Il ne racontera que les grandes lignes, sans s'attarder car il n'est pas très attaché à ce qui fut. Il retient des souvenirs, des expériences mais en aucun cas Hunter les sert gratuitement. Posez une question il y répondra simplement, sans partir dans une histoire longue et un mélodrame. Il n'a pas eu plus de malheur ou de chance que certains, il a seulement vécu et ne regrette pas.

Il naît dans les vertes campagnes du Derbyshire en Angleterre, à Derby même. Rien de bien étrange en somme. Son père est un avocat respectable et sa mère peintre. Son affection pour l'art viendra d'elle, flanqué à ses côtés qu'il est à l'époque à prendre crayons et papiers pour l'imiter. C'est un enfant un brin solitaire, préférant la compagnie des adultes et des livres qu'il dévore jusqu'à tard dans la nuit à la lueur d'une lampe de poche. Particulièrement débrouillard il est aussi indépendant et n'attend pas qu'on fasse les choses à sa place. Il a sept ans quand on annonce -à la plus grande joie de la famille- qu'il y aura bientôt un autre enfant chez les Stanton. Ni enjoué ni peiné Hunter continuera son petit chemin, accumulant les bonnes notes et les jeux en solitaires, parvenant de temps à autre à tenir son père plus d'une heure pour une partie d'échecs, exercice auquel il est doué. C'est un gamin poli, sérieux et appliqué qu'on ne sermonne pas. Pas besoin, il est mature et ne cause pas de tort.

Puis elle arrive, la petite sœur tant attendue de tous et lui viendra voir par principe, penché sur son berceau d'un petit air curieux. Et oui il va l'adorer, il va se faire protecteur, solide pour elle car l'enfant se révèle sourde. D'une nature patiente de déterminée il apprendra le langage des signes, se documentera pour connaître au mieux l'univers de sa cadette et leur relation sera des plus fusionnelle. Leurs dialogues sont psychiques, un regard suffit et alors Hunter apprend. Un sourcil levé, une oeillade, les mouvements de tête, les expressions. Avec elle il décode et en fait une habitude qui le suivra en tout et pour tout si bien qu'il se met à l'utiliser à toute occasion. Il n'aura à cette époque aucun véritable ami, sa famille seule compte et sa sœur est son unique compagne de jeu. Les promenades à cheval, les marches dans les bois et les baignades au lac, les dessins, ils font tout ensemble et quand il la sent trop fragile il lui fait remonter toutes les pentes. En ce temps là il ne pensait qu'à bien faire et aurait fait de même pour un inconnu sans rien attendre en retour. Il était jeune, encore un rien inconscient mais cela ne dura pas. Le temps de passer par les cases école et encore …

Lycée puis université ; il les traverse avec brio et devient psychiatre avec quelques années d'avance tant le sujet lui est évident. C'est son truc, son domaine et tout jeune diplômé qu'il est il fait déjà parler de lui. Considéré comme prodige, il n'est pas tant de cet avis quand bien même sa façon de faire impressionne. Mais à décortiquer ses relations Hunter se forge des avis, des principes qui peu à peu s'impriment au fer rouge au fond de lui. Il apprend à vie que tout n'est pas bon à dire, rajoute une muraille au fort qu'il est et dévoile une telle maîtrise de lui face au pire qu'on ne peut rien faire d'autre que louer la chose.  

La troisième guerre éclate, la technologie s'effondre mais Hunter n'est pas perdu pour autant. Il n'a besoin d'aucun instrument pour travailler, a conservé un esprit artiste un rien rétro qui le pousse à préférer le papier et les livres plutôt que les écrans. Il s'est engagé un temps lorsqu'on a réclamé sa présence pour évaluer quelques personnes et il s'est exécuté sans l'ombre d'un doute. Il voit alors la guerre, la vie, assiste à la panique humaine sans broncher et rajoute des pierres à sa propre construction. Son calme s'impose, il sait rassurer des troupes entières et quand les choses s'apaisent enfin, qu'on reconstruit Hunter a vu défiler tellement de visages qu'il a parfait son travail en matière de profilage. Plus rien n'échappe à ses yeux, il saisit les détails, en joue quand il le faut et de tout temps on loue son élégance. Par dessous il nourrit son besoin de percer ses semblables à jour, de dénicher le fond de leur pensée et choisi -une fois de retour chez lui- de rejoindre la capitale Anglaise bien plus aptes à lui fournir des clients que sa campagne natale.

