane ramène seulement le bras devant son visage, lâche et sans volonté à lutter en vain, seulement pour ne pas regarder la mort venir.

Et le plus doux bruit qu'elle ait jamais entendu résonne dans l'air étouffé par la poussière.

Tintement merveilleux, cristallin, semblable au chant d'une sirène en pleine tempête. Le cul d'une bouteille roule et s'en va presque de lui-même échouer contre sa paume. A son somment, le vert criard d'un tesson contondant porte le rouge et l'odeur du sang de Jane, récolté en y laissant dans son bras des débris épars. Un sang frais, qu'elle n'a pas mâché entre deux relents d'égout, une preuve presque caressante de vie au milieu des embruns morts. Et la main de Johnny-Jane se serre autour du morceau de verre. Elle se satisfait presque de le sentir déchirer sa paume. C'est une douleur réelle, vivace, plus tangible que toutes les sensations qui l'ont traversée ces derniers mois, comme une piqûre de rappel à sa condition d'être de chair. Et la douceur de ce verre caressant sa peau parmi les gravats abrupts et le fer rugueux des géants...

Le hurlement qui perce aussitôt le silence et conclut cette mise à mort n'est pas celui de Jane.

C'est aussi facile, aussi libérateur, que de craqueler le glaçage d'un gâteau pour en atteindre le centre avec, en son coeur, le coulis de fruits rouges. Johnny-Jane ignore la douleur dans ses côtes et bondit sur le corps qui s'est jeté en arrière pour s'écraser avec lui au sol. Elle enfonce et arrache le tesson de bouteille à tant de reprises que le verre lisse devient aussi rugueux que le reste, parsemé de chairs et de morceaux de cartilage épars. Et quand il devient si réduits en éclats de verre qu'elle ne peut plus le saisir à pleine mains, Jane referme sa paume meurtrie et déchire l'autre face en frappant à coups de poing les morceaux de bouteille et d'os que résument désormais le visage sous elle, en un cri devenu parfaitement animal. Elle frappe encore quand sa cage thoracique est réduite à une salve de sanglots atrocement douloureux, quand son souffle lui manque et qu'à entendre des craquements elle craint que ça ne soit ses phalanges qui soient entrain de se rompre.
Elle craint encore plus le réveil du prédateur.

Et les minutes passées en cette chorégraphie macabre la laissent enfin s'effondrer à nouveau au sol, tremblante, victorieuse et défaite. Jane ne parvient plus à savoir si elle espère s'être échappée de l'asile ou que tout ça soit seulement un mauvais rêve.

Elle trouve dans d'autres minutes la force de se relever et aller s'emparer du couteau échoué sur les premiers mètres de la scène de crime, méprisé par le géant qui se croyait intouchable. Si tout ça n'est pas un rêve et quand bien même ça le serait, il faut qu'elle aille au bout des choses. Que ce type ne soit pas mort juste pour qu'elle le rejoigne quelques mètres plus loin, qu'à défaut de raison il reste un fil conducteur au milieu du chaos. Jane est haletante de son ventre qui gronde, elle peine à ressentir autre chose que le goût du sang dans sa bouche et le souvenir des craquements contre ses doigts. Dans un effort incommensurable pour ne pas perdre pied, elle retourne vers le cadavre et s'empare de ses jambes, traîne son butin quelques mètres plus loin, entre un muret assez haut pour les cacher et une carcasse de voiture, comme un charognard irait jalousement dissimuler sa dernière prise. Elle s'accroupit près du corps et s'appuie sur le mur, le couteau serré contre son buste, à chercher la force de repartir, à devoir se convaincre une fois de plus qu'il faut repartir.

D'un geste, elle répand une traînée de sang sur son visage en chassant une poussière qui la démange. Un violent haut le coeur la secoue, qui ne rejette que de la bile dans sa gorge, le vide d'un estomac n'ayant pas mangé depuis plus d'un jour.

Trop tendre, Jenny.
Beaucoup trop tendre.

Les yeux de Johnny-Jane se baissent vers le visage réduit en bouille sous elle. Elle renifle les larmes qui ont décidé de couler sur son visage, passivement, épuisée qu'elle est devenue à devoir sangloter inutilement. Elle dévie le regard et le dépose sur ses mains ensanglantées, sur son bras où des morceaux de verre toujours enfoncés ont laissé des traînées noirâtres. Jane regarde son corps dénudé sous sa blouse d'hôpital grotesque, ses cuisses dont on devine la tendresse à travers la brume et la poussière, à des centaines de mètres. Ce n'est pas grave, si tu es trop tendre, elle songe entre deux absences. C'est seulement grave si on s'en rend compte.

Alors avant de voler au cadavre des vêtements dont il n'aura plus l'utilité, Jane plonge les mains dans la bouillie de son visage pour les recouvrir de sang, d'un camouflage suffisant pour dissimuler la tendresse qui se cache en dessous.
Parce que la seule chose qui importe, maintenant, c'est d'être allée au bout.

From the dawn of time to the end of days
I will have to run away
I want to feel the pain and the bitter taste
Of the blood on my lips again

Jason
Jason Lecter
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AVATAR : Heath Ledger - Joker

DC : Venecia

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Date d'inscription : 18/04/2012

CASIER JUDICIAIRE
ÂGE: Crise de la quarantaine ~
CAMP: Contre le Gouvernement
JE SUIS: un(e) new-yorkais(e) aux habitudes plus ou moins douteuses


MessageSujet: Re: [Flashback] Carcasses[PV] [Flashback] Carcasses[PV] Icon_minitime1Jeu 12 Mar - 7:34

" Main de Cendres "


You don't understand me,
and you probably never will
I got a tendency to self destruct,
and a soft spot for the filth
A hair trigger temperament,
a switchblade for a tongue
I'm a walking one-man genocide
with a black belt in corrupt


Ça gueule dans le coffre, ça enrage ça cogne. Devant ça soupire, ça crache une fumée grise du coin des lèvres. Ça roule des billes noires comme le goudron, ça donne un coup de frein et beugle un « Ferme ta putain de grande gueule ! » tellement mauvais qu'après plus rien ne répond. La gomme des pneus s'incruste dans le bitume sale, patine sur des couches d'huile qu'on a cessé de compter et la bagnole file à travers les Ruines. Les carcasses désossées d'immeubles jouent un bras de fer, penchées les unes sur les autres quand elles ne sont pas réduites en gravas, beaucoup de gravas. C'est gris, c'est fade, c'est carrément laid quand y'a pas la nuit pour en couvrir le squelette... Et des voitures -ou ce qu'il en reste- empilées là par centaines, fracassées ou non ça forme des lignes, ça fait un dédale traversé sans même un regard, sans même une grimace. Puis une place, entourée d'autres carcasses de métal où ronflent des moteurs de motos, leurs chauffeurs massifs sirotant une bière et en attendant d'autres. Pourtant ils s'arrêtent, se retournent sur ce qui vient comme on fait volte face pour un courant d'air désagréable. Le frisson passe, la bagnole se pose, l'inquiétude gagne.

La poussière vole, colle à ses jambes dés qu'il pose un pied dehors et se déplie comme on sort un pantin bizarre d'une vieille boite. Autour ils font deux ou trois fois son poids les bikers des ruines mais aucun ne bouge, ça pue l'embrouille. Monsieur ne se pointe jamais avant minuit, parce que la nuit c'est salement plus glauque ici alors là, vraiment ça sent le pourrit. C'est les ruines ; ça pue tout le temps... possible mais y'a que lui, juste lui pour laisser voler ce parfum là. Pourquoi ? Parce que le Clown sourit pas.
D’une main il tire la portière arrière, laisse descendre le molosse noir et un type s’amène, l’air pressé malgré une surcharge pondérale plus qu’évidente. Colosse de taille, le vieux motard de la vieille qui pourtant ralentit, tend lentement les doigts en direction du visiteur fardé et puis se contente d’attendre, sage comme le serait un gosse face au maître d’école. Oeillade morne, trop vide de celui qu’ils connaissent autant pour ses pitreries que pour ses vices. Si étrange cette fois. Néanmoins la poignée de mains a lieu, ferme et respectueuse parce qu’il faut ce qu’il faut. Là alors on se permet une expiration, on ose regarder ailleurs pour ceux que la conversation à venir ne concernera pas. « Sors moi le rat du coffre. » L’autre acquiesce, récupère sans attendre un bagage vivant et ficelé qu’il ne portera pas tant il le répugne. C’est par le dos de sa veste qu’il sera traîné. « Tu descends ? » Interroge le Biker. La flamme d’un briquet embrase une éternelle cigarette et Jason répond, la voix grinçante d’avoir trop fumé, trop hurlé, trop rit aussi. « J’aime pas les commerçants qui jouent sur deux tableaux. » Le gros hoche la tête, abandonne sa charge à la gueule d’une antre infâme, n’en franchissant même pas le seuil du bout du pied. « Au plaisir Boss. » Un regard en guise de salut, Lecter rend à la vermine le droit de marcher en le débarrassant de ses liens et sans ménagement lui assène une claque sèche à l’arrière du crâne. « Avance. » Et l’autre déchet à beau savoir, connaître ce qui se cache au cœur des ruines, en avoir vue les artères... il s’étrangle tout de même avec sa salive.

[...]

