« ll y a deux histoires : l'histoire officielle, menteuse, puis l'histoire secrète,
où sont les véritables causes des événements. »
— Balzac.

J’envoyai valser mes vêtements sales dans un coin de ma chambre. Cet entraînement avait été dur sur mes muscles et je n’avais envie que de deux choses : Me doucher et dormir.  J’en étais à ma quatrième année à Weins. J’avoue que j’étais vraiment perdue avant d’y entrer, mes parents étaient de fervents admirateurs de Gordon et de son gouvernement, mais j’avoue que je ne savais pas ce que j’en pensais, à l’époque. Maintenant, je réalisais qu’il avait fait de bonnes choses pour le pays, même s’il m’effrayait un peu. Je ne savais pas trop pourquoi, mais il y avait quelque chose dans cet homme qui ne me revenait pas et ça avait toujours été le cas, sauf que depuis que j’étais à l’université, je savais faire la part des choses et me rendre compte que sans lui, le pays ne serait pas où il en est aujourd’hui.


J’étais née à New York, un matin d’automne, dans une famille très aisée. Mon père possédait une grande compagnie dans laquelle ma mère travaillait également, pour l’aider. J’étais leur seul enfant, pour une raison qui m’échappait. J’aurais bien aimé avoir une petite sœur ou encore un grand frère, mais ça n’avait pas semblé être dans leurs plans. J’avais toujours été seule. Certes, j’avais eu la compagnie de certaines personnes pour m’éduquer, mais sans plus. Oui, parce que j’avais été élevée bien droite, je me devais d’être toujours irréprochable en public, j’y avais été initiée dès mon très jeune âge, alors que je devais aider à ce que mon père présente une famille impeccablement unie lors des soirées de réseautage qu’il mettait en place pour se faire connaître encore plus dans son secteur d’activité. Pourtant, la réalité était toute autre. Je leur servais principalement de bonne figure, c’était probablement pour ça qu’ils s’étaient contentés de n’avoir qu’un enfant.


J’avais commencé le cheerleading à un très jeune âge, dans un club civil, j’avais donc bien entretenu ma flexibilité et mes talents jusqu’à ce jour. Je n’avais jamais été une gymnaste, même petite, je n’aimais pas vraiment ça. Je connaissais quelques trucs et je n’avais pas peur d’en apprendre des nouveaux lorsque nécessaire, mais je n’étais pas celle qui faisait une vrille sur place au milieu du tapis de compétition. Ce qui me distinguait, c’était ma flexibilité et ma stabilité dans les airs. J’avais toujours été voltige et je n’avais pas peur d’essayer tous les défis qui m’étaient présentés, à cette position.


J’avais mis mon peignoir et je m’étais dirigée vers les douches. Je me savais jolie, on me l’avait répété toute ma vie. Je me trouvais un peu trop maigre – mais je ne faisais pas exprès, j’avais beaucoup d’entraînements – et je n’étais pas très grande, mais je savais mes traits assez doux et jolis. J’avais les yeux verts de mon père et la blondeur de ma mère. Mes cheveux étaient assez longs, ils m’arrivaient au milieu du dos. Je m’affairais toujours à être sous mon meilleur jour, c’était normal pour moi, j’avais été élevée de cette façon. Et puis, je devais avouer que j’aimais cette sensation d’attirer les regards vers moi, je ne disais jamais non à un peu d’attention. Lorsque l’eau chaude se mis à couler sur ma tête, je me sentis plus calme et détendue. L’entraînement avait été intense et je savais très bien que j’aurais de la difficulté à marcher le lendemain, à cause des courbatures.


Je n’avais jamais eu beaucoup d’amis proches. Certes, dans notre société, la richesse amenait une popularité inexpliquée pour les enfants, je n’avais jamais été victime d’intimidation quelconque, on me respectait, sauf que je n’allais pas vers les gens, je crois que je n’étais pas agréable, en fait. Une seule personne avait réussi à me pousser à ouvrir mon coeur, un garçon, je l'avais tellement aimé, mais il était parti, il m'avait dit qu'il ne voulait plus de moi, sans me donner des raisons plus claires. Nul besoin de noter combien j'avais été démolie. J'en avais eu pour des mois à m'en remettre et c'était pour cette raison que je ne voulais d'aucune attache auprès d'un homme, je considérais qu'ils étaient tous les mêmes, seulement en mesure de me briser à nouveau. Je préférais rester seule et libre. Lorsque j’avais eu quinze ans, j’avais commencé à regarder les universités et c’était Yale qui me tentait le plus, sauf que mes parents en avaient décidé autrement. Mon père m’avait dit qu’il n’était pas question que j’aille dans une autre école que l’académie Weins, parce qu’elle était l’une des mieux cotées. J’ai été charmée par l’idée de faire du cheerleading universitaire, comme dans les films, puisque Weins offrait la possibilité de faire partie de ce club. C’est ce qui m’avait emballée et l’année suivante, j’entrais à l’académie.


J'étais fatiguée, et une fois que ma douche fut prise, je me glissai sous mes couvertures et je m'endormis profondément.

Je n’ai pas une histoire à faire dresser les cheveux sur la tête, il faut le dire. J’ai grandi comme n’importe quelle fille devant présenter une façade parfaite en tout temps. Par contre, c’est ma personnalité qui est un peu plus colorée…

« Un homme de caractère n'a pas bon caractère. »
— Jules Renard.

Je ne suis pas quelqu’un d’agréable. Je suis difficile d’approche et je n’aime pas la compagnie de beaucoup de monde. Certes, je ne suis pas totalement associable non plus, il est possible que quelqu’un, au bout d’un temps, parvienne à percer cette carapace que je me suis construite toute ma vie, mais il faudra du temps. Je sais me montrer gentille avec la plupart des gens, mais j’ai un côté hypocrite. Je serais bien capable de jeter quelqu’un dans la gueule du loup pour mon propre bien. Mon instinct de survie est assez bien développé. J’ai grandi en tentant de me mettre en valeur, alors si je devais écraser quelqu’un pour briller plus, je le ferais. Je tente de toujours mettre les gens de mon côté, au cas où ils pourraient me servir plus tard.


Par contre, autant je sais être hypocrite et à la limite d’être manipulatrice, je trouve que mes yeux parlent trop. Lorsque je déteste vraiment quelqu’un, je suis incapable de le cacher, incapable de rester neutre et de faire semblant de l’aimer, je l’ignore complètement, à la place de me forcer à lui faire croire qu’il m’est agréable d’être en sa compagnie.


J’aime être jolie, j’aime l’attention des gens, surtout celle des hommes. J’adore regarder les hommes, j’adore leur plaire, mais je n’en veux pas dans ma vie. La peur d’être blessée après m’être donnée corps et âme à quelqu’un ne me plait pas et me fait peur, puisque je l’ai déjà vécu. Bien sûr, toutes les adolescentes de ce monde ont vécu des peines d’amour de ce genre, mais je n’accepte pas de me sentir faible comme je l’ai été à cette époque, je préfère me fermer à ce genre de relation. Je préfère ne pas m’attacher et me contenter de capter leur attention. Il ne faut pas croire que je n’ai jamais eu d’aventure avec aucun homme, bien au contraire. J’avais su prendre de l’expérience de ce côté-là durant mon adolescence, sans que ça ne devienne abusif, tout de même.


Je n’ai jamais été de celles qui excellent à l’école. J’ai des notes acceptables, dans la moyenne, mais je n’ai jamais été passionnée par les études, je deviens souvent lunatique, en cours et je me mets souvent à imaginer des chorégraphies cheerleading. Il faut dire que ce sport est une obsession pour moi. Je me suis mis un tableau collant – pour ne pas faire de trous dans les murs de ma chambre, afin d’y épingler toutes les médailles que j’ai gagné dans ma carrière de cheer. Oh, et ma collection de boucles à cheveux, de toutes les couleurs et agencées à mes ensembles d’entraînement. Donc, je ne suis peut-être pas de celles qui excellent à l’école, mais j’ai un sens de la réparti intéressant. J’ai souvent des répliques intéressantes qui me viennent toutes seules et lorsque j’ai à argumenter sur quelque chose, je me donne à fond. Même lorsque je réalise que j’ai tort, je continue d’argumenter pour retourner la situation à mon avantage. En gros, je cherche à maîtriser la situation, dans tous les cas, mais rien ne dit que je réussis à tous les coups, je ne suis pas du genre à me vanter de mes échecs.