Il est alors apprécié de tous et s'installe à Londres où il travaille à son compte tout en dispensant nombre de cours en sa matière dans les facultés alentours. En tant que professeur on lui trouve aussitôt un charme. Proche des étudiants il leur inspire une réelle sympathie et ils en viennent naturellement à se confier, à lui parler de tout ce qui les touche. Il y voit un sujet à creuser, prend conscience de son charisme et il va en grandissant.
Sa sœur vit avec lui, leur parents coulent une retraite paisible et Hunter veille au bien être de son entourage. A cette époque il n'a pas encore à faire réellement ressortir ce qui sommeille en lui quand bien même il lui arrive de tester quelques pratiques douteuses sur des esprits étriqués. Il le sait, il se voit capable de tenir un humain par toute ses ficelles et a déjà poussé quelques personnes dans le trou. Pousser au suicide est si facile et il n'a pas de remords à le faire s'il sent sa « victime » dangereuse par extrémisme. Mais rien ne dure en ce monde ; il l'apprend.

Une seule fois elle sortira sans faire attention, voulant acheter un ingrédient manquant pour le repas du soir et ce foutu jour un type braque l'épicerie. Mais comment comprendre les menaces qu'il hurle sous sa cagoule ? Elle ne peut pas, reçoit une balle comme pour la punir de sa « désobéissance ». Alors qu'il rentre du travail Hunter voit l'attroupement et les ambulances, il se précipite auprès de sa cadette et elle rendra son dernier soupir dans ses bras.

Un an, c'est le temps qu'il mettra à retrouver l'assassin de sa sœur et il lui fera payer. Il prend conscience de pouvoir torturer, de pouvoir tuer de sa main mais ce n'est pas sa manière de faire et pas celle qui lui convient le mieux. Sa vengeance est faite, il en voudra d'autres. Dés lors Hunter Stanton plonge et n'hésite plus à détruite qui lui est néfaste. Par la tête, il va tuer oh ça oui. Réduire des hommes et des femmes jugés mauvais pour l'époque au silence total. Il en fera interné, les entraînera à commettre des crimes, les propulsera dans les griffes du gouvernement mais jamais par envie de satisfaire ce dernier. Hunter est neutre, il ne souffre d'aucune influence et n'agit pour personne en dehors de lui. A sa manière il fait le tri et c'est efficace. Très efficace … trop peut-être.    

On le réclame un jour à New York en vue de participer à l'élaboration d'un projet « scolaire ». D'abord septique il refuse jusqu'à recevoir un appel. Un certain Directeur qui lui propose une rencontre à huis clos dans un lieu de son choix. Selon ses propres mots l'homme ne souhaite qu'un avis de sa part pour commencer, la suite viendra en fonction de leur conversation. Le ton cordial et respectueux de son interlocuteur le fera prendre un avion et la rencontre aura lieu en secret. Une pièce sombre où les visage auront erré dans l'ombre et n'auront laissé entendre que des voix. Ils se comprennent, Hunter semble charmer le Directeur qui alors évoque l'académie Weins ainsi que son fonctionnement. Faire le tri, briser la mauvaise graine et créer l'élite. La chose est parlante pour le psychiatre mais il pose ses conditions. Qu'on exige pas de lui qu'il prenne parti, qu'il reste libre de ses agissements et façons de procéder et le travail sera fait. Ainsi signe-t-il son engament.

Weins est en place depuis et le psychiatre doit s'assurer de l'état mental de chacun. Il a son bureau et il est ouvert toute la journée aux étudiants comme au personnel. Il est majoritairement apprécié, comme un second père pour beaucoup, un confident ou un ami pour d'autres. Parce qu'il se montre on ne peut plus disponible tous savent qu'ils peuvent le contacter, frapper à sa porte à toute heure du jour ou de la nuit il répondra présent qu'importe le sujet. Mais depuis il est aussi le plus à même de bousiller la vie des membres de Weins, ses rapports sont parole d'or pour le Directeur car jamais ils ne seront falsifiés ou malhonnêtes. Hunter est payé pour pour un travail et le fait bien, sans mentir à son patron et en contrepartie ce dernier compte sur le psychiatre pour veiller au suivit des traitements.