Les portes d’un ascenseur -auquel peu de monde accède- s’ouvrent sur l’ultime étage du sous sol et le Clown avance, suivit de sa victime du moment elle même talonnée par le chien. Le « marché » des Ruines ne tardera pas à ouvrir et les commerçants présents qu’on vous le dise ne sont pas ceux de votre épicerie locale. De celui proposant les enregistrements les plus dégueulasses à celui fournissant l’humain comme on fournit le bétail la liste est longue et la marchandise d’autant plus inimaginable. Nul regard pour ces gamines à peine pubères qu’on expose nues et menottées derrière un stand, pas d’avantage à l’étalage d’armes n’ayant jamais subi les vérifications d’usages, prototypes d’un nouveau genre, non Lecter sait où il va et n’est pas d’humeur à « faire les boutiques » ; loin de là. Ça se tait sur son passage, ça cherche à l’ignorer mais la curiosité les bouffe tous.

Le fond du gouffre, un black affalé dans un sofa en compagnie d’un pipe à crack. Lorsqu’il aperçoit le Clown par dessus ses lunettes de soleil -qui avouons le ne lui sont d’aucune utilité ici- il s’étrangle et tout en cognant régulièrement sa poitrine, balance sur un immense sourire doré à 24 carats. « Putain Man, j’ai cru à une putain d’hallucination qu’est ce que tu viens foutre ici ? C’est pas ton heure ça ! » Ses dreadlocks balancent des perles multicolores aux extrémités et la soie hors de prix de son costume ivoire ne bruisse même pas lorsqu’il arrive à la hauteur du balafré bras grands ouverts. Et ils resteront ouverts, l’homme recule même d’un pas à aviser le visage crayeux dont les yeux pourraient tout aussi bien s’être changés en mitraillettes. « Putain... y’a un problème Man ? » Le ton est soucieux, le black est homme d’affaire et ça pue pour les siennes si un de ses plus précieux clients tire une tronche pareille. Le « propio » du marché a bien des ennemis, mais celui-là… il en veut pour rien au monde.
Sans un mot, Lecter pointe le rat à sa suite qui s’est déjà plié à genoux, face contre terre. « Ton... rat raconte de drôles de choses... » Explique-t-il enfin, du sirop sur la langue. « ...Du genre ? » Le noir a levé un sourcil au dessus de ses yeux ambrés, semble gérer la discussion mais la façon dont il ne cesse de faire tourner la chevalière qui orne son majeur à l’aide de son pouce prouve bien que la tension monte.

« Les Italiens... parait qu’ils sont venus ici ? »

Silence. La faucheuse brandit la faux. Le marché a perdu son bruit de fond, des yeux se lèvent, des silhouettes se figent. Ils savent tous autant qu’ils sont que la pieuvre était bannie du Sud. Le temps d’un battement de cils et ni une ni deux, le Black bondit par dessus la corde tressée sensée délimiter la distance la plus raisonnable pour s’adresser à sa personne. D’un coup de pied il cueille le rat humain en plein menton et écrase sa maigre carcasse à nombreuses reprises sous ses talons. « Qu’est-ce ce que tu es allé faire pauvre merde ? Qu’est-ce que t’as foutu comme putain de bordel ? Saloperie de dégénéré ! »
Les cris et les suppliques avouent : pour du fric, pour des doses, pour un semblant de prestige. Le type a vendu Boogie aux Italiens, vendu une heure, une date, un jour qui aurait pu être banal mais sur lequel ils auront festoyé jusqu’à creuser leurs tombes à coups de dents... Lecter inspire, allume une cigarette d’un geste si sec que le Proprio arrête son lynchage pour revenir à sa hauteur non sans remettre un semblant d’ordre à son costume trois pièces. « Merde Man, j’ai rien su j’te promets ! On a toujours été réglo, je vais pas... » Jason oblige le rouge de son maquillage à sourire et achève d’un air cynique. « Risquer de perdre l’une de tes poules aux œufs d’or ? Non... Bien sûr que non c’est mauvais pour les... affaires hein ? » Le rire qui lui déchire la gorge est court, suffisant à lui seul pour alourdir l’atmosphère. « Je te crois. » Achève-t-il, un haussement d’épaule en prime. « Mais tu es responsable de tes... rats. Alors... » « Tout ce que tu voudras Man ! N’importe quoi ! » S’empresse d’ajouter le Proprio, mains levées. Le Clown ricane, lâche la cigarette et lorsqu’il plonge les yeux dans ceux de son interlocuteur, une sueur glacée dévale déjà sa colonne vertébrale. « File moi la lame la moins aiguisée et la plus rouillée du marché. Je vais... vous donner un cours. »

On dit qu’« Il est bien peu de monstres qui méritent la peur que nous en avons. »
Aujourd’hui celui-là les pétrifie...

[…]

I'm a jinx, a curse, some say, "the worst"
I'm a savage, rabid beast
I've been called so many fucking things,
it doesn't affect me in the least
I've stolen, lied, been crucified but I don't regret a thing
I'm an egocentric masochist with a sadist's point of bleak


L’antre souterraine ne vomira le Monstre que deux heures plus tard. Monstre qui ne repart pas, bifurque à travers les gravas et les ordures sans but, jusqu’à se jeter assis sur le capot d’une voiture. Clope aux lèvres il avise à peine ses mains rougies et crasseuses jusque sous les ongles, s’en moque autant que de ses fringues puant la mort. La cendre l’a enlacé, chère et maudite gorgone rongée de haine comme le sont d’autres par la lèpre. Vengeance au goût de « pas assez » malgré ce qu’il vient de faire, obligeant certains à détourner les yeux du spectacle alors qu’ils sont tous issus de la lie même de l’humanité. Prêts à vendre leur frère, leur mère pour une liasse bien garnie. A l’avant de la voiture le molosse dresse les oreilles, se dresse sur ses pattes et hume l’air. Quelque chose approche ou n’est pas loin. Jason s’en moque, siffle un coup pour calmer la bête et se perd dans la contemplation inutile de ses chaussures à la pointe desquelles il pense discerner un éclat d’os... à moins que ce soit un ongle ? Il s’en fout encore plus en fait. Le mal a été fait, la bête fulmine de rage encore et toujours, verrait n’importe qui affublé du mot traître, leur incrustant mentalement sur le front. La mafia chassée, reste-t-il d’autres ennemis ? Il grimace, il en a à ne plus savoir les compter...
C’est lentement qu’il quitte sa place, retourne flâner là entouré de ses cendres maléfiques qui profiteraient de la moindre occasion pour réclamer vengeance quitte à s’en prendre au premier venu. Cette chose le dévore, hors de contrôle et il n’a même pas envie de la remettre à sa place. Au repaire, il lui refusera l’entrée mais ici, là où les limites se fondent, où les natures se confondent jusqu’à la nausée puis l’inconscience qu’elle importance ? Tant pis pour le ou les malchanceux sur son passage ; qu’ils deviennent son défouloir.

Plus bas un corps s’active sur un autre, il tique à peine sur le fait mais bloque sur le genre. Une femme trop, bien trop peu vêtue pour être là. Perché sur un mont de caillasse il observe l’étrange manège qui défile sous ses yeux et il ne sait pour qu’elle foutue raison, ça l’intrigue. Est-ce la blouse ? Un cadavre dont le visage ne sera sans doute jamais reconnu ou bien juste ça, cette nana qui se « maquille » à l’hémoglobine.

« T’as de la chance qu’il fasse pas quarante degrés. » Jette-t-il de but en blanc, sans même savoir si elle entendra tout en expirant une volute grise. « Sinon les mouches seraient déjà en train de te bouffer. » Parce que toi non ? Demande une voix hilare sous son crâne.
Va savoir...

Everything I touch turns to ashes
Falls away, it falls away
Everything I touch turns to ashes
It slips right through my hands


*Ashes, Five Finger Death Punch

© Jason L.

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MessageSujet: Re: [Flashback] Carcasses[PV] [Flashback] Carcasses[PV] Icon_minitime1Jeu 12 Mar - 22:16

“ Monsters are real. They live inside us and sometimes, they win. ”
― Stephen King

Une voix interrompt la danse macabre, d'un chorégraphe sans doute mécontent de ce qu'il est entrain de voir.
Encore trop enfermée dans son combat intérieur pour en capter la substance des phrases,  Jane relève les yeux vers leur provenance. Et tombe nez à nez avec une vision tellement irréelle qu'elle la conforterait presque dans l'idée d'être dans un rêve. De ne jamais être vraiment sortie de son asile, ni de ses délires. Une vision si absurde, si loin de toute idée assimilable, qu'elle en dépasse même la capacité à surprendre. Qui, dans ce décor chaotique, s'impose à la vue comme une évidence et complète le tableau de l'horreur. Un corps dont le réalisme émane au milieu du reste, et qui plutôt que de vous laisser croire, ici, qu'il est anormal, vous fait plutôt penser que vous êtes le seul intrus à fouler le sol de son endroit.

Dans sa nudité, sa fatigue fragile et palpable, Jane adopte une posture défensive, menaçante. Sans aller vers l'offense d'une provocation orale, son corps est préparé au choc, en une attitude perceptible pour tout oeil capable de déceler autre chose que sa tenue risible et ses yeux clairs. Ses muscles sont bandés, sa main serrée autour de la lame, la pâleur de ses iris oscille dans une grisaille qui n'a plus rien à envier à la poussière qui la recouvre. Elle n'est pourtant pas suicidaire. Elle sait que la figure en face d'elle ne la fait ressembler à guère plus qu'un squelette, un corps de proie fragile et friable.

