«Qu’est-ce que le fascisme ? Un socialisme affranchi de la démocratie»
— Charles Maurras.

La nuit tombait sur le campus. Par delà l'enceinte extérieure, on pouvait entendre les bruits de la ville comme autant de battements de cœur. Un pouls saccadé, fébrile, celui d'un organe abîmé et fatigué, corrompu par la maladie et agité des derniers soubresauts de celui qui lutte pour ne pas sombrer dans l'oubli. La lente agonie de la ville attristait Caleb, le touchait à un point qui en aurait surprit plus d'un s'ils avaient pu deviner ses sentiments. Fort heureusement, ses secrets demeuraient bien enfoui dans son crâne. Quand on s'est donné pour mission d'éradiquer la vermine, il n'y a pas de place pour le sentimentalisme. Il aurait bien assez tôt besoin de toutes ses facultés pour livrer son combat, le combat d'une vie contre l'anarchie et le chaos pour assurer le triomphe de l'ordre et l’avènement d'une nouvelle ère pleine d'opportunités pour les fils et les filles de la Nation.

Tout exalté de sa propre ferveur, il passa en revue les raisons de sa présence en ces lieux, les chemins tortueux qui avaient guidés ses pas jusqu'ici, lui offrant ce qui avait toujours manqué à son existence : un but, un sens profond à tout ce merdier. De son enfance, il n'avait retenu que les brimades et les privations. L'abandon de parents fantômes l'avait fait atterrir dans un orphelinat crasseux de Chicago où il avait grandi à la dure. Très tôt, il avait du apprendre à se défendre contre les petits caïds et les autres merdeux, et il s'était assez bien débrouillé. Bien sur il avait aussi dérouillé mais avait accueilli chaque coup comme une leçon, chaque bleu comme un trophée. Quand tu souffres, ça veut dire que tu es vivant. Il n'avait pas tardé à enseigner à son tour à ses petits camarades le prix de la survie.

Il fut ainsi baladé d'orphelinats en orphelinats, répétant inlassablement la même routine : plutôt que d'attendre d'être tabassé, chercher la castagne le premier, de préférence auprès des plus vieux, des plus forts. S'imposer était devenu une règle de vie, montrer d'entrée de jeu qui était le fort et qui resterait le dernier debout. Avec le recul, il comprit pourquoi il déménageait sans cesse. A chaque fois, il était question de le protéger contre les autres paumés, mais il n'était pas dupe : c'était de lui qu'on protégeait les autres.

Le dernier établissement où il atterrit battait tous les records. De toute la côte est, il n'en était pas de plus craignos, mais même là sa réputation l'avait précédé, si bien que pour une fois dans sa vie, on lui ficha une paix royale. Il était même le seul autorisé à avoir un sac de frappe dans sa chambre. Ce qui ne l'empêcha pas de lui substituer quelques voisins de chambrée. C'est bien joli un sac de sable mais ça rends rarement les coups. Il commençait à se plaire à New York quand il fut contraint de quitter l'orphelinat, il était devenu trop vieux pour être encore hébergé par l'institution, et pour la première fois de sa vie il se retrouva livré à lui même, hors du cadre. Avec quelques dollars en poche, gentiment fournis par ses camarades de jeu, il se dégota une petite piaule miteuse qui devenait son premier vrai foyer. Le soir même, il sorti en ville essayer de gagner de quoi vivre, et trouva rapidement un boulot pour lequel il avait des prédispositions certaines. Et c'est ainsi qu'il entra dans le cercle très fermé des combats clandestins. Il se fit rapidement un nom dans les fosses, suscitant l’intérêt de par sa férocité et la violence de ses punchs. Il attira aussi l'attention des bookmakers, des parieurs et d'un échantillon non exhaustif de la faune locale, mais aussi de certaines personnes particulières, des recruteurs comme il allait bientôt le découvrir.

Il menait sa petite barque tranquillement lorsque sa vie bascula et prit un tournant inattendu. On ne vit pas de cette manière sans se faire d'ennemis : les adversaires revanchards, les losers qui avaient fait la connerie de miser sur ses minables adversaires, les jaloux qui amenaient leurs copines aux combats et voyaient ces étincelles de désir quand il se battait... Caleb s'était mis pas mal de monde à dos, et à sa paranoïa s'ajoutait un besoin grandissant de laisser libre cours à sa violence. Avant ça, elle était plus ou moins contenue par des repères dans les orphelinats, mais ici plus aucune digue ne retenait le flot constant de sa colère, et il distribuait des coups pour le plaisir. Le fort a pour devoir d'écraser le faible après tout. Jusqu'au jour où il remarqua qu'on le suivait, le même type et depuis quelques semaines. Il avait appris qu'il se renseignait, posait des questions sur lui à ses voisins. Ce jour là, il décidé qu'une mise au point s'imposait, plutôt une mise aux poings en fait. Il lui tendit une embuscade dans les méandres de ruelles jouxtant son appartement et lui tomba sur le râble en une fraction de seconde...le temps pour lui de passer cul par dessus tête et d'atterrir dans les poubelles au terme d'un assez gracieux vol plané. Il se redressait quand il vit l'inconnu sortir de sa veste un pistolet et une paire de menottes.