Hunter est et demeurera neutre, ne versant jamais dans un camp plus que dans l'autre et il met un point d'honneur à stabiliser les élèves les plus prometteurs à ce niveau. Les enjoindre à devenir des adultes avec une noblesse d'esprit et des principes. D'apparence il est un homme aimable qui volera à votre secours mais retenez qu'il peut aussi devenir un poison violent vous entraînant par le fond malgré vous. Que vous lui tourniez le dos ou le regardez dans les yeux le résultat sera le même : s'il veut votre fin il mettra lui même le dernier point à votre histoire.  

Imaginez un concerto, ses accords emplissant une pièce où les rideaux sont tirés et la lumière tamisée. Inspirez le parfum des livres et du bois, du papier à dessin sur un bureau et détendez vous. La main qui se pose sur votre épaule est puissante mais de velours et elle invite à laisser les soucis loin derrière une porte close qu'il ne s'empressera pas d'ouvrir. La voix qui glisse en votre oreille vous propose un siège, vous assure que tout ira bien et le sourire léger que vous observez vous conforte malgré vous dans cette optimisme zen qu'il impose sans force ni menace.

Portrait premier du Docteur Stanton, psychiatre reconnu et apprécié dans le milieu pour son calme légendaire, sa sagesse et sa patience à toute épreuve. L'emportement lui semble étranger autant que la colère et les extravagances quelles qu'elles soient ne siègent pas en son caractère. L'homme est de nature posée et conciliante, semblant capable de tout les sacrifices pour tirer les âmes damnés des enfers où elles plongent. Pour beaucoup il incarne un sauveur, un pilier voir des fondations entières tant il paraît et se révèle inébranlable. Le choquer ou le surprendre relève de l'impossible et alors on soupire d'aise, on se sent plus léger à constater qu'il est capable de soulever le pire à bras le corps et relever les plus amochés. Hunter Stanton à une aura paternelle. Il possède son charme et ses manières, une cordialité et un respect profond des codes de bonne conduite et quand bien même il apprécie peu le contraire il n'en montre rien. Un sourcil qui se lève, un coin de lèvre tiré plus que l'autre, rien de plus. S'il impose une autorité naturelle ce n'est pas à renfort de cris ou de gestes car il n'en a pas besoin. Il sait parler, apaiser même le pire et tend la main comme peu d'autres seraient capable de le faire. Il est solide, artiste, amoureux de plaisirs simples et habile de ses mains. Son portrait vous semble beau, mais derrière cette toile précieuse le cadre n'est pas de bois : il est d'os.

Loin du Gentleman qu'il incarne à première vue le psychiatre est dangereux. Certes, il sait se défendre par les poings mais son « pouvoir » est ailleurs. Les mots, la voix, l'esprit. C'est par la tête que cet homme vous sauve autant qu'il vous détruit. S'il vous relève il est à même de vous faire replonger plus rapidement encore et si la vengeance ne semble guère lui être familière, elle lui est en réalité coutumière. Les offenses se paient toutes un jour ou l'autre, lui rend au centuple et de la manière le plus sournoise qui soit. Une fois la clef de vos songes acquise il prend le pouvoir, tire les ficelles les plus insolites et les plus enfouies, capable de brider autant que d'attiser le pire de vous même. Du mensonge, il joue en virtuose allant jusqu'à vous faire croire la plus parfaite ineptie aussi loin de vous soit-elle. Car par nature il est obstiné, passionné et s'il doit prendre dix ans pour vous démolir soyez certain qu'il ne vous lâchera pas plus qu'il ne vous laissera filer. On tombe dans ses filets, on boit ses paroles et en orateur chevronné ce personnage singulier prend votre cerveau en otage, votre cœur et vos tripes à la suite. Manipulateur en puissance, calculateur personne ne sait ce qui l'anime et moins encore ce que dissimulent ses manières gracieuses. Le Directeur de Weins seul peut se targuer de la certitude que cet homme est loin d'incarner la bonté. Par la même, le Directeur est le seul à qui Hunter a accepté de dévoiler sa position et l'accord entre eux est net, sans bavure.