L'être niché au dessus de son refuge n'a rien à envier aux géants qui l'entourent. Il est une forme de métal et de pierre, une silhouette où l'on se casserait les mains sur du béton dur à tenter de le frapper. Cet être porte les cicatrices internes et externes de souffrances à côté desquelles les derniers jours, les dernières mois de Johnny-Jane ressemblent à un conte pour endormir les enfants le soir. Ce corps outrepasse l'humanité avec une audace proche de l'outrage, tant il charrie la violence par tonnes au sein d'une silhouette presque trop petite pour lui. Tout ce qui l'anime explose, dépasse et gerbe de son corps en coulées noirâtres autour de lui. Et au delà du sang sur ses mains, du cartilage collé à ses pieds, de ce camouflage dont il n'a tout bonnement plus besoin, il incarne la Menace pour toute chose grouillant sur son passage.

Et pourtant. Jane le contemple et ne cille pas. Avec cette posture de défense et ce corps prêt à répondre. Sa terreur ne pouvait pas être plus grande avant sa venue et elle ne saurait être plus dérisoire en cet instant. Parce si elle n'est pas suicidaire, si elle est une tendresse insultante dans ce monde de métal, Jenny est avant tout accrochée à la vie comme une tique à son hôte.
L'ombre d'un sourire passe sur son visage, réflexe surréaliste qui lui a pourtant valu la première attaque.

" Bonsoir. "

Sa voix est enrouée. Entre ses cordes vocales éructent toutes ces choses qui bouillonnent dans son ventre, ou toute autre part purement figurative de son corps. Ce pan incomplet et pourtant tangible de son être, aux désirs de bataille et de sang, plongé dans le désespoir hargneux de sentir quelque chose de tangible le heurter, une force réelle l'emporter vers des contrées où elle ne se sentirait plus un spectre au milieu des géants. Il y a dans la voix de Jane toute la lutte interne qu'elle mène contre ses propres démons, à côté desquels la pire des menaces ne saurait être effrayante. Ces choses grouillant dans son ventre, appelées pour survivre et dont elle tente pourtant désespérément de battre le rappel, pour ne pas assassiner tout ce en quoi elle a toujours cru.

Et dans la phrase de Jane, ce faible relent d'humanité, insipide acharnement à se camper dans des formules d'usage. Elle devient tous les autres qu'elle a rencontrés auparavant, ceux qui se réfugient derrière des signes intemporels de leur conscience. Tout le monde est étrangement poli, dans un hôpital psychiatrique. Infirmières, médecins, personnel passent leur temps dans des formules aimables, des bonjours et des mademoiselle. Une arme utilisée contre les fous, une supériorité imposée à leurs esprits trop embrouillés pour savoir comment y répondre. Condescendance absolue qu'est cette perpétuelle politesse, ce sourire rassurant et rassuré, de faire face à des êtres trop faibles pour comprendre les formules d'amabilité. Jane y répondait, à cette politesse. Systématiquement. Provocation absurde dans l'ordre hiérarchique de la santé mentale, elle disait bonjour, merci, monsieur, docteur. Parce que si leur façon d'employer des mots tendres comme des boucliers lui était insupportable, elle reconnaissait son propre besoin  d'humanité. Comme elle le reconnaît ce soir, dans cette confrontation animale avec un géant inhumain, après un meurtre bestial.  Jane a besoin de sa flamme, de son éclat de tendresse pour espérer encore.

C'est le chien qui la ramène à la réalité. Les yeux luisant sur son butin, il tend la truffe vers les relents du cadavre en un grognement envieux. Alors Jane retourne à sa tâche, elle se hâte de défaire la ceinture du cadavre et de lui ôter son pantalon, avant que la prise ne lui soit volée par un animal plus féroce qu'elle. Elle ne peut pas lutter contre ces bêtes, seules ou ensemble. Elle doit faire vite.

" Les mouches ou autre chose... " - Toi ? -  elle souffle enfin pour enchérir sur cet échange inespérément humain, les doigts affairés à arracher le corps au vêtement qui lui couvre les gens, fait de lui un âtre social. Et les yeux qu'elle relève enfin vers lui sont presque plus clairs, plus raisonnables. Plus enclins à laisser un espoir d'humanité dans ce chaos abominable. " Je préfère les mouches. Ca finira comme ça de toute façon. Non ? "

Jane se tortille et bat des jambes pour les rentrer dans le pantalon trop grand pour elles. Elle noue la ceinture autour de ses hanches à défaut de pouvoir la boucler utilement et entame de défaire le blouson du cadavre à son tour. Elle n'aime pas ce qu'elle fait - ne surtout pas croire qu'elle le prend à la légère. Ce qu'elle fait lui donne envie de vomir, envie de se recroqueviller contre un semblant de chaleur humaine pour dégager toutes les larmes qui ont pris la gorge, à défaut de son ventre investi par des forces plus sombres. Mais il faut qu'elle le fasse. Qu'importe son dégoût pour le pillage de cadavre ou la menace au dessus d'elle d'une mort imminente, il faut qu'elle suive son fil conducteur jusque là où il doit l'emmener. Si la mort gagne ce soir, il ne sera pas dit que ce sera parce qu'elle a abandonné.
Dans un mot d'excuse prononcé à voix basse pour cette silhouette infâme et onirique, Jane se retourne dos à elle. Elle se débarrasse enfin de la blouse légère et enfonce son torse dans le blouson volé au cadavre. Et le camouflage qui lui est vital, à elle et sa tendresse, se complète enfin.

" Vous ressemblez à une punition. A un mauvais signe. " Elle ajoute dans un murmure mais un murmure partageur, loin de l'égoïsme d'une réflexion intérieure. Elle ne savait pas qu'on pouvait inventer des drogues capables de vision si cauchemardesques. Elle ne pensait pas que ses tauliers, pour la punir d'avoir tenté de fuir, lui auraient infligé pareil voyage dans les limbes chimiques de leurs drogues. Parce que c'est finalement la seule raison logique à ces dernières heures, à ce décor apocalyptique et à cet être absurde. Leur caractère hallucinatoire.
Battante, Jane s'immobilise et abandonne sa douceur, un instant, le temps de gronder à l'adresse du vide, qui seul pourrait la trouver crédible dans son avertissement. " Mais je m'excuserai pas. " Et se fige dans un silence coupable, une soudaine rétractation. Ce n'est pas la faute de cet homme, après tout, si elle est en colère. Ce n'est pas sa faute si elle s'obstine dans sa démarche. " C'est pas contre vous. C'est juste que je préfère me faire bouffer dix fois ici plutôt que d'accepter que je suis toujours là-bas. " Dans un symbolisme parfait, Jane empoigne la blouse de son asile à deux mains pour en déchirer les coutures. Elle fait un voile grossier du vêtement, le dépose au dessus du corps en un drap funéraire, couvre pudiquement le visage qu'elle a ravagé. A son devoir d'humanité s'ajoute la satisfaction intense d'avoir au moins une victoire à son compteur, ce soir. La victoire sur les gens sains d'esprit. " C'est quand on se résigne que les mouches arrivent. "

La jeune fille se relève enfin. La douleur dans ses côtes et la fatigue dans ses jambes lui arrachent une grimace bien visible. Elle s'avance pourtant plus près du monstre, sans frayeur apparente, et pousse l'audace jusqu'à déposer son couteau sur le muret longeant leurs corps. Il n'a pas encore attaqué, après tout, et se terrifier de l'impact ne l'empêchera pas d'arriver s'il doit venir. Elle pourrait courir mais elle est épuisée et s'il ne la rattrape pas, le colosse qui l'accompagne le fera sans le moindre effort. Quant au couteau récemment gagné, il est assez proche d'elle pour qu'elle s'en empare en un geste, bien loin en revanche de la portée du bras de la créature. Si terrifiante soit elle, elle est encore limitée dans l'espace. Et Jane a besoin de ses deux mains.

Ses mains fouillent dans les poches de son butin et en arrachent successivement quelques menues prises. Un peu d'argent - pas assez pour acheter de l'aide et bien moins que ce qu'on gagnerait à ne pas l'aider. Une flasque qu'elle pose sur le mur dans une grimace, après s'être assurée que ce n'était pas de l'eau - elle est assoiffée. Et deux barres chocolatées. Après le tesson de bouteille, la vision la plus merveilleuse à laquelle elle ait assisté. Si elle a trouvé quelques gorgées d'eau saine qui suintaient entre les pierres des égouts, elle n'a rien mangé depuis sa fuite - ou du moins ce qu'elle espère être une fuite. Ses mains s'apprêtent à déchirer le papier pour en dévorer le contenu quand ses yeux s'arrêtent sur la silhouette près d'elle et la détaillent plus avant. L'hypothèse assez irréfutable que ce soit là juste une hallucination de son esprit malade se confronte à l'humanité qui transcende de cet être au caractère inhumain. Et en dessous de ce maquillage qui inspire la terreur, au dessus de ces mains couvertes de l'horreur qu'a vécu quelqu'un d'autre - elle aurait trouvé matière à le reprocher si elle ne venait pas de réduire un visage en bouillie elle-même, peut être - deux épaules frémissantes de violence et de lassitude. Alors, si affamée soit elle, Jane tend la deuxième barre à cet homme, parce qu'elle n'a pas grand chose de plus à lui offrir à part quelques billets grossiers et des débris de verre.