"Enfiles ça fiston et fais pas d'histoire. Agression envers un membre de la police, ça va chercher loin. Je pourrai même t'abattre comme un chien et t'offrir en guise d'épitaphe deux lignes dans un rapport qui finira aux archives, mais certaines personnes souhaiteraient te rencontrer. Elles ont des projets pour toi."

Pour la première fois de sa vie, Caleb eut l'air d'un vrai con. Maîtrisé par un pignouf en costard, menacé de mort et obligé de s'attacher lui même, le tout en quelques secondes et pour un gars qui n'a jamais baissé les yeux, ça force à se remettre en question. On le fit monter à l'arrière d'une berline noire et il fut conduit dans une espèce de campus universitaire, débarqué en secret jusque dans une salle sans fenêtre et relativement à l'écart des autres bâtiments. On l'assit sur une chaise tandis qu'on lui braquait une lampe directement dans les yeux, on se serait cru dans un de ces vieux films d'il y a 150 ans. Il entendit une porte s'ouvrir et les pas d'une demi douzaine de personnes qui pénétraient dans la pièce. Le peu qu'il vit d'elles était un mélange de blouses blanches, de tailleurs et de costumes mais il en vit assez pour discerner chez deux d'entre elles des holsters, avec l'intime conviction qu'ils savaient se servir de leur contenu. Ils l’interrogèrent longuement sur son passé, sa vie en général, ses motivations et ses buts. Certains hochaient la tête, d'autres prenaient des notes, seul un écoutait en retrait dans un coin d'ombre, debout les bras croisés. Il les entendait discuter de lui entre eux comme s'il n'était pas présent. Il ne comprenait rien à leurs échanges où il était question de "Gouvernement", d'une "académie Weins", du "programme". Ils avaient l'air d'être divisé sur la question, mais il comprit assez rapidement que la moitié d'entre eux lui vouait un intérêt comme on observe un insecte, alors que l'autre parlait de le piquer comme le chien fou qu'il était assurément. Au final, c'est l'homme silencieux qui prit la parole pour la première fois en plusieurs heures de palabres.

"J'ai décidé". Le silence se fit instantanément. "Je le veux, il a le potentiel, aucun passé, aucune famille, aucune éducation, il n'y a rien à nettoyer, il est le réceptacle parfait. Sa prédisposition naturelle à la violence et sa volonté de survivre sont des qualifications appréciables."
Il s'approcha alors de Caleb et le fixa droit dans les yeux. C'était la première fois que quelqu'un soutenait son regard, et Caleb sut que dans d'autres circonstances, même détaché, même seul avec cet homme, jamais il n'aurait baissé le regard. Caleb déglutit péniblement, il éprouvait une sorte de terreur sourdre en lui, une émotion nouvelle. Qui que fut cet homme, il émanait de lui la tranquille assurance du pouvoir, la certitude de ses actions et un sang froid de tueur. Il avait l'impression de regarder dans les yeux sans vie d'un serpent, et cette pensée lui glaça les sangs.
Comme conscient de son malaise, l'homme esquissa un sourire sans joie et reprit :
"Actuellement, tu n'es rien d'autre qu'un déchet, une petite frappe sans foi ni loi, et sans honneur. Mais nous allons te donner tout ça, t'inculquer nos valeurs, donner un sens à cette pitoyable chose que tu penses être ta vie.". Il n'y avait nul mépris dans la voix de l'homme, juste l'énoncé d'un simple constat, une observation clinique et méthodique, un résumé objectif de Caleb.
"Et en retour, tu nous servira. Je peux ôter de ta conscience le remord, la culpabilité, les regrets, et remplacer tout ça par la dévotion, le service et la gratitude de tes pairs."
L'homme se retourna alors vers les autres et s'adressa à eux d'un ton qui ne souffrait aucune contradiction :
"Montrez lui son nouveau foyer, j'ai d'autres taches qui requièrent mon attention. Je reviendrai m'assurer qu'il s'acclimate bien ici, aussi puis-je compter sur votre pleine collaboration. Ne me décevez pas." Caleb devina que cette menace à peine voilée s'adressait aussi bien à ses examinateurs qu'à lui même. L'homme quitta la pièce et avec lui s'évanouit une certaine forme de tension, l'air devint moins oppressant.

Il fut conduit ensuite dans une chambre afin de s'y reposer, et le lendemain commença son apprentissage. C'était une école hors du commun et il comprit instantanément ce qu'on attendait de lui. Il allait devenir un soldat du Gouvernement, et à mesure qu'il appréhendait ce concept, il se sentit de plus en plus à l'aise avec le concept général. Il tenait enfin sa revanche sur la vie. S'il avait continué comme auparavant, on l'aurait sans doute retrouvé dans un caniveau avec une balle entre les omoplates, mais ici, il allait pouvoir trouver un exutoire à ses pulsions, et on l'admirerai pour ça. Et comme d'habitude, cela commencerait par une bonne baston. Un nouveau joueur entrait en lice, et il était temps de le faire savoir....


Caleb s'arracha à ses rêveries. Des années après, voilà où il en était. Il avait reçu une éducation, le Gouvernement pourvoyait à ses moindres besoins et il était devenu le prototype idéal de l'agent dévoué, il n'avait pas eu besoin d'être endoctriné comme ces faiblards de plombs. Et Dieu sait qu'il en avait pété, des plombs. Non, lui avait parfaitement et volontairement assimilé l'essence du concept, et la justesse de sa cause était indéniable. Bientôt, il sortirai de l'académie, prêt à servir, aiguisé comme un bon outil, destiné à séparer le bon grain de l'ivraie.

« La fermeté de caractère, jointe à la faculté de généraliser, fait les hommes supérieurs »
— Jean-Baptsiste Say.

Il est toujours difficile de juger un homme à son caractère, tant celui ci peut varier avec les époques, les expériences vécues, les rencontres. Pas avec Caleb. Quand on le rencontre, la première chose qui frappe, ce ne sont pas ses poings (encore que...) mais plutôt sa force de conviction. Entièrement dévoué au Gouvernement, inflexible dans ses décisions, incorruptible quand à ses idéaux. Il est plus buté qu'une mule mais il le voit comme un avantage, aucune considération ne devrait jamais détourner l’honnête citoyen de la recherche d'une société idéale, purgée de la fange et de la corruption, lavée de ses péchés et affranchie de ses faiblesses. La drogue, le vice, la liberté d'expression sont autant de faiblesses qui minent les efforts pour reconstruire notre nation. Nous avons besoin de l'attention vigilante et de la poigne ferme d'un parent autoritaire, incarné par notre leader bienveillant Mickael Gordon.

"J'ai vécu dans la solitude, grandi sans parents, sans guides ni repères, je sais de quoi je parle. Quand un arbrisseau pousse sans tuteur, il pousse déformé, tordu et ne résiste pas à la tempête, il donne des fruits pourris et sans saveur, et ne tarde pas à propager ses infections à la forêt toute entière. Heureusement, pour palier à ces désagréments, il y a le bûcheron bienveillant qui opère des coupes programmées, assurant ainsi la pérennité de la flore. Ce n'est pas pour rien que toute tronçonneuse est dotée d'un guide. Ce qui ne peut être soigné doit être coupé, c'est l'évolution".

Caleb est jugé ultra-violent par ceux qui croisent sa route, mais depuis son recadrage par l'Académie, il a découvert que la fin justifiait les moyens, ceux qui subissent cette violence la méritent, ceux qui marchent droit dans leurs bottes n'ont donc pas à craindre de lui aussi longtemps qu'ils ne le provoquent pas. Il éprouve toujours du plaisir à cogner, ce qui l'emplit de fierté : quel mal y a t'il à éprouver du plaisir dans l'accomplissement de sa tâche ? C'est tout de même mieux de joindre l'utile à l'agréable. S'il est violent, il n'est en revanche pas nécessairement sadique et s'acharne rarement sur ses victimes. Beaucoup de plombs penseraient le contraire mais aucun ne lui a encore fait la remarque, personne ne veut parler sémantique avec un type capable de te péter la mâchoire pour un lit mal fait. En fait, ce qui le sépare encore pour un temps de la bestialité, c'est que cette violence sert un but plus grand que ses appétits personnels. Gare à ceux qui iraient à l'encontre des valeurs de Caleb, car pour ceux là, pas de quartier. On ne fait pas d'omelette sans casser les œufs.

Ce qu'il pense des rebelles ?
"Massacrez les tous, Dieu reconnaîtra les siens et le Gouvernement s'occupera des autres"

Les plombs ?
"Seuls les plus forts méritent de s'en sortir pour peu qu'ils se débarrassent de leurs préjugés sur le Gouvernement. Pour les autres, les faibles, il existe la sélection naturelle"

Les citoyens ?
"l'innocence n'existe pas, il n'y a que des degrés de culpabilité"

Ton p'tit nom/pseudo : Thomas
Ton âge : 30 ans
Un ou plusieurs comptes sur le forum ? non
Comment as-tu connu le forum ? par Boogie, ma meilleure amie
Et comment tu le trouves ? en allant Google (très bien, je vais m'y plaire)
Quelque chose à ajouter ? c'est mon premier forum RP, soyez indulgents.