HISTOIRE
« ll y a deux histoires : l'histoire officielle, menteuse, puis l'histoire secrète,
où sont les véritables causes des événements. »— Balzac.
Mon plus vieux souvenir, ce doit être dans cette église de quartier, une messe, u plus précisément le baptême de ma plus jeune sœur. Ça remonte mais je me souviens des parfums, de la lumière, de la ferveur qui habitait l’église. Je me souviens que j’étais fière, car il s’agissait d’un moment important celui où ma sœur était protégée par Dieu. Cela est si lointain à présent… Mais pour tout comprendre, je dois tout vous raconter.
Je m’appelle Jade et je suis la troisième d’une famille de quatre enfants. Un grand frère, une sœur ainée et une cadette. Sans compter des parents aimants. Nous vivions à Washington, sans manquer de rien nous ne roulions pas non plus sur l’or, mais nos parents faisaient tout pour nous. Nous allions à l’église tous les dimanches, nous priions à chaque repas et chaque soir, car d’après nos parents, Dieu nous guidait et veillait toujours sur nous. Et j’ai toujours ressenti cette présence. Sauf qu’on ne se rend pas toujours compte de ce qu’on a avant de le perdre et que parfois, malgré un guide spirituel, nous pouvions nous perdre, et commettre des erreurs. Notre erreur a été notre désobéissance. Aller à l’école, nous confronter aux autres nous a éloignées de Dieu, mes sœurs et moi. Certes, nous ne devions pas aimer d’idoles, nous devions être humbles et modestes, mais voilà, il y a eu l’effet de mode, le drame des filles. Une marque sortait LE vêtement qu’il fallait absolument avoir pour être « in ». Alors mes sœurs et moi avons cassé les pieds à nos parents pour qu’ils nous laissent aller dans la boutique le jour de l’ouverture. Mais pour eux, c’était stupide, impie, et dangereux car le magasin n’était pas vraiment dans un quartier fréquentable. On aurait dû obéir… mais on ne l’a pas fait. Au contraire, on a harcelé notre frère pour qu’il nous y emmène. C’était petit, car nous savions pertinemment qu’il ne saurait pas nous dire non. Et il n’a pas dit non. Il nous a déposées au magasin, nous donnant une heure. Et tout s’est joué pendant cette heure. On avait nos vêtements, on allait sortir… mes sœurs en fait étaient déjà dehors, devant moi, et j’ai entendu. Les pneus crissant, le bruit des coups de feu, les cris. Mes cris… J’ai vu mes sœurs s’effondrer, j’ai vu leurs vêtements, leurs visages tâchés de sang. Le reste est flou. L’hôpital, la police, mes parents dévastés… Ce que je sais avec certitude, c’est que j’ai arrêté de prier. A leur enterrement, lors de la messe en leur honneur, je n’ai plus adressé la parole à Dieu. Il était censé nous guider et veiller sur nous… Comment avait-il pu les abandonner ? De quel droit avait-il laissé ces types tuer mes sœurs ? Elles n’avaient jamais commis la moindre erreur, à part là… Mais juste désobéir à ses parents, est-ce que ça mérite une mise à mort ? La vie était difficile après ça. Mais le pire, c’était sans doute les silences de mon frère. Il ne m’a plus regardée dans les yeux, il ne m’a plus parlé. Et un jour, je suis descendue de ma chambre pour le petit-déjeuner… et il n’était plus là. Disparu, sans laisser de trace. C’était presque un mois après le drame. Mes parents ont demandé à la police de le rechercher, en vain. Et moi, je n’avais plus personne. Dieu m’avait tout pris, tout et mes parents étaient incapables de me rattraper.