" Vous avez l'air contrarié. " elle souffle, dans un papillonnement de cils ne portant que trop d'intérêt à ce qui ne devrait pas en susciter.  " Vous voulez venir avec moi ? Il faut juste que je mette des chaussures et que je me nettoie un peu. "

La manche relevée d'un blouson laisse apparaître les débris de verre enfoncés dans son bras, dont elle arrache le plus gros d'un geste au dégoût spastique.

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MessageSujet: Re: [Flashback] Carcasses[PV] [Flashback] Carcasses[PV] Icon_minitime1Ven 13 Mar - 6:50

" Main de Cendres "


Bonsoir... Bonsoir ?

La clope dans sa bouche y demeure un temps d’arrêt, main suspendue et sourcil arqué à ce seul mot qui n’a rien à faire là. Elle a rien à faire là non plus, remarque. Ça cadre pas, ça laisse une impression bizarre. Machinalement il se gratte l’arrière du crâne, perplexe. C’est elle qui est bizarre. Ah parce que tu te crois modèle de normalité ? Ça sûrement pas, mais lui au moins, il choque pas là dedans. Et puis la voilà qui déshabille un mort, vite comme si la pauvrette craignait qu’on le fasse avant elle pour une raison plus obscure que ces mares étalées de ci de là dans le béton défoncé.

« Ouais, ça finira comme ça... » Des mouches à viande grosses comme l’ongle d’un pouce Cubain et des cadavres puants. Il connaît, entretient son charnier et a vu plus d’une fois ses victimes camouflées desdits insectes comme d’une seconde peau. Ça bourdonne dans sa tête de songer aux mafieux bouffés par tant de vers, rongés jusqu’à l’os, imaginer leurs yeux vitreux qui ne voient plus, leur bouche grande ouverte sur un dernier cri... Tout à la pensée de cet hideux mais rassurant spectacle il en a oublié la cigarette qui lui a brûlé les doigts en se consumant, s’est éteinte et même les gestes de l’inconnue semblent lointains. Second plan, le Clown erre on ne sait où.

… un mauvais signe. La bête relève la tête, toise depuis son perchoir la frêle donzelle sans même un soupçon d’animosité. Regard noir où rien ne brille pas même l’éclat fugitif d’une arrière pensée. Vide, il se sent vide et rien ne le remplit sinon la haine qui va et vient. Lecter ne fait plus que ça, haïr jusqu’à la migraine, il les maudit, tous, tous autant qu’ils sont. Mauvais signe, carton d’invitation mortuaire qui n’appelle pas la belle en noir autrement qu’en ligne direct. Tue et tue jusqu’à ne plus les voir, les reconnaître, il veut carboniser le monde entier. C’est pas contre vous... il comprend. Y’a des jours comme ça où il tue sans raison, par parce qu’il a une dent ou plusieurs sur un tiers. Juste parce que ça va pas, parce qu’il a le blues, parce qu’il se fait chier. Mais non, c’est pas quand on se résigne et ça, il le sait mieux que trop d’autres. Mais il hausse les épaules, cale les mains au fond de ses poches sans partir, observant et ce toujours sans raison la jeune femme.  

Il a sifflé le chien revenu à ses pieds, suit les gestes comme on va au théâtre se rassasier d’une comédie sans queue ni tête où le scénario ne vaut pas deux dollars. Ce n’est plus l’ennui qui peint le blanc de ses traits, il ne sait plus, ne veut même pas savoir. L’envie de la tuer elle ou un autre a foutu le camp et une lassitude morose se crêpe le chignon avec une folle furieuse grise hurlant à travers ses neurones dézingués qu’il devrait seulement la massacrer pour la forme. Ça piaille dans sa caboche comme des poules chassées par un renard et ça lui file la nausée. Besoin de gin et vite, il faudrait... Du chocolat ?
Ses cils battent à trois reprises avant de comprendre qu’on s’est adressé à lui, qu’on le dévisage (peut-être ?) et qu’on lui tend de la bouffe en barre. Contrarié ? Pauvre gosse, si tu savais... « … Merci. » Merci ? MERCI ? À reculons il prend conscience d’avoir déjà à moitié déballé ce truc, lorgne dessus en ne sachant pas quoi en faire. Mais qu’est-ce que tu fous par tous les diables ? Une grimace tord ses lèvres balafrées, le Clown inspire, expire et secouant la tête s’en retourne près de la fille pour lui rendre un casse croûte qu’elle n’aura pas volé... enfin pas tant que ça. Un soupir lourd à la bouche, non ça ne va pas. Le vent chavire ses cheveux verts maculés, la poussière pique les yeux mais il commence à voir clair ; enfin. Rien ne va, mais il n’a que trop tuer pour savoir en rire une fois supplémentaire. Trop de morts tue les morts... ce n’est plus drôle.

« Viens. » Lâche-t-il au terme d’un silence. « Essaie même pas de te soigner ici tu choperais une saloperie à coup sûr. » Et plutôt deux fois qu’une. Les Ruines et l’hygiène font deux minimum ; tout le monde le sait et si elle pas, c’est qu’elle n’est pas du coin. Une goutte d’eau ici aura le goût d’essence... si ce n’est pas autre chose de carrément moins catholique. Nouvelle cigarette, Lecter se remet en marche et retrouve sans mal sa voiture malgré les monceaux de carcasses. Au chien il ouvre la portière et lui laisse la banquette arrière avant de rejoindre le siège conducteur. Vitre baissée, un bras sur le rebord il dévisage l’inconnue et attend simplement. Un peu jusqu’à lancer un simple « Monte, j’ai besoin d’un verre. T’auras ce que tu cherches là-bas. Un burger aussi si t’as la dalle...»
Ce n’est pas de l’aide, Jason n’aide pas. Il ne sait pas aider. Pour autant il ne se voyait pas la laisser en plan. Pas qu’elle l’intéresse, non mais aussi étrange que ça puisse paraître... elle a l’air aussi paumée que lui et si par principe ce n’est pas du tout son problème ; qu’il n’en a rien à faire... et bien c’est juste foutrement plus simple comme ça. Les dingues et les paumés... ne dit-on pas ?


© Jason L.

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MessageSujet: Re: [Flashback] Carcasses[PV] [Flashback] Carcasses[PV] Icon_minitime1Dim 15 Mar - 19:13

« Ce sont des loups frileux aux bras d'une autre mort
Piétinant dans la boue les dernières fleurs du mal
Ils ont cru s'enivrer des chants de maldoror
Et maintenant ils s'écroulent dans leur ombre animale. »



Jane accuse son échec dans une moue légèrement déçue, même teintée d'une tristesse bêtement improbable. On ne peut pas dire qu'elle ait été d'une grande utilité à sa contrariété. Elle a même l'impression que c'est encore pire, maintenant qu'elle en a parlé.

La raison voudrait qu'elle ne s'en soucie pas outre mesure. Mais elle a abandonné la raison des centaines de mètres plus loin, au fond des égouts, quand elle a compris que ça lui demanderait beaucoup plus d'énergie que ça ne lui serait utile. Et à l'heure qu'il est, Jane n'a pas seulement besoin de faire survivre son corps à travers cet enfer, elle doit aussi la survie à ce qu'il reste d'humain en elle. Ce n'est pas le moment de s'inquiéter pour un homme qui a les mains couvertes de sang, des cicatrices terrifiantes sur la figure et un monstre à ses côtés. Mais sa situation à elle est tellement désespérée, si celle de cette créature qui n'existe peut-être d'ailleurs que dans son esprit malade et épuisé peut s'arranger, ce sera assez de satisfaction pour trouver le courage de continuer. Elle a besoin que quelque chose de bien arrive. Un réconfort calorifère dans ce désert où la solitude lui glace les os. Même si ce n'est pas quelque chose de bon pour la bonne personne, elle prend tout, n'importe quoi pourvu que quelqu'un lui trouve un semblant d'envie à traîner sa carcasse un peu plus loin.

Elle récupère son cadeau sitôt déballé qu'il fut rendu, les yeux baissés sur cette nourriture qui fait hurler son ventre de famine. Elle se retient, pourtant, de le dévorer avant d'être bien certaine qu'il n'en veut pas. On ne se rue pas sur quelque chose qu'on vient d'offrir, c'est hypocrite.
Viens. Dans un papillonnement de cils alourdi par la poussière qui s'est collée avec le sang autour de ses yeux, Jane le regarde qui s'éloigne déjà. Elle récupère ses affaires à la hâte et trottine pour le suivre. Un instant, elle est tentée de lui dire qu'elle doit trouver une épicerie et ne sait pas du tout par où commencer mais elle se ravise en baissant les yeux sur son bras, où une poussière chargée de gangrène se mêle déjà à l'hémoglobine pour colmater tous les trous qu'elle trouve. C'est douloureux. Et elle est épuisée. Elle n'arrivera pas à marcher beaucoup plus longtemps sans avoir au moins bu un peu d'eau. Son état de déshydratation est tel que ses oreilles en bourdonnent et ses yeux discernent seulement de vagues formes jusqu'à ce qu'elle s'approche assez pour voir autre chose. Alors à défaut d'eau, Jane porte au moins la barre de chocolat à sa bouche et mâche longuement la chaleur sucraillée qui se développe entre ses dents, s'y agglutine, faute de salive pour la digérer. En relevant les yeux, elle le voit qui s'installe derrière le volant d'une voiture.

La terreur qu'elle ressent à l'idée de se séparer de lui est à la masure du réconfort répandu par le chocolat contre sans langue.

Monte. Jane trouve la force d'esquisser un sourire reconnaissant et contourne la voiture pour s'installer à côté de lui. Elle enfouit ses mains sales dans les manches de son blouson volé pour ne pas salir l'habitacle et boucle sa ceinture. Fouille dans sa poche et pose la flasque qu'elle y trouve sur la boîte à gants, avec de l'alcool dedans, qu'elle a gardée au cas où ça intéresserait quelqu'un, pour qu'il la prenne.

" J'y avais pas pensé. Mais je sais pas si c'est bon. " elle précise quand même en toute honnêteté, n'ayant d'alcool sur la langue qu'une seule fois il y a une éternité, suffisant à la dissuader d'en reprendre un jour.
Ca ne l'est sans doute pas, du reste. Sans vouloir se lancer dans des jugements hâtifs, le type qui l'a agressée n'avait pas l'air de très bon goût.

Elle s'arrache un sourire fatigué quand la voiture démarre, les yeux posés sur le visage à côté d'elle, auquel ils ont du mal à s'accommoder. Son regard glisse un instant sur les cicatrices et se tourne finalement vers la fenêtre avec pudeur, de peur de paraître trop intrusive. Elle a tendance à vouloir se jeter sur tout ce qui passe pour le dévorer, parfois. Sans méchanceté, par simple curiosité, mais avec une certaine violence. Et on n'embête pas quelqu'un qui a ses problèmes par simple curiosité. D'autant que, elle songe une seconde, les yeux rivés sur les étendues de poussière et de métal, elle devrait sans doute se méfier un peu plus.
Peut-être.
... A quoi bon. N'importe quel individu dehors ou presque serait capable de la bouffer toute crue si l'envie lui en prenait. Lui y compris, bien sûr. Mais il lui fait moins peur que ce qu'il y a dehors. Lui il lui parle, il la regarde, il l'emmène. Il la voit au delà de la violence arbitraire que suppose l'endroit où ils se trouvent, en tout cas pour l'instant. Et même si ce n'est que pour l'instant, c'est plus que ce dont il y avait à espérer de cet endroit. Il n'y a rien qui l'oblige à la voir, elle, au milieu de tout le reste. La moindre des choses c'est de le voir en retour. Il sera toujours temps de s'adapter si la violence qui sonne comme une obligation partout autour rattrape ce geste qui n'aurait même pas dû être à la base.

Tassée à bouger le moins possible pour ne rien salir, Jane ouvre la deuxième barre de chocolat. Les yeux baissés sur sa tâche, elle s'aperçoit qu'elle n'a même pas mis les chaussures et traîne encore les savates de l'hôpital. Elle bloque les jambes pour ne pas mettre de poussière en bas non plus.

" Y a pas de chocolat, dans les asiles. C'est pour les désintoxications, à cause des endorphines. Et puis ça excite les pensionnaires. " Dans une grimace de dégoût, elle hausse les épaules et reporte à nouveau son regard sur le paysage, mâche et avale avec un délice que même son épuisement ne saurait entacher. " On a droit aux cigarettes, par contre. Enfin on avait. Je crois. "

Dire tout ça n'est sans doute pas assez substantiel pour changer les idées de ce clown terrifiant et triste. Il lui fait penser aux marins avec lequel elle est partie pour l'Amérique du Sud, dans les moments où sa maladie devenait trop douloureuse. Il restait immobile, à contempler le vide, en attendant que ça passe. Il ne disait jamais rien, il n'y avait que son visage pour se tordre imperceptiblement de sa lutte contre la douleur, les muscles contractés à lui résister. Comme si le mal était trop grand pour le verbaliser, qu'en parler ne ferait que l'épuiser pour rien, ne soulagerait rien. Dans ces moments aussi, Jane se sentait parfaitement inutile. Et dans ces moments non plus, elle n'avait pas l'impression que parler d'autre chose était d'un véritable secours. Mais parler du mal lui-même aurait été encore plus grossier. On ne parle pas de ce qu'on ne peut pas envisager.

Il y a beaucoup de silhouettes dehors, croisées en chemin. L'une d'elle manque de se jeter sous les roues alors qu'elle déambule, hagarde, si absente qu'elle ne se rend probablement plus compte du monde autour. On peut reconnaître les toxicomanes à leur maigreur, comme s'ils étaient affamés de leur prochain shoot, les criminels à leur regard, des cadavres de civilisation humaine. Beaucoup de balles et de douilles, quand on y regarde bien. Jane contemple la désolation humaine avec un certain effarement. Jusqu'à se sentir triste, à son tour, tout à coup. Triste, et terriblement seule. Une partie d'elle pourrait pleurer pour le sort de chaque spectre que la voiture croise et c'est une lutte permanente contre elle-même que de se souvenir que chacun d'entre eux la dévorera au moindre signe de faiblesse. La faim et la fatigue l'empêchent de se souvenir pourquoi elle est venue là, pour commencer. Pourquoi elle s'est enfuie, ou a essayé de le faire, maintenant que la moindre inspiration lui demande une énergie colossale, et l'idée de la prochaine encore d'avantage de forces.

Dans le rétroviseur, elle aperçoit le colosse qui halète l'air de l'habitacle, qui n'est pas saturé de poussière. Cet animal semble totalement hermétique au monde qui l'entoure. Heureux de vivre dans son agressivité latente et perceptible. Dans un élan de jalousie, Jane serre les dents et s'en retourne à sa fenêtre.

" Vous le mangerez avec moi ? " elle demande quand le véhicule s'arrête, le regard tourné vers l'autre, tâchant de masquer son inquiétude dans une nonchalance un peu bancale - à commencer par l'inadéquation totale entre la nonchalance et cet endroit. " ... Je connais pas grand monde, ici. " Doux euphémisme. Mais elle ne veut pas paraître insistante - désespérée. " Enfin, je veux pas m'imposer. "

Elle a échappé au départ près du petit muret et à celui de la voiture. Mais il a probablement envie de le boire tranquillement, son verre. Ou en tout cas de faire autre chose que de s'encombrer d'une fille perdue dans les vêtements d'un type dont elle vient de réduire le visage en bouillie.
Jane aperçoit un groupe agglutiné un peu plus loin quand elle descend de la voiture. Sitôt qu'ils la voient, l'un deux se détache sur cercle et progresse comme une coulée vers elle, une extension du corps inhumain formé par les autres. Sitôt qu'il aperçoit la silhouette qui l'accompagne, il se fige, esquisse un pas de recul dans une grimace de terreur. Dans un réflexe de survie animal et totalement paradoxal, Jane fait un écart vers le clown. Elle se retient de lui agripper la manche.

Ses yeux se baissent vers leurs mains, couvertes du même sang, de la même poussière, des mêmes usures. Mais ses marques de guerre à elle, même avec tout le camouflage du monde, n'ont vraiment pas le même impact que celle du géant de métal à côté d'elle.

Jason
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MessageSujet: Re: [Flashback] Carcasses[PV] [Flashback] Carcasses[PV] Icon_minitime1Mar 24 Mar - 8:22

" Main de Cendres "


On s'achète, on se vend
Au vent des hémisphères,
On se jette, on se prend
Contre un peu d'éphémère,
Sur l'étoile d'argent le cerveau ou la chair
Faudra choisir un camp L'obscur ou la lumière,
L'obscur ou la lumière...


Gris, noir, il a choisi depuis longtemps déjà une route plus sombre qu’une rue Londonienne à ses sales époques. Préférant les coupes gorges aux chemins pavés de galets blancs, aux bordures bien taillés Jason arpente les ronces et s’est écorché par trop d’occasions à leurs épines, parce que vivre ne se conjugue pas autrement qu’avec le verbe souffrir. Masochiste de la première heure il devait être brisé pour apprendre à mieux détruire les autres et leur monde. Devenu sadique en puissance qui ne versera aucune larme sur sa propre carcasse quand viendront les adieux.
Dans la voiture qui défile pour une fois à allure raisonnable il garde le regard fixe sur le bitume comme une langue déroulée vers une autre gueule qui ne le bouffera pas. Propulsé Monstre au delà des monstres il a perdu le peu qu’il reste encore à d’autres et qui fait toute la différence à ce jour : des limites. Voilà trop d’années qu’il les a détruites, pulvérisées et balayé aux quatre vents comme on jette les cendres froides d’un cendrier. Mais le Monstre a ses humeurs, c’est là tout le problème. Monsieur ne supporte pas tout et le prétendre radical serait encore trop juste dans son cas. Pour autant le voici, accompagné de cette gamine et on ne demandera pas pourquoi ; parce qu’il n’y a rien à comprendre lorsqu’il agit.
Il veut il prend, c’est de coutume.

« Je m’en souviendrai si un jour on arrive à me passer la camisole. » Le doux rêve de New York encore persuadée qu’elle saura le mettre en boite une bonne fois pour toute. C’est impossible ; mais ils croient encore... bande d’imbéciles. Jason préférerait encore s’exploser lui même la tête plutôt que de leur laisser cette joie aussi infime soit-elle. Alors il sourit pour lui, de coin tant l’idée paraît stupide. Tellement stupide.
Elle lui parle, il n’écoute qu’à moitié et ce n’est pas plus sa faute que le sienne. La tête du Clown est saturée d’un brouillard cendreux et les visages mafieux se superposent à tout. Le moindre objet, la moindre couleur ravive en lui le souvenir trop récent d’une nuit ragoutante où il manqua de perdre l’unique présence en ce monde capable de le suivre. C’était trop... trop de tout pour tout.
Le moteur se tait et il descend, prenant conscience du rapprochement de la jeune femme à reculons, un sourcil froncé pour se demander ce qu’il lui prend. Plus loin un groupe reformé, le toise de biais mais préfère rapidement se concentrer sur les godasses volées à leurs pieds. Il claque la langue, lève les yeux au ciel puis hausse les épaules. Bande de petits cons pas maîtres de leurs hormones ; ils les tueraient bien pour la forme.  Le molosse descend, collé à sa jambe tel une ombre dangereuse car c’est ainsi. On voit rarement le Monstre sans sa meute, et jamais sans le chien de tête à moins qu’il soit persuadé d’en venir réellement aux mains. Tous connaissent l’animal et pas un au Sud ne serait assez suicidaire pour seulement lui ordonner de dégager.

D’un mouvement de tête Lecter invite (ou ordonne) à la fille de le suivre jusqu’à un bar. L’enseigne passée d’age indique le « Lavoir ». Bien connu des ruines et point de chute favori des motards dont les bécanes s’alignent en rang le long de la devanture. Ancienne laverie automatique, le lieu est clairement ancien mais  ne souffre aucunement d’un manque d’hygiène quelconque. Ici, on essuie ses godasses pour entrer parce que la patronne l’a décidé. D’emblée les têtes se lèvent, toisent et se détournent tout aussi vite. Un parfum de cigarette dans l’air, un relent de cuir, un parfum bon marché en fond émanant des quelques prostituées collées à un radiateur en fonte.
D’un seul geste vague Lecter libère sa bête de ses obligations et le chien trottine jusqu’au fond sans se faire prier tandis que son maître choisi un tabouret au bar et s’y pose. « Betty ! » Hèle-t-il sans plus d’animosité que de sympathie, sans même une oeillade pour l’interpellée et déjà la fille arrive derrière le comptoir, cendrier et verre de gin en main qu’elle dépose comme par habitude devant lui. « Salut, il vous faut quoi ? » Assit, il allume une cigarette et désigne la rescapée des ruines. « Trouves lui des fringues à sa taille. » Le temps de regarder l’inconnue de la tête aux pieds et la fille repart comme elle est venue. Verre au bout des doigts, Lecter en avale une gorgée et abandonne sa veste sur le siège libre à sa droite, laissant celui à sa gauche pour son invitée du moment. « Fais toi plaisir, bois et mange ça te fera vraiment pas de mal. Quelqu’un va s’occuper de ça... » Il montre son bras blessé, cale son dos contre le dossier et déboutonne ses manches pour les rouler jusqu’au coudes. Des bleus, des cicatrices, des stigmates qu’il ne compte pas et ne comptera plus car trop nombreux seulement là, et il se lève, passe derrière le bar pour se laver les mains et à peine les doigts séchés il claque sa paume sur la sonnette du comptoir. Tournée générale, c’est comme ça lorsqu’on entre dans le bar et même lui ne déroge pas aux règles. Le Clown a le respect en haute estime et  lorsqu’on lui en manifeste un tant soit peu il sait faire la part des choses.

« Nom de dieu tu veux me vider le bar avec tes tournées hein ? » Une voix tonne, mi reproche mi camarade et la patronne déboule sans grâce, dégaine de camionneuse et le mètre quatre vingt dix passé. Sans délicatesse elle lui jette une claque dans le dos sur laquelle Jason s’étrangle avec une bouffée de sa cigarette et il secoue la tête. « Tu veux me... tuer plus vite que les flics ou quoi Bertha ? » Se plaint-il, grimaçant. L’autre part d’un éclat de rire, toise la demoiselle à gauche. « Tu les prends dans les ruines maintenant ? Connard va. » Lecter roule des yeux, tire une nouvelle taffe et rétorque. « Comme si. Tu peux jeter un œil à son bras et nous faire à bouffer ? J’suis un zombie là, me faut un ptit déj. » Bertha pouffe, saisit le bras cité et acquiesce simplement. « J’lance Pablo en cuisine et je vais chercher de quoi arranger ça. Et tu me règles tes ardoises après sale gosse ! » Et ça lui tire l’oreille, il grogne et se dégage vivement provoquant un unique regard intrigué de l’imposante bonne femme. Regard rendu, c’est pas le quart d’heure de jouer et c’est assez rare pour que Bertha percute. Un Clown pas d’humeur à plaisanter c’est pas bon et elle le connaît assez pour comprendre que dans la tête de celui-là, c’est un bordel sans nom. Alors elle soupire, lui tapote l’épaule et s’en va à la recherche du nécessaire de soin.

Non il n’a pas envie de déconner, pas maintenant, parce qu’il a eu des journées de merde, que le secouer est la dernière chose à faire et que l’approcher est un luxe actuellement. Il voudrait buter n’importe qui, n’importe quoi d’un tant soit peu dérangeant. Ses mains tremblent et ni le gin ni les clopes ne suffisent. Une bouteille est ajoutée sur le plateau, il se ressert déjà et ses yeux brûlants d’une fièvre nerveuse voient flou de trop longues secondes. Ça pèse lourd sur ses épaules et les bras gris qui le ceinturent semblent s’étendre jusqu’aux clients autour. On a beau le craindre, on déteste le voir comme ça.
C’est pas Jason, c’est pas normal s’il rit pas.
La petite Betty revient les bras chargés, n’ouvrira pas la bouche tant qu’il ne la regardera pas et comme une enfant sage elle attend. Sans qu’il la voit, presque trois minutes sans bouger un cil, verre suspendu devant ses lèvres. Quand enfin il réalise Lecter boit à nouveau et croise les yeux immenses de sa protégée du moment. « Y’a des douches derrière, vas-y et change-toi. T’as le temps, alors te presse pas. » Les filles ça aime bien s’arranger un peu logiquement, logiquement... Pas de charité, on le dira. Toujours pas d’aide mais un principe. L’habit fait le moine dans son univers c’est incontournable et ses propres hommes sont toujours rhabillés à leur arrivée. En dévalisant tel ou tel commerce sous son ordre certes mais il le fait ; c’est comme ça. « Betty va te montrer où c’est. » Et ladite Betty s’exécute.

Seul, Lecter extirpe son téléphone de sa poche arrière et pianote sur le clavier d’un air absent. Un message au Cubain, rapidement rendu. Une question, un « il dort, je suis allé. » pour toute réponse. Un soupir file, à peine rassuré ; il ne peut pas l’être réellement. Et un nouveau verre se vide, puis un autre... ça tourne, ça tangue, mal de mer sur le plancher. Bertha, revenue derrière le bar allume un cigarillo et le contemple un temps avant de le resservir elle même. « Sale semaine It ? » It, comme le Clown du film, il tente un sourire que ses balafres allongent à peine. « On va dire ça... »
Elle hoche la tête, il boit, c’est juste comme ça...  


© Jason L.

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MessageSujet: Re: [Flashback] Carcasses[PV] [Flashback] Carcasses[PV] Icon_minitime1Mer 25 Mar - 22:18

On a crevé les yeux de nos poupées
tué les cow-boys et les indiens plumés
Une histoire avant d'aller se coucher et puis
On éteint

Jenny essuie machinalement ses chaussures, mimétisme automatique de la créature qui la précède et pénètre dans l'enceinte, abrutie par le capharnaüm qui la prend au visage, tout à coup. Il y a pourtant peu de monde, en tout cas ce n'est pas plein. Mais c'est déjà plus qu'elle ne pensait avoir à en supporter. La lumière pleine après les petites ruelles sombres  l'aveugle et la danse des corps autour d'elle après la solitude l'oppresse. Ca fait deux jours qu'elle n'a croisé que des rats et de trop rares silhouettes, inertes au sol pour la plupart, des mois qu'elle n'a pas assisté à des conversations acceptables pour la compréhension humaine. Tout ce roulement autour d'elle, ces conversations, le tintement des verres et les bruits autour sont comme une explosion dans sa boîte crânienne, déjà à moitié vidée par les oreilles de sa substance, déversée sur le chemin qu'elle a parcouru. Bloquant ses poumons pour ne pas respirer un air devenu trop propre, elle trottine derrière la seule chevelure reconnaissable entre toutes comme une automate et s'assoit à ses côtés, la mâchoire serrée, les yeux rivés devant elle. Elle ne veut pas lui faire subir cette claustrophobie soudaine, lui qui a l'air déjà trop préoccupé, et a admis sa présence malgré ses préoccupations.

Ca passera, de toute façon. Ca passe toujours. Enfin.
La plupart du temps.

" Merci. "

Un murmure blanc susurré entre ses dents closes, réponse pas moins automatique que le reste à son offre, dans le dernier arc réflexe trop ancré pour être altéré de sa politesse. Dans un frisson brutal, elle se rappelle où elle est et se force à tourner les yeux vers lui pour s'arracher un sourire, accrochée à ce qui transperce d'humain dans cet échange comme une tique malade irait chercher du sang dans le vain espoir d'esquiver la mort. Mais il ne regarde pas, de toute façon. Lui aussi a les yeux fixé sur un vide intime et imperméable. Dans un mouvement d'humeur, Jenny remue un peu sur sa chaise, et se demande bien pourquoi elle continue à essayer.
Une femme arrive au milieu de la masse, plus bruyante, plus imposante que les autres - trop pour être ignorée. Elle s'adresse à son accompagnateur, semble le connaître, intimement. Et la jalousie pointe dans le coeur de Jane, l'espace d'un instant, de se voir ainsi voler une vedette déjà trop éphémère. La crainte, aussi, d'être esquivée de cette place précieuse sans laquelle elle ne compte plus survivre bien longtemps. D'un oeil animal, elle voit l'autre bande rentrer dans l'enceinte du bar, menée par celui qui a cherché à l'approché, qui lui décoche un sourire, un sourire qu'elle connaît trop bien. Jane se tend, les muscles bandés, la main serrée autour de son couteau, toujours enfoncée dans sa poche. Moment que quelqu'un choisit pour lui saisir l'autre bras.

C'est un électrochoc suffisant pour achever les quelques cellules nerveuses qui agonisaient au sein de son crâne, et en connecter d'autres. Le corps rigide, statufié, Johnny-Jane braque un regard écarquillé sur l'auteure du crime, que ne cachent que trop ses cheveux crasseux collés sur son visage. Tout le bruit alentour se résume à un bourdonnement assourdissant à ses oreilles et l'espace d'un instant infime, du centième de seconde que prendrait son mouvement, elle se voit saisir le verre à portée et l'enfoncer dans le visage ridé qui lui fait face. C'est la douleur dans son bras qui l'empêche de basculer, et elle bloque son soupir de soulagement quand on la lâche enfin, quand le bourdonnement redevient un capharnaüm de conversations. Haletant en silence, elle laisse cet animal grossier s'en retourner à l'homme à côté d'elle, plus intéressant qu'elle, et braque son regard sur le comptoir, entre deux rainures. Un sourire menace de tordre ses lèvres quand elle entend la femme se faire repousser à son tour. Mais encore de bonne volonté à bien faire les choses, Jane retient le ricanement de satisfaction malsaine qui lui tord la gorge. Ce n'est pas faute de ressentir, pour l'instant, une parfaite antipathie envers cette grosse dame. Elle ne l'a pas autorisée à la toucher. Ce ne sont pas des manières. Encore, si elle lui avait parlé avant, au lieu de la surprendre...
Son crâne va exploser.

La lumière, tout au fond du couloir
Maman veille, papa qui rentre tard
Paraît que cela se voit pas qu'on pleure dans le noir
On éteint

Et les minutes passent. Le Clown boit et la fillette reste inerte, en attendant un signe de sa part. Son ventre crie famine mais rien n'est prêt, sa bouche est un tas de poussière informe mais elle ne se voit pas sortir ses mains crasseuses sur le comptoir. Elle a bien entendu l'invitation. Seulement elle déploie toutes son énergie à ne pas se jeter sur quelque chose, ne pas sortir le hurlement violent qui lui broie le ventre. Alors passer derrière le comptoir, se confronter à cette grosse femme, être obligée de regarder ses toutes petites mains couvertes de sang pour les laver, c'est au dessus de ses forces.
Alors le Clown boit et la fillette attend. Elle serre les dents, brièvement. Quand enfin, il lui semble apercevoir un signe, elle tourne vivement le visage vers lui, plonge dans le néant de son regard, cette mer d'encre comme ultime point d'ancrage. Et la phrase qu'il prononce lui fusille les épaules.

Pauvre Jenny. Tu n'as pas toute l'attention que tu voudrais. Mais tu t'obstines quand même à jouer les petites filles bien élevées, trop charmante pour avoir quelque chose à faire là. Pourquoi ? Pour de l'attention paternelle ? Pour emmerder ton père, en étant plus gentille avec des criminels notoires qu'avec lui ? Ou alors tu essayes de te convaincre que tu n'as vraiment rien à faire là, que tu es trop pure pour être impliquée dans tout ça.
Petite Jenny n'est pas contente. Petite Jenny boude. Petite Jenny va se rouler par terre pour réclamer les faveurs d'une énième figure paternelle que son imagination délirante aura élaborée de toute pièce, et faire comme si elle n'avait pas provoqué ce qui lui arrive ensuite...


" ... Merci. "

Déliant son corps, elle pose prudemment les pieds au sol et suit sagement la dite Betty au milieu de la foule. Plus loin derrière, elle voit les prostituées, ces femmes étranges auxquelles elle voudrait toujours ressembler, et moins souvent en avoir l'air. Déglutissant sa salive avec détresse, Jenny dévie de sa route et s'en va acheter le rouge à lèvres de l'une d'elle, une grande brune à la bouche très rouge, avec un peu de sa monnaie volée au cadavre qui gît, méconnaissable sous une blouse d'asile, dieu sait maintenant où en partant d'ici.

Mais les cris au beau milieu de la nuit
Et on court se cacher sous le lit
Et la peur prend le pas sur l'envie, vite
On éteint

Les douches sont grises là où elles ont dû autrefois être blanches. Salubres et propres, elle subissent malgré tout les affres du temps comme tout le monde, et des rénovations plus volontiers accordées à la salle principale. Enfin seule, Jane se débarrasse de son gros blouson avec virulence, qui lui collait comme une seconde peau inconfortable, et se rue sur les robinets pour boire, jusqu'à s'en noyer, régurgiter l'eau trop froide plusieurs fois dans le lavabo, sans s'arrêter pour autant. Le torse enfin nu, elle se redresse, recule et lève le regard vers le miroir, tombe nez à nez avec une bête crasseuse, couverte de sang et de poussière, les cheveux en mèches gluantes et le regard vide. Un frisson de dégoût la parcourt. Ses prunelles se baissent vers l'énorme hématome qui s'est formé sur tout son côté droit. Lentement, langoureusement, Johhny-Jane croise les bras sur son torse et écrase ses doigts dans ses côtes. La douleur lui arrache un grognement bestial.

Elle reste un moment, inerte, à se contempler sans se voir, jusqu'à ce que la porte s'ouvre sur la silhouette goguenard de son chasseur. Dans un froncement de sourcils passif, elle l'observe qui la contemple, de la tête au pied. Un échange muet assassine deux ou trois secondes de sa vulgarité, avant que l'autre se décide à ouvrir la bouche, en un grognement porcin, le même sourire affreux tordant ses lèvres.

" Il sera pas toujours là pour te protéger, tu sais ? " Du coin de l'oeil, Jenny voit son blouson gerbé au sol, son couteau stupidement abandonné à l'intérieur. " Je parie qu'il a déjà oublié que tu existes. Et même si c'est pas le cas... il te butera tôt ou tard. " Et le sourire s'étire, vainqueur, fier d'arriver là où il voulait en venir" Moi, je peux te protéger. "

On ne laisse pas à Jane le temps de réaliser tous les scénarios qui s'étalent en fantasmes sur l'écran de son esprit érodé. Attraper son couteau et lui lacérer le foie avec pour le regarder s'étouffer dans son sang, lui enfoncer le visage dans chacun des miroirs étalés dans la pièce, l'étrangler avec un fil de douche pour regarder sa langue devenir gonflée, violacée, ses yeux exploser hors de leurs orbites... elle ne saura jamais si elle y serait parvenue. Quelque chose attire son attention du côté du bar et il disparaît aussi vite qu'il s'est immiscé, un sifflement contrarié de sa langue sur ses dents, après un dernier regard sur le corps de Jane, resté inerte. La jeune femme se précipite sur la porte aussitôt qu'elle s'est fermée pour la verrouiller et se vautre au sol pour récupérer son arme, la serrer contre son corps.

On éteint : Mieux vaut fermer les yeux
S'agit d'apprendre à ne pas être heureux
Il nous faudra verser de l'eau sur le feu
Pour l'éteindre

Une eau brûlante lui martèle le crâne et bat contre ses reins. Le sang et la crasse roulent le long de son corps, entre ses cuisses, jusqu'à ses pieds, charriés par le courant d'une eau pure, acide. Son camouflage ruisselle entre ses orteils pour disparaître dans la bouche entre deux dalles de carrelage gris, vers les égouts d'où elle sort. Le corps de Jane tremble en secousses violentes. Elle a les tripes dans la gorge, que ne font pas redescendre ses gémissements étranglés. Les paupières compressées les unes contre les autres à s'en faire mal, elle tente de toutes ses forces de laisser passer le vertige et les visions atroces, les voix qui hurlent dans sa tête, écrasent son cerveau à lui en faire une bouille bonne pour lui couler par les oreilles et les narines. Son corps frotté au savon avec une vigueur qui lui a brûlé toute la peau et l'a rendue rouge se presse contre un mur, dans un grondement rauque. Haletante, Jane suffoque, supplie dans un balbutiement pour que ça s'arrête, juste une toute petite seconde. Sa main chemine sur son ventre et s'enfonce dans ses chairs, broie tout ce qu'elle peut empoigner de peau dans sa maigreur, griffe l'épiderme de surface. S'immisce entre ses jambes dans une secousse brève, un geste de survie. Se presse là et s'écarte, honteuse.

" Ne te fais pas trop d'illusions, Jenny. Tu n'es rien sans moi. Tu n'étais rien et c'est toujours le cas. Tu veux me quitter ? Vas-y. Tu reviendras. Et au moins, tu auras appris à me respecter. "
" Les hélicoptères. Ce sont les hélicoptères. Je l'ai dit à la police et ils m'ont envoyé ici. Ils sont de mèche, eux aussi. Tout le monde est de mèche. On est épié, tout le temps, toujours. "
" Il faut bien payer la chambre. "
" Les gardiens, ici, c'est tous des pervers qui bandent sur leur autorité. "
" Vous en voulez à votre père, mademoiselle Peterson ? "
" Les filles comme toi, elles devraient pas s'étonner, aussi... "
" Il te butera tôt ou tard. "
" POURQUOI est ce que tu REFUSES d'accepter l’ÉVIDENCE, petite fille ? "

Les vêtements sont à sa taille, le couteau à cran calé contre sa hanche, entre l'os et le jean propre, sous le débardeur blanc qui baille contre sa poitrine menue. Un gros hématome lui orne l'épaule et en dessous, l'eau a réveillé le saignement que contiennent encore vaguement les morceaux de verre, attendant qu'elle soit lavée avant de se risquer à propager des infections. Jane inspecte un instant l'absence de rougeurs et d'inflammation que seul un miracle a laissé autour de ses plaies et balaye de son bras le plus sain la buée que l'eau brûlante a laissée sur un miroir. Lentement, elle attrape le rouge à lèvres acheté et s'en peint les lèvres avec application. Son regard s'écarquille, la masse trempée en arrière de ses cheveux ne le cache plus. Du pouce, elle caresse la plaie dissimulé sous le beau rouge. Jane serre la mâchoire à se faire péter les dents. Elle assassine la perfection du trait en traînant une extension jusque sur son menton, le regard vide. Contemple son visage déformé par un simple dessin, offense superbe à la beauté la plus simple, dans un sourire satisfait. Un instant. Et s'empare le suivant d'un papier pour essuyer compulsivement la trace débordante, laissant derrière elle une nouvelle brûlure superficielle sur sa peau.

On grandit, on est un cow-boy, un indien
On est un bourreau qui pleure pour un rien
Une victime, plein de sang sur les mains mais
On est un

" Qui aurait cru qu'il y avait une fille là dessous... Qu'est ce que tu bois ?
- Du jus d'orange, s'il vous plaît. "


La voix de Jane a abandonné ses tons rauques, approximatifs. Elle a ce nouveau camouflage de jeune fille fraîche, pas plus vrai que l'autre mais tellement plus crédible, parce qu'on ne demande qu'à croire à ce genre de choses. Sous les rires incrédules et les yeux un peu effarés de la découvrir, elle regagne sa place et confronte le regard désapprobateur de la vieille Bertha, qu'on refuse ainsi son alcool pour du jus d'orange. Elle essaye de s'expliquer, qu'elle ne boit pas d'alcool, mais comprend vite la sévérité de l'offense. Alors comme elle l'a maudit tantôt et qu'un élan de lucidité bref l'a lui seul conduit à ne pas formuler des excuses à voix haute pour des pensées silencieuses, elle désigne la bouteille de liquide parfaitement inconnu pour elle posée devant le Clown. La quasi centenaire a au moins la clémence de couper ça avec du jus d'orange. Ca fera moins mal, de tout façon, elle grogne en désignant son bras encore jonché de morceaux de verre. Passe derrière le comptoir.

Le bras posé sur un plan de travail dégagé, Jane fixe un moment le clown qui lui fait désormais face, a l'impression de le voir tanguer sans savoir si ça vient de lui ou d'elle. Comme elle n'a aucun moyen de le faire se sentir mieux, elle prend son verre et le tend vers lui avant d'y tremper les lèvres, ne pouvant retenir une grimace offusquée par la brûlure inattendue que le liquide provoque dans sa gorge.

" Merci. "

Les yeux maintenant baissés sur le visage de la vieille dame, qui s'affaire à lui retirer les morceaux jonchés dans son bras, des lorgnons mis sur son nez pour l'occasion, elle essaye de s'arracher un sourire. La dame se contente de demander si c'est tout ce qu'elle sait dire, à la fin, et que ça devient agaçant à force, et s'interrompt dans ses réprimandes par le morceau d'os qu'elle extrait de la chair entre ses phalanges. Elle la contemple, un moment, comme on regarde une oeuvre abstraite, inutilement incompréhensible. Et part dans un éclat de rire que Jane ne comprend pas d'avantage.

Un de ceux qui se croient tirés d'affaire
Qui avancent sans regarder en arrière
Qui sont prêts à tuer père et mère et que
Rien n'atteint

Elle a dévoré son burger en moins de temps qu'il ne lui a fallu pour arriver, a failli le vomir immédiatement mais est parvenue à le tenir dans son ventre. Elle a dit merci pour ça aussi, n'en déplaise. Retournée à sa place, son verre à demi vide, Jane détaille du regard les blessures étalées sur le monstre à côté d'elles, qui ne semblent pas lui faire mal, pas plus que les brûlures dans sa gorge. Son visage lui paraît vraiment trop chaud.

Elle a bien essayé de ne pas avoir mal mais elle n'a pas pu s'empêcher de grimacer. Et chaque piqûre, couplée à cet étrange liquide, était autant de cognement sourd de son coeur contre ses tripes. Déjà, elle se retient à nouveau de trembler, de cogner quelque chose, de hurler. A la place, ses doigts s'élèvent vers un hématome ornant l'épaule à côté d'elle, les sourcils froncés par dessus un regard aussi intrigué que concerné. Elle s'immobilise quand il tourne ses billes noires vers elle et se mord la lèvre, achève malgré tout son geste, effleurant fugacement l'ecchymose d'une caresse. Elle incline le visage quand ses yeux se posent sur d'autres plaies, plus critiques, et s'arrêtent enfin sur les cicatrices ornant son visage, défiguré d'un trait définitif. Un sourire étire vaguement ses lèvres en réponse à cette image de rire tatouée et déformée par la peine abattue sur les épaules de l'autre. Ses doigts s'élèvent vers elle et s'arrêtent, n'osant pas aller là. Pas jusque là. Pas si loin.

" La douleur. J'avais oublié... C'est à cause d'elle que je me suis retrouvée là-bas. " Jane déglutit une salive difficile et laisse tomber sa main sur ses cuisses. " Parce qu'elle me faisait sentir vivante. Que je ne savais plus comment faire autrement pour me sentir vivante. Je me souviens de ces choses qui naissent dans la douleur, qui sont plus fortes qu'un simple organisme, qui vont au delà... Qui nous dépassent. " Un sourire pensif lui étire les lèvres, au souvenir maintenant presque mort des embardées délicieuses de son corps, il lui semble une éternité en arrière. " Et qui nous dépassent trop vite, parfois. " Haussant les épaules pour balayer cette confession absurde, Jenny s'empare d'une serviette et entame de la plier délicatement, le regard maintenant rivé à sa tâche. " Je serais encore perdue au milieu de tout ça si je ne vous avais pas vu. C'est la première chose un tant soit peu réelle qu'on ait faite pour mois depuis des années. " Elle achève le pliage grossier d'un petit oiseau simple, le premier qu'on apprend aux ateliers des institutions. " Et je ne peux pas vous rendre la pareille ni vous dire quoi faire. " Et le pousse devant lui pour le lui offrir, dans un ultime effort d'humanité, qu'elle aurait déjà abandonnée il y a des heures si ce n'était pas pour lui. Il est temps, maintenant. Elle n'en peut plus." Je m'excuse du désagrément que je vais provoquer... Mais vous pouvez venir si vous voulez. "

On a beau crier encore et toujours
Rien n'étouffera le manque d'amour
Et ce feu nous brûle jusqu'au jour où
On s'éteint

Jane se lève dans un mot d'excuse à l'adresse de son hôtesse. Elle se dirige d'un pas revigoré vers la sortie. Et il suffit d'un regard à l'adresse du chasseur vulgaire pour qu'il lui emboîte le pas. Dehors, elle l'attend, s'éloigne avec lui pour ne pas provoquer d'esclandre devant le bar et l'homme qui l'ont accueillie. Lui demande une cigarette. L'allume contre la flamme allumée entre ses mains dans un sourire entendu, incitant, emprunt de ces ondes sexuelles qu'elle sait encore envoyer par salves. Et l'écrase d'un geste brutal sur la main tendue pour toucher son corps. Frissonne d'un délice vengeur sur le cri qui s'élève/ Entend à peine l'insulte qui fuse avant que la gifle cingle sur son visage. Sale pute. Si tu veux.

Et se jette sur lui. Et cingle son corps entre ses jambes. Et enfonce ses dents à sang, dans sa mâchoire.
Parce que c'est la seule chose qu'elle peut encore faire pour ne pas devenir folle. Parce que tuer ou crever, c'est le dernier rempart en arrière quand on a oublié tout ce qui pouvait nous retenir de sombrer.

*Zazie


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