Loin de pencher en faveur d'un camp précis Stanton incarne une neutralité à faire pâlir. Parce qu'il assimile toute notion d'extrémisme au fanatisme -et ce qu'importe sa forme- il ne croit en rien, ne remet son existence entre les mains d'aucune autre personne que lui même et cette position centrale fait de lui un homme de confiance pour son supérieur dont le jugement ne sera en rien influencé par quelques préférences. C'est d'ailleurs ce qu'on lui demande : Jauger les effets du traitement sur les élèves de Weins et s'assurer que le personnel est à la hauteur. La tâche est accomplie sans remords ni faussetés. Il pose des diagnostiques, en réfère à qui de droit et s'il lui arrive d'éprouver quelques sympathies au détour des couloirs il ne changera en rien ses avis pour sauver la tête de l'un ou l'autre. Son travail est fait dans les temps et les règles et il estime -à raison- que ce n'est pas à lui de sauver le monde. Oui il aide, prévient, met en garde et suggère mais si en face la personne reste sourde et refuse fermement de changer il ne s'attardera pas. Car il aime à voir les questions se bousculer dans les têtes qu'il croise, activer un déclic, une idée ou un sentiment. Provoquer faits et effets jusqu'à tant embrumer qu'on revient docilement chercher son soutient. Là alors il prend la main, s'immisce en vous et arrivé à ce stade … ne vous reste qu'à espérer qu'il vous apprécie assez pour ne pas vous transformer en loque humaine dans la semaine qui suivra.

Ainsi comprenez, pour le décrire il faut parler en nuances. En tonalités de blanc, de gris et de noir tantôt purs tantôt livides. Hunter peut se révéler d'une cruauté froide, car il est humain est possède bien entendu ses mauvaises têtes. Devenir nuisible à ses yeux acier, c'est avoir l'assurance de connaître une défaillance sans retour possible concernant votre santé mentale. S'il préfère ne pas en venir aux mains ce n'est pas par peur de prendre de coups ou d'en donner car ça c'est encore le moindre mal qu'il puisse offrir mais si vous jouez sur son terrain il bousillera votre jeu en moins de deux. Logique et fiable dira-t-on, impressionné. Mais sous le manteau Hunter est un serpent qui s'il n'est pas forcément vil, ne vous souhaite pas une longue vie heureuse et paisible. Il a ce besoin de profiler devenu mécanique si bien qu'il décortique n'importe qui parfois pour satisfaire ses seules envies. Dans la rue, à la terrasse d'un café ou au travail le cerveau carbure à vous disséquer et rien ne lui échappe. Il approche des cinquante ans, il n'a plus l'âge d'être dupe et il ne sait d'ailleurs plus l'être. Sous son regard … tout devient trop limpide. Trop transparent.

Reste à savoir que le psychiatre a ses manies, ses plaisirs. Amateur de bon vin, de dessins et d'art. Il caresse quelques fois les touches d'un piano et parce qu'il aime à bien faire la chose est ravissante pour qui aura l'honneur de l'écouter. La lecture et les discussions, les échecs sont des passes temps ; l'homme est un cérébral dont l'attention saura être retenue à condition d'y mettre les formes. De l'humour, il en faut un peu au moins et le sien reste habile, jamais blessant. En société il fait merveille, vous propose galamment son bras et ses sorties se feront plus volontiers à l'opéra que dans un bar. Sachez enfin qu'il n'a pas d'hésitation à ouvrir sa porte, à vous retrouver si vous le demandez. Une part de lui est ouverte et chaleureuse et à sa mesure il sait prendre soin de ses relations même si cela l'arrange à la fin.

Hunter Stanton, c'est cette épée de Damoclès qui vous pend au dessus de la tête, une balance parfaitement équilibrée mais prenez garde car la lame est à double tranchant et s'il choisit de vous anéantir, il vous laissera en cendres.