J’avais quinze ans et demi quand j’ai commencé à sortir, à boire, à faire la fête pour oublier. J’avais été parfaite, ma famille avait été parfaite et Dieu ne nous avait pas protégés, alors qu’il semblait sauver les enfoirés assoiffés de meurtre. Un soir, un gars m’a proposé quelque chose pour oublier, pour que je me sente mieux. J’ai sombré dans la drogue. Sous son effet, j’étais heureuse. J’avais l’impression d’être de nouveau entourée. Mais dès que ça s’estompait, j’étais au plus mal, au bord du précipice. Alors je faisais tout pour m’en procurer. Je piquais l’argent de mes parents, je volais… Et… un jour… tout a dégénéré. J’avais 16 ans, j’étais accro… j’avais besoin d’argent pour ma came… Et j’ai vu trois fifils et fifilles à papa-maman, bien propres sur eux… J’ai pas réfléchi, et je leur suis tombée dessus. J’avais beau être seule, j’étais déchainée, en colère, en manque, et je les ai mis dans un sale état… Mais je n’ai pas couru assez vite… Des flics m’ont attrapée, plaquée au sol et je me suis retrouvée dans une espèce de cellule de dégrisement. Et j’ai vu la honte dans le regard de mes parents… ça ne m’a même pas touchée. J’ai été transférée à l’académie Weins, à New-York… On entendait beaucoup de choses au sujet de cette école, mais je m’en fichais. Comment une école allait me sauver ? Franchement ? Surtout en me déracinant…
Mais là-bas… je ne sais pas… on apprenait des choses, on nous apprenait à voir. Si Dieu ne veillait pas sur nous, Gordon, lui, le faisait. Il luttait pour rendre les rues plus sûres, pour empêcher que d’autres sœurs ne meurent, que des assassins restent libres. Quelque chose s’est passé en moi. Là-bas, je me suis trouvée. J’ai arrêté la drogue et mes autres conneries du jour au lendemain. J’ai compris qu’il y avait quelque chose de plus grand, là, à New-York. Mes parents avaient tort. Ce n’était pas Dieu notre Guide, c’était Gordon. Une fois que j’ai admis cela, j’ai… guéri ? J’ai cessé de m’en vouloir pour la mort de mes sœurs. Après tout, les responsables de ce massacre, c’était ces types qui avaient tiré, et mon frère, qui nous a emmenées. Mais surtout, c’est lui qui m’a abandonnée, qui m’a laissé sombrer de jour en jour, alors que des inconnus m’avaient tendus la main. Je le hais. Je le hais, autant que je rends grâce à monsieur Weins. J’ai intégré le club d’athlétisme, en sprint. Je me suis trouvée. C’était ma place, ma famille, enfin. J’étais… heureuse. J’étais forte physiquement, je le suis devenue intellectuellement et mentalement. Mes notes ont augmenté, ma popularité aussi. Un jour, j’ai même pu avoir une des plus belles chambres de l’académie. Mon chez moi, où je me sentais en sécurité, protégée. J’ai pris confiance en moi et trois ans de suite, j’ai atteint le sommet en gagnant toutes mes courses. Tout me réussit depuis que je suis à l’académie. Monsieur Weins fait tout pour nous, nous avons de bons dirigeants, j’ai enfin trouvé ma lumière. Je m’y plais, et j’aime cette petite cour autour de moi. Je suis entourée, je ne me sens plus abandonnée. Je prends soin des nouveaux arrivants dans le club, j’espère qu’ils trouveront leur voie. Par exemple, j’entends parfois des étudiants critiquer le gouvernement. Comment osent-ils ? Savent-ils comment se passe la vie dehors ? Savent-ils que des gens tuent ? Savent-ils tout ce que fait le gouvernement pour nous ? Weins et Gordon m’ont sauvée et je ferai tout pour les protéger, car ce monde-là, ce monde qu’ils m’ont offert quand j’étais perdue, c’est le meilleur qui soit. En plus, ce que j’ai appris en trois ans, c’est que ce sont des abrutis d’opposants qui ont tué mes sœurs. Alors que le gouvernement essaye de nous protéger, eux, ils tuent des gosses. Ça me dégoûte et j’espère bien, après mes études, pouvoir intégrer la Police, pour les éradiquer et protéger notre monde. Que personne devant moi ose critiquer le Gouvernement ou la direction de l’Académie, car je mordrais. Je veille au grain là-dessus.
CARACTÈRE
« Un homme de caractère n'a pas bon caractère. »— Jules Renard.
Parler de soi n’est pas toujours une chose aisée. Surtout si en plus il faut être objectif. Mais je vais essayer. En fait, je crois que mon nom parle pour moi. Et ne vous moquez pas, ce n’est pas évident de se démarquer.
Jusqu’au boutiste. Quand j’ai une idée en tête, rien ni personne ne peut m’arrêter. Je sais aujourd’hui que je désire vouer ma vie au gouvernent et tout faire pour protéger l’école. Je ne laisserai personne mettre à mal ces institutions et je dénoncerai sans vergogne quiconque y sera opposé.
Agréable. Je ne suis pas une méchante fille. Je sais, on pourrait tomber dans le cliché de la fille populaire, garce, qui a ses petits toutous pour la suivre partout, mais ce n’est pas le cas. J’ai été bien élevée, j’accueille facilement les gens, surtout les nouveaux. Je veux que tous profitent des bontés du système. Cette école et ce sport m’ont sauvée, alors mon but est qu’un maximum de personnes en profitent. Certains ont besoin d’être guidés, je suis aussi là pour ça.
Débrouillarde. Je suis aussi maligne, futée et tout ce que vous voulez. J’ai vécu des choses difficiles et je ne me fais plus d’illusions, j’ai appris à compter sur moi-même, à survivre, et à être prête à tout ;
Espionne. Oui bon, ce n’est pas un terme que j’affectionne, mais il faut se rendre à l’évidence, les temps sont troubles et on ne peut pas faire confiance à tout le monde. Je préfère surveiller mes arrières et ceux du gouvernement.
Très intelligente. Avec la douleur, j’avais oublié que je l’étais. Mais l’académie m’a ouvert les yeux sur mes capacités, et aujourd’hui, je suis parmi les meilleurs. Je veux qu’on soit fier de moi, du chemin que j’ai parcouru.
Hyper populaire. Je suis sympa, amusante, sportive, bref, les étudiants m’adorent ou m’envient. Ça tient aussi à mon rang. J’ai droit aux plus belles chambres, aux meilleurs plats. Et je n’exclus personne, surtout si je décèle chez mon interlocuteur un allié potentiel. Par contre, si on me cherche, pas d’illusion : je mords.
Obéissante. J’ai commis une erreur par le passé. Elle a coûté la vie à mes sœurs. J’étais bien décidé à ne pas décevoir M. Weins et mes professeurs comme j’avais déçu mes parents. Alors aujourd’hui, je fais ce qu’on me dit, et je m’en porte bien !
Manipulatrice. Encore un adjectif que je n’aime pas, mais bon, parfois, il faut savoir mener les esprits et volontés à bon port, même si c’est contre leur gré. Après tout, je ne voulais pas de cette Académie, je ne croyais pas en ses valeurs. Et c’est la meilleure chose qui me soit arrivée. Alors je veux amener ceux qui sont en proie aux doutes à ne plus avoir peur, et à comprendre que le Gouvernement agit pour notre bien.
Athée. J’ai cessé de croire en Dieu quand il a laissé la vie sauve à des hommes coupables d’avoir tué mes sœurs. Dieu protège ceux qui vont contre les principes ? Non, c’est un mensonge. Tout n’a été que mensonge, et je n’y crois plus. Je sais qui veille sur moi, et ce n’est pas une quelconque divinité.
Souriante. Je suis devenue optimiste, je suis bien dans mes baskets. Championne au sprint, aimée, protégée, je fais aussi du bien aux autres et je veille sur ceux que j’